a d'abord estimé que le stress fait l'objet, en France, d'affrontements très idéologiques. Le stress apparaît lorsqu'il y a un déséquilibre, chez l'individu, entre les contraintes qui lui sont imposées et les ressources qu'il peut mobiliser pour y faire face. Une approche marxiste, plutôt défendue par les syndicats, conduit à considérer que le problème du stress sera résolu si l'on diminue ces contraintes, notamment en réduisant la charge de travail des salariés. En revanche, l'approche libérale, plutôt défendue par la partie patronale, repose sur l'aide individuelle à apporter à chaque salarié pour qu'il s'adapte mieux à ses contraintes. Cette opposition stérile a perduré jusqu'à ce que la vague de suicides chez Renault amène les médias à s'intéresser à ce problème, désormais appréhendé comme un véritable fait de société.
Les cabinets de consultants, comme l'Ifas, doivent d'abord être agréés par le ministère du travail avant de pouvoir mettre leur expertise au service d'un comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT). Cependant, certains cabinets sont considérés comme proches des syndicats, tandis que d'autres ont la réputation de défendre des positions pro-patronales. Dans le cas de France Telecom, le cabinet Stimulus, par exemple, n'avait aucune chance d'être choisi par le CHSCT, dans la mesure où les syndicats qui y siègent souhaitaient entendre un discours différent de celui que ce cabinet leur aurait vraisemblablement tenu. En raison de postures trop systématiquement idéologiques, aucun universitaire ne fait autorité en France sur la question du stress ni ne jouit d'une véritable reconnaissance internationale.
Les facteurs de stress sont bien connus : charge de travail excessive, injonctions contradictoires, mode de management ou d'organisation du travail... L'enjeu essentiel est donc d'apprécier dans quelle mesure le travail est à l'origine du stress des salariés.
Les facteurs de stress peuvent être regroupés en plusieurs familles : certains sont liés à des données individuelles, comme l'âge ou le sexe ; sur ce dernier point, le pourcentage d'hommes en situation de « sur-stress » est compris entre 20 % et 25 %, alors que ce taux est proche du tiers chez les femmes ; d'autres sont liés à la personnalité ou à la génétique ; d'autres encore à des événements de vie, comme un divorce ou des problèmes d'argent ; certains facteurs ont une origine professionnelle ; enfin, le stress peut résulter du style de vie (alimentation, manque de sommeil, etc.). Or, quand on constate qu'un salarié est stressé, on a tendance à en imputer entièrement la responsabilité à son employeur, alors que le stress est toujours multifactoriel.
Plus un salarié occupe un rang hiérarchique modeste dans l'entreprise, plus il aura tendance à être stressé, ce que l'on peut expliquer par une plus faible « illusion de contrôle » ; en d'autres termes, l'impression qu'ont les dirigeants de maîtriser la situation les prémunit, dans une certaine mesure, contre le stress, tandis que les salariés placés dans une position très subordonnée ne bénéficient pas de cet effet protecteur.
Il existe généralement dans une entreprise des « foyers » de stress, des services où le stress est plus présent, et c'est prioritairement en direction de ces salariés qu'il faut agir, ce que le jeu syndical empêche parfois de faire efficacement.
Pour rester compétitives, les entreprises doivent désormais être adaptables. Or, les salariés français sont peu mobiles, beaucoup moins, en tout cas, que leurs homologues américains : aux Etats-Unis, un salarié qui n'est pas satisfait de son travail quitte l'entreprise, alors qu'un salarié français aura tendance à se sentir enfermé dans son emploi, ce qui peut conduire, dans les cas les plus graves, au suicide, faute de trouver une autre issue.