Intervention de Brigitte Bout

Commission des affaires sociales — Réunion du 15 décembre 2010 : 1ère réunion
Organisation de la recherche et perspectives en matière de prévention et de traitement de l'obésité — Présentation du rapport établi au nom de l'office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques opecst

Photo de Brigitte BoutBrigitte Bout, rapporteur :

J'en viens aux déterminants environnementaux. A la chute des prix agricoles s'ajoute l'incitation à la consommation par la publicité, à laquelle les jeunes enfants sont particulièrement sensibles : le bandeau informatif obligatoire, difficile à lire, ne sert à rien. Il faut aussi mentionner l'augmentation des portions et l'accès illimité à la nourriture.

La sédentarisation, je le répète, a des effets très néfastes. L'impact du développement technologique ne doit pas être négligé. Enfin, de nouveaux déterminants de l'obésité sont apparus : le stress - car les gens stressés compensent leur malaise en mangeant des produits sucrés ou gras -, certains médicaments, les polluants et perturbateurs endocriniens auxquels Gilbert Barbier consacrera bientôt un rapport au nom de l'Opecst. Doit-on considérer l'obésité comme une adaptation physiologique à notre mode de vie ?

L'obésité est une maladie chronique qui peine à être reconnue. Un schéma établi par le professeur Arnaud Basdevant montre que l'on devient obèse peu à peu, avant d'atteindre un seuil où la maladie devient chronique ; il est alors presque impossible de revenir à son poids initial. Un rapport de l'agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) a mis en lumière le caractère illusoire des régimes amaigrissants dont les magazines font leurs choux gras sitôt le printemps venu. Il faut obliger ceux qui promeuvent de tels régimes à s'engager sur des résultats.

Nous connaissons encore assez mal les mécanismes biologiques liés à l'obésité. En outre, une forme de réprobation morale s'y attache : on pense souvent que les obèses n'auraient qu'à manger moins... Toutes les formes d'obésité n'ont pas le même potentiel pathogène et ne se traitent pas de la même façon. Le poids est à la fois surmédicalisé et sous-médicalisé.

Il faut tirer parti des apports de la recherche pour améliorer la prévention. Sachons intervenir précocement, en prévenant les expositions foetales nocives, en favorisant l'acquisition de saines habitudes alimentaires et comportementales dès l'enfance, ainsi que l'allaitement maternel qui diminue les risques ultérieurs. Il faut aussi encourager l'activité physique et lutter contre la sédentarité, pour prévenir à la fois la prise de poids et les comorbidités liées à l'obésité.

Une politique de prévention primaire est nécessaire, qui doit être démédicalisée, fondée sur des messages positifs, la rénovation des normes sociales et une meilleure éducation alimentaire. Il faut cibler les populations à risque : les Français les moins riches sont plus exposés que les autres, car il est établi qu'un repas équilibré coûte au moins 3,5 euros ; or les fruits et légumes sont devenus hors de prix. D'ailleurs, dans certains milieux défavorisés, on nourrit trop les enfants pour qu'ils aient de la prestance...

Il convient de mettre en place des politiques de prévention plus environnementales : encourager l'usage des escaliers plutôt que des escalators, construire des pistes cyclables et des voies vertes pour courir en ville, limiter l'exposition au marketing.

Le rapport formule dix orientations stratégiques : appliquer les recommandations des rapports précédents, renforcer les politiques sectorielles destinées à réduire les inégalités socioculturelles, privilégier les mesures environnementales plutôt qu'individuelles - en limitant l'exposition à la publicité, en améliorant la qualité de l'offre alimentaire, en créant un environnement favorable à la réduction de la sédentarité -, lancer un plan de prévention reposant sur cinq piliers - une gouvernance interministérielle, un comité scientifique pour recenser les acquis à prendre en compte, la modification des représentations, des actions locales en direction des populations à risque, une évaluation systématique et régulière des mesures prises -, promouvoir la diversité corporelle, en luttant contre la valorisation médiatique de la maigreur - nous avons rencontré à ce propos une association de femmes, appelées « les Grosses », qui assument pleinement leurs formes -, réglementer les régimes amaigrissants, dépister systématiquement l'obésité viscérale, développer la prévention précoce, réorienter la recherche sur l'obésité afin de mieux comprendre ses conséquences morbides - maladies cardio-vasculaires, diabète... - et enfin rédiger une proposition de loi pour promouvoir une France active qui s'alimente sainement.

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