a apporté les éléments de réponse suivants :
- la question de l'adhésion à terme des Etats des Balkans est claire : leur appartenance géographique à l'Europe n'est pas discutée et une « perspective européenne » leur a été ouverte lors du Sommet de Zagreb, tenu en 2000 sous présidence française. Ils ont donc vocation à entrer dans l'Union, à condition d'une part qu'ils respectent l'ensemble des critères de Copenhague, ce qui nécessite de leur part encore beaucoup d'efforts à accomplir, tant dans le domaine politique qu'économique, et que, d'autre part, la capacité de l'Union à les accueillir le moment venu soit acquise. Tous ces Etats ne sont pas au même état d'avancement : certains comme la Slovénie sont déjà membres de l'Union et les négociations ont commencé avec la Croatie. Des avis divergents pouvaient exister parmi les juristes sur la question de savoir si après la récente révision constitutionnelle un référendum était obligatoire avant l'adhésion de la Croatie. La décision de principe concernant le lancement du processus de négociation avec la Croatie ayant été prise avant le 1er juillet 2004, le gouvernement considère qu'un référendum ne sera pas obligatoire (au sens de la récente modification constitutionnelle) pour la ratification du traité d'adhésion de ce pays. La Bosnie-Herzégovine n'en est qu'au stade initial de négociation d'un accord d'association et de stabilisation, préalable aux négociations d'adhésion elles-mêmes. Il en est de même pour la Serbie-et-Montenegro. Chaque Etat doit progresser vers l'Union selon ses mérites propres, mais la perspective d'adhésion offerte à ces pays constitue un levier puissant pour leur indispensable transformation.
- les nuances d'appréciation sur le rôle de l'OTAN, entre la France et l'Allemagne, sont traditionnelles et ne doivent pas être exagérées. L'Allemagne met l'accent, tout comme notre pays, sur le rôle décisif de l'Alliance atlantique en matière de sécurité, la France considérant pour sa part que l'Alliance doit rester fidèle à sa vocation originelle, essentiellement militaire, et ne peut donc devenir le lieu exclusif des débats transatlantiques, le Sommet Europe-Etats-Unis devant en constituer l'enceinte principale.
- les négociations sur les taux réduits de TVA se sont déroulées pendant plus de deux ans. La liste des exceptions permettant de recourir au taux réduit est déjà longue, 9 pays sollicitant également des dérogations. Au cours de la négociation, près de 70 demandes ont été déposées. Même si la négociation a abouti positivement, il convient de tirer les leçons de ces débats en engageant une réflexion sur une réforme de la directive de 1992 qui a posé les règles en la matière. Au demeurant, peu d'Etats sont prêts à renoncer à la règle de l'unanimité en matière fiscale. On peut cependant poser la question de l'application, en l'espèce, du principe de subsidiarité, en l'absence de risques pour la concurrence, mais aussi celle des taux eux-mêmes dont la flexibilité peut être utile pour les services à forte intensité de main d'oeuvre. Cette négociation aura cependant permis que s'engage une réflexion sur le sujet, la Commission étant chargée d'une étude pour la mi-2007. En matière de fiscalité, une démarche d'harmonisation est essentielle, compte tenu du risque de « dumping fiscal », préjudiciable au fonctionnement du marché intérieur. Au demeurant, alors que de nombreux partenaires ne souhaitaient pas initialement s'engager dans la voie de l'harmonisation de l'impôt sur les sociétés, cette question fait désormais l'objet de discussions au sein du conseil « marché intérieur » en vue, dans un premier temps, d'une harmonisation de l'assiette de cet impôt, à charge d'aborder ensuite la question des taux. En matière de TVA, l'unanimité aurait cependant continué de s'appliquer même si le traité constitutionnel était en vigueur, puisque la France, qui avait pourtant souhaité le passage à la majorité qualifiée dans ce domaine, n'avait pas alors obtenu satisfaction.
- la proposition de directive sur les services vise des objectifs positifs, puisqu'il s'agit d'appliquer la liberté et l'ouverture des services, qui constitue une des quatre grandes libertés du marché intérieur. Cette liberté de prestations de services dans l'Union reste aujourd'hui en effet largement théorique, puisqu'en l'absence de droit dérivé, son application reste soumise à l'appréciation des Etats. Or, tous les Etats européens ont intérêt à la libéralisation des services, singulièrement la France, deuxième exportateur de services en Europe et quatrième dans le monde. Le projet de directive comprenait néanmoins certains éléments négatifs, notamment au regard des exigences sociales de l'Union. Le Conseil européen, unanime, a donc demandé, à l'initiative de la France, une « remise à plat » de ce texte. Il est en cours d'examen au Parlement européen, où un vote en séance plénière devrait intervenir le 16 février prochain. Les travaux du Parlement européen ont déjà permis d'améliorer le texte dans trois domaines : le champ d'application, qui préserve la spécificité des services publics (notamment pour la santé, l'audiovisuel et la culture), la règle de l'application du droit du travail du pays de destination, désormais affirmée sans ambiguïté, enfin le principe dit « du pays d'origine » auquel de nombreuses modifications ont été apportées, mais sur lequel le gouvernement français souhaite encore obtenir des avancées. Il est difficile de dire à ce stade s'il sera suivi, mais le texte issu des travaux de la commission « marché intérieur » du Parlement européen est déjà plus satisfaisant. Après le vote du Parlement européen, la Commission sera de nouveau saisie. Elle fera une nouvelle proposition. Il paraît possible de disposer à terme d'un projet de directive qui réponde à l'objectif d'intérêt général, et corresponde à ce que la France souhaite.
- la société Arcelor faisant l'objet d'une tentative d'OPA inamicale, il est légitime que le gouvernement français s'intéresse à un dossier qui représente 27.000 emplois en France, et qu'il se soucie du projet industriel qui la fonde. L'entreprise qui conduit cette OPA n'est d'ailleurs pas indienne, mais européenne, puisque Mittal Steel est une entreprise de droit néerlandais, dont le principal actionnaire est britannique. La question posée est donc de savoir si, par la taille de l'entité qui résulterait de cette opération, ne se poserait pas un problème de concurrence. L'Europe doit par ailleurs définir une politique industrielle qui tende à l'émergence de « champions européens ». La France a longtemps été isolée sur ce thème, mais ses idées progressent. La Commission européenne travaille sur cette question pour promouvoir une logique de « patriotisme économique européen » sur celle de stricte concurrence. L'idée d'interdire les OPA n'est pas envisageable : la France, comme l'Union européenne investissent largement dans les pays tiers et, dans un monde désormais ouvert, elles tirent profit de la mondialisation.
- l'Europe en effet ne se porte pas mieux depuis le « non » au référendum. Il n'existe pas de plan B. On le constate jour après jour.
- le choix entre élargissement et approfondissement s'est posé dès l'origine, mais l'Europe a toujours réussi à mener de front les deux processus. Si l'Europe des six suscite parfois une certaine nostalgie, elle a aussi connu des périodes de crise profondes. Son intégration était bien moindre que celle de l'Europe actuelle, qui a su développer de vraies politiques communes. La phase européenne actuelle ne doit donc pas occulter les succès obtenus depuis près de 50 ans.
- la définition d'une politique européenne de l'énergie demandera du temps, car il faudra passer d'une logique de concurrence à une politique intégrée. A cet égard, l'élaboration d'un document stratégique et d'un programme de travail sur ce thème sera l'un des enjeux du Conseil européen de mars prochain.
- le traité constitutionnel permettait en effet des avancées notamment avec la présidence stable et de nouvelles règles régissant les domaines soumis à la majorité. Il reste que ce traité ne peut entrer en vigueur qu'assorti des 25 ratifications. Du point de vue de la Ministre, il est difficile d'imaginer soumettre de nouveau le texte au vote des Français et une renégociation, dont l'issue serait d'ailleurs très incertaine, n'est pas souhaitée par nos partenaires. Pour sortir de cette situation, le Président de la République a proposé de partir des traités existants et d'utiliser les marges d'amélioration qu'ils comportent. L'accord des 25 sur cette démarche n'est pas acquis, mais la démarche mérite d'être engagée. Une implication des parlements nationaux est possible depuis la révision constitutionnelle et son information est désormais facilitée.
- la France souhaite que la problématique de l'élargissement dépasse l'alternative de l'adhésion ou de la non adhésion. Le Conseil européen de juin sera l'occasion d'aller au-delà de l'examen des critères habituels d'adhésion pour donner un véritable contenu à la politique de voisinage comme alternative à l'adhésion. Tel est le message qui a été clairement formulé à l'Ukraine, pour laquelle une adhésion à l'Union n'est pas envisagée. Ses responsables politiques l'ont d'ailleurs bien compris.
- à l'égard des pays de la rive Sud de la Méditerranée, l'Union européenne doit combiner les divers instruments dont elle dispose : le processus euroméditerranéen de Barcelone, les accords d'association avec chacun des pays riverains et les moyens financiers. La question du soutien financier à l'Autorité palestinienne est d'un autre ordre. Il est soumis à trois conditions précises : la reconnaissance par le Hamas de l'Etat d'Israël, la renonciation de ce mouvement à la violence et le respect des accords de paix. Dans l'attente de la formation du gouvernement palestinien, l'Union européenne, tout comme les Etats-Unis, maintiennent leur aide financière à l'Autorité palestinienne.
Le développement de la défense européenne fait l'objet de fortes attentes, non seulement de la part des partenaires de la France, mais aussi de la part des Français qui en font souvent leur seconde préoccupation, après l'emploi, dans ce qu'ils espèrent de l'Europe. Les progrès réalisés depuis 1998 dans ce domaine ont d'ailleurs été considérables. La défense européenne ne peut toutefois être seulement fondée sur des mécanismes institutionnels, elle requiert aussi des moyens budgétaires adaptés.