Intervention de François Autain

Commission des affaires sociales — Réunion du 15 décembre 2010 : 1ère réunion
Lutte contre la pandémie grippale a h1n1 — Audition de Mme Rolande Ruellan présidente de la sixième chambre de la cour des comptes Mm. Christian Phéline conseiller maître responsable du secteur santé simon bertoux auditeur co-rapporteurs et Mme Camille L'hernault commissaire aux comptes

Photo de François AutainFrançois Autain :

Je vous félicite de la qualité de ce travail, qui rejoint nos critiques. Vous avez dit, au début de votre intervention, que votre jugement était globalement positif. Puis vous avez formulé critique après critique. Nous exprimons les mêmes, mais nous concluons, en conséquence, par un jugement globalement négatif ! Pourquoi une appréciation si modérée sur l'action du Gouvernement, alors que celle-ci a, dans tous les compartiments, été en deçà de ce que l'on attendait ?

Un mot aussi de la surévaluation du risque, au mépris de toutes les informations qui nous parvenaient de l'étranger, de l'hémisphère sud en particulier. Le plan avait été conçu pour la grippe aviaire et une mortalité considérable ; il a été appliqué à la lettre, alors que le H1N1 est bien moins mortel. Aucune remise en question n'est intervenue.

Bonne coordination, dites-vous. Aucune coordination, en réalité ! La direction générale de la santé a fait appel au comité de lutte contre la grippe de préférence au Haut Conseil car sa formation était plus restreinte, mieux contrôlée, les délibérations plus rapides - trop rapides, selon moi. Par exemple, avant l'achat des quatre-vingt-quatorze millions de doses, un avis a été demandé, en catastrophe, à propos de la vaccination massive. L'avis a été rendu immédiatement : il reprenait celui formulé deux ans auparavant sur la grippe aviaire ! Un pays comme l'Espagne a fait face bien mieux que nous. A la panique s'est sans doute ajoutée la crainte d'un reproche possible, si le nombre de doses se révélait finalement insuffisant. On s'est dit que « plaie d'argent n'est pas mortelle », que mieux valait gaspiller des fonds publics que de laisser survenir des décès.

S'agissant du Tamiflu, sur les trente-quatre millions de doses réservées par l'Eprus, seulement cinq cent mille ont été utilisées. Les patients évitent autant qu'ils le peuvent d'absorber trop de médicaments, peut-être inefficaces, peut-être dangereux. Pour prévenir l'épidémie, les mesures barrières, l'hygiène, sont les plus efficaces. Le temps de fabrication des vaccins sera toujours trop long, pourtant, le virus a eu la délicatesse de se développer d'abord en Amérique du Sud avant d'arriver en Europe. Mais la prochaine fois ? Le recours à la vaccination de masse n'est pas la méthode la plus efficace contre la pandémie. Les premières personnes immunisées l'ont été en janvier seulement. La vaccination a été inutile, les vaccins ont été gâchés. La défaite est complète. Il est difficile de reconnaître ses erreurs ; et les experts et laboratoires sont solidaires entre eux. Mais ce sont les médecins de base qui ont eu raison ! Mme Ruellan déplore que les médecins n'aient pas donné l'exemple, mais le vaccin était inutile !

La chute du taux de vaccination contre la grippe saisonnière est une conséquence de la perte de crédibilité de la parole publique. Et si nous devions faire face à une grippe particulièrement agressive, cela serait très ennuyeux... A cela s'ajoute le gaspillage de l'argent public. Enfin, est-ce la vocation de l'assurance maladie et des mutuelles que de financer les dépenses de santé publique ? Notre jugement est négatif !

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