Intervention de Catherine Procaccia

Commission spéciale continuité du service public — Réunion du 12 juillet 2007 : 1ère réunion
Examen du rapport

Photo de Catherine ProcacciaCatherine Procaccia, rapporteur :

a tout d'abord présenté les deux objectifs poursuivis par le texte :

- prévenir plus efficacement les conflits dans les entreprises de transports terrestres et ferroviaires par le développement du dialogue social ;

- garantir, en cas de grève ou de perturbation prévisible du trafic, un service réduit mais connu par avance de la population et répondant à ses besoins prioritaires.

Elle a souligné que ce texte répondait à la fois aux attentes :

- de nos concitoyens qui, à une très large majorité, souhaitent l'instauration d'une forme de service minimum dans les transports publics ;

- des collectivités territoriales organisatrices de transport, qui doivent faire face aux exigences de plus en plus grandes des usagers, et qui réclament donc un meilleur service de la part des opérateurs de transport ;

- des employeurs qui, soumis à une plus forte pression, doivent disposer des moyens nécessaires au maintien d'un service de qualité ;

- des salariés des entreprises de transport, dont les conditions de travail particulières exigent de pouvoir bénéficier, dans leur entreprise, d'un haut niveau de dialogue social.

Ces attentes étant parfois contradictoires, le projet de loi tente d'assurer une conciliation équilibrée et proportionnée entre plusieurs principes constitutionnels : le droit de grève, la liberté d'aller et venir, la liberté du travail, la liberté du commerce et de l'industrie, l'accès aux services publics, la libre administration des collectivités territoriales et la continuité du service public.

Après avoir déclaré que ce dernier principe revêtait une importance particulière en matière de transport public, les collectivités ayant, au cours des dernières années, favorisé, pour des raisons notamment environnementales, le développement des transports collectifs comme mode privilégié de déplacement quotidien de la population, elle a jugé indispensable, en contrepartie, que les services de transport proposés aux usagers atteignent un très haut niveau de qualité de service. Elle a relevé que le projet de loi reposait sur l'idée, d'une part, que le développement du dialogue social pouvait contribuer à la prévention des conflits, d'autre part, qu'un service de transport réduit mais prévisible devait être organisé en cas de perturbation du trafic.

Elle a souligné à cet égard que la moitié des Etats membres de l'Union européenne avait mis en place un service minimum pour les services essentiels et que, dans l'autre moitié, la culture du dialogue social ou un encadrement très strict du droit de grève le rendaient inutile.

Abordant le contenu du projet de loi, Mme Catherine Procaccia, rapporteur, a expliqué que le Gouvernement avait choisi, à l'article premier, de limiter le champ du texte au secteur des transports terrestres réguliers de personnes afin de répondre prioritairement aux attentes quotidiennes de nos concitoyens qui utilisent les transports en commun. Pour autant, le projet de loi ne doit être qu'une première étape qui pourra être complétée ultérieurement par l'instauration d'un service minimum dans d'autres modes de transports, en particulier les transports maritimes et aériens ou encore le fret, voire d'autres services publics, comme le service postal ou l'éducation nationale.

S'agissant des dispositions tendant à renforcer le dialogue social dans les entreprises de transport, elle a indiqué que le texte entendait généraliser les pratiques « d'alarme sociale », en vigueur à la RATP et à la SNCF, qui ont permis de réduire significativement le nombre de jours de grève. A cette fin, le projet de loi prévoit la négociation, avant le 1er janvier 2008, d'accords d'entreprise organisant une procédure de prévention des conflits et rend obligatoire une phase de négociation préalable avant le dépôt de tout préavis de grève. Après avoir indiqué que si la négociation d'entreprise n'aboutissait pas, les entreprises seraient couvertes par l'accord de branche éventuellement négocié par les partenaires sociaux ou, à défaut, par des dispositions fixées par décret, elle a signalé que la RATP, la SNCF et les autres entreprises qui se sont déjà dotées d'un accord de prévention des conflits pourraient conserver leurs accords jusqu'à ce qu'ils soient renégociés.

Puis Mme Catherine Procaccia, rapporteur, a souligné que le projet de loi encadrait de manière plus rigoureuse le dépôt des préavis de grève. Après avoir rappelé que la création du préavis de grève, en 1963, avait pour objectif d'empêcher les « grèves surprises », qui interdisent toute prévisibilité du trafic et toute information des usagers, elle a indiqué que cette règle était parfois contournée par le dépôt de préavis de grève quotidiens aboutissant à créer un « préavis permanent ». C'est pourquoi l'article 3 du projet de loi a pour objet de limiter cette pratique, dite des « préavis glissants », en prévoyant, à l'instar des règles en vigueur dans l'audiovisuel, qu'un nouveau préavis ne peut être déposé par le même syndicat et pour le même motif avant l'échéance du préavis en cours.

Abordant le deuxième volet du projet de loi relatif à l'organisation de la continuité du service public de transport, Mme Catherine Procaccia, rapporteur, a présenté les trois mesures importantes de l'article 4, destinées à garantir aux usagers la qualité du service :

- la définition par l'autorité organisatrice de transport des priorités de desserte ;

- la définition par l'entreprise d'un plan de transport adapté correspondant aux priorités définies par l'autorité organisatrice ;

- enfin, la définition par l'entreprise d'un plan d'information des usagers.

Elle s'est réjouie de l'équilibre atteint par le texte entre, d'une part, la continuité du service public et la nécessité d'informer les usagers, d'autre part, la préservation du droit de grève et la prise en compte des contraintes d'organisation de l'entreprise de transport. Il lui a paru toutefois utile d'améliorer le dispositif par une nouvelle rédaction de l'article 4.

L'article 5 a pour objet de limiter l'impact des perturbations pour les usagers, en mettant en place un accord de prévisibilité permettant à l'entreprise de se réorganiser, en fonction de l'importance de la grève, et d'informer les usagers vingt-quatre heures à l'avance. Elle a indiqué qu'afin de rendre effectif cet accord, il était prévu une déclaration d'intention de grève des salariés qui veulent participer au mouvement collectif, quarante-huit heures avant le début de la grève.

Elle a ensuite souligné l'intérêt de l'article 7 qui consacre un droit de l'usager à disposer, au plus tard vingt-quatre heures avant le début de la perturbation prévisible du trafic, d'une information précise et fiable sur le service assuré.

S'agissant de la consultation des salariés, organisée au-delà de huit jours de grève, elle a précisé que cette mesure, traduction d'un engagement pris par le Président de la République pendant la campagne électorale, n'interdisait à aucun salarié de poursuivre le mouvement, la grève étant un droit individuel, mais pourrait néanmoins avoir un effet psychologique s'il apparaissait que la grève est soutenue par une minorité ou, a contrario, une majorité des salariés de l'entreprise.

Concernant l'indemnisation des usagers en cas de non-respect par les entreprises des plans de transport adapté et d'information des usagers, prévue à l'article 8 du projet de loi, elle a exprimé le souhait d'en modifier la rédaction pour rendre le principe plus effectif.

L'article 9, enfin, rappelle le principe selon lequel les périodes de grève ne sont pas rémunérées.

Tout en souscrivant pleinement à l'économie générale du projet de loi, Mme Catherine Procaccia, rapporteur, a souhaité le clarifier et le renforcer pour mettre l'usager au coeur du dispositif.

Elle a tout d'abord jugé nécessaire d'apporter une réponse à l'ensemble des perturbations prévisibles du trafic, en incluant notamment, outre la grève qui n'en constitue qu'un cas particulier, les incidents techniques et les aléas climatiques qui ont fait l'objet d'une alerte météorologique.

Elle a par ailleurs souhaité simplifier et préciser la notion de dessertes prioritaires en prévoyant que l'autorité organisatrice pourrait déterminer des niveaux de service en fonction de l'importance de la perturbation rencontrée.

Après avoir indiqué que les transports scolaires devaient faire partie, selon elle, des droits et libertés auxquels il convient de ne pas porter une atteinte disproportionnée, elle a jugé nécessaire d'aller plus loin dans la définition du service minimal, en prévoyant qu'un service garanti soit instauré les jours d'examens nationaux (brevet et baccalauréat), cette limitation au droit au grève, limitée à vingt ou vingt-cinq jours par an, lui semblant conforme aux exigences constitutionnelles de protection de l'intérêt général.

a également proposé que le préfet soit informé de l'avancement du processus de définition des dessertes prioritaires et des niveaux de service et qu'il puisse se substituer à l'autorité organisatrice de transport en cas de carence, non seulement pour arrêter les priorités de desserte, mais aussi pour approuver les plans proposés par l'entreprise.

A l'article 7, elle a proposé que, parallèlement aux usagers, l'autorité organisatrice soit immédiatement informée par l'entreprise de transport en cas de perturbation ou de risque de perturbation.

Enfin, s'agissant de l'indemnisation des usagers prévue à l'article 8, elle a proposé d'organiser directement dans la loi ses modalités sans renvoyer à un décret en Conseil d'Etat, de rendre obligatoire cette indemnisation en cas d'inexécution par l'entreprise de ses obligations, sauf en cas de force majeure, et d'arrêter ses modalités pratiques dans le cadre d'une convention passée entre l'autorité organisatrice de transport et l'entreprise de transport pour tenir compte, en particulier, des différentes catégories d'usagers et des tarifs qui leur sont applicables. En outre, elle a souhaité préciser que les pénalités financières parfois perçues par les autorités organisatrices de transport pourront contribuer au financement de cette indemnisation.

Sur le volet « dialogue social » du projet de loi, elle a formulé plusieurs propositions ayant pour objet :

- de préciser que la négociation préalable au dépôt d'un préavis de grève doit se tenir avec les seules organisations syndicales qui envisagent de déposer ce préavis et non avec l'ensemble des organisations syndicales, ce qui, dans certaines entreprises, pourrait être très lourd à mettre en oeuvre ;

- de rendre obligatoire la conclusion d'accords de branche avant le 1er janvier 2008 ;

- de contraindre la RATP et la SNCF à conclure avant le 1er janvier 2009 un accord-cadre conforme aux principes du projet de loi.

En outre, Mme Catherine Procaccia, rapporteur, a proposé que les parties pourraient désigner un médiateur chargé de rechercher une solution amiable au conflit et de décider éventuellement d'organiser la consultation prévue à l'article 6, au même titre que le chef d'entreprise ou qu'un syndicat représentatif.

Elle a également souhaité exclure expressément la pratique qui consiste à prévoir le paiement de tout ou partie des jours de grève dans un accord de fin de conflit et estimé indispensable de prévoir une évaluation de l'application de la loi, dès l'année prochaine, afin, en particulier, d'éclairer le Parlement sur l'opportunité d'étendre le principe d'un service minimum à d'autres types de services publics.

En conclusion, Mme Catherine Procaccia, rapporteur, a appelé de ses voeux une application stricte et intégrale de la loi dès son adoption, regrettant la persistance des grèves dites « émotionnelles » ou des piquets de grève qui paralysent les transports publics, pratiques pourtant illégales.

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