Intervention de Philippe Marini

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 26 janvier 2011 : 1ère réunion
Situation économique et financière de l'espagne de l'estonie et de l'ensemble de la zone euro — Communication

Photo de Philippe MariniPhilippe Marini, rapporteur général :

L'Espagne, où je me suis rendu du 4 au 6 juillet 2010, est un important partenaire économique de la France, dont le cycle de croissance rapide a été brutalement interrompu par la crise. La récession s'y est élevée à - 3,7 % en 2009, soit moins que la moyenne de l'Union européenne et de la zone euro. Cela s'explique sans doute en partie par la relance budgétaire importante, qui a remis en cause une décennie de vertu budgétaire. Mais si la relance a atténué la crise, elle n'a en rien permis de résoudre les problèmes structurels de cette économie. L'endettement public rapporté au produit intérieur brut devrait doubler entre 2008 et 2012, tout en restant à un niveau inférieur à la moyenne de la zone euro.

La crise a mis à mal le modèle économique espagnol et les facteurs de reprise sont fragiles. La demande interne stagne tant en raison des restrictions budgétaires que de l'inquiétude des agents, qui se traduit par une augmentation du taux d'épargne. Le niveau des exportations est tributaire de celui, incertain, de la demande mondiale. L'Espagne connaît une situation que certains banquiers ont qualifiée de « quasi-credit crunch » alors que les prix de l'immobilier se sont effondrés et que le stock de logements vides représente environ trois années de production.

La stratégie de l'Espagne consiste à regagner la confiance par un ajustement budgétaire ambitieux, une réforme du secteur financier s'appuyant notamment sur le Fonds de restructuration ordonnée des banques, une réforme du marché du travail et un accroissement des aides aux entreprises. Pourtant, l'inquiétude persiste en raison des incertitudes sur les créances douteuses dans les bilans des banques, de l'absence de nouveau moteur clairement identifié pour la croissance et du niveau angoissant du chômage.

S'agissant de l'Estonie, où je me suis rendu du 10 au 12 octobre 2010 et qui est entrée dans la zone euro le 1er janvier 2011, il s'agit d'un pays de 1,34 million d'habitant dont le PIB par tête représente 64 % de la moyenne communautaire, c'est-à-dire un niveau comparable à celui de la Pologne, de la Hongrie ou de la Croatie. La Roumanie se situe à 46 % de la moyenne communautaire.

L'Estonie cherche à s'intégrer à la communauté internationale et appartient désormais à l'OTAN, à l'Union européenne, à l'OCDE, à l'espace Schengen, à la zone euro et même à l'Organisation internationale de la francophonie, où elle a un statut d'observateur. Son secteur financier est très largement détenu par les banques suédoises. Elle est proche géographiquement et linguistiquement de la Finlande, avec laquelle elle partage désormais sa monnaie. Il s'agit d'un pays qui cherche à fonder sa crédibilité sur l'orthodoxie économique. Elle a fait le choix de la stabilité monétaire et, du fait la stabilité des parités, l'euro était déjà, en pratique, la monnaie de l'Estonie. Par exemple, 95 % des prêts immobiliers étaient libellés en euros.

L'Estonie a alterné depuis 1991 des phases de croissance rapide et de profondes récessions. Son PIB a par exemple reculé de 13,9 % en 2009. La croissance revient désormais, mais à des taux moins élevés qu'auparavant, signe que le PIB potentiel a été affecté. L'Estonie va devoir résoudre les problèmes structurels en matière de chômage, d'inflation, de spécialisation de son économie et de conservation de sa main d'oeuvre, tentée par l'émigration.

Les finances publiques sont encore proches de l'équilibre, situation qui est facilitée par le concours de 3,4 milliards d'euros de fonds structurels européens sur la période 2007-2013, qui représentent l'équivalent d'une demi-année de dépense publique. L'Estonie devrait rester en situation de déficit public au cours des prochaines années, malgré le retour de la croissance. Son niveau d'endettement public rapporté au PIB, qui s'établit à 8 % en 2010, reste très favorable mais ce ratio devrait tripler entre 2007 et 2012.

L'Estonie est un pays libéral qui a fait le choix de la simplicité fiscale, en retenant un taux unique de 21 % pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés (IS) et deux taux de taxe sur la valeur ajoutée, un taux normal de 20 % et un taux réduit de 9 %. Pour autant, elle ne pratique pas de dumping fiscal, notamment si l'on considère que le taux réel de l'IS s'élève en France à environ 22 %.

Au total, l'Estonie est un pays rigoureux dont on peut s'attendre à ce qu'il soutienne, au sein de la zone euro, des positions proches de celles des autres Etats de l'Europe du nord.

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