Moins d'un an après la remise du rapport de ma mission sur la régulation des marchés de quotas de CO2, je me félicite des mesures prises par la France dans le cadre de la loi n° 2010-1249 du 22 octobre 2010 de régulation bancaire et financière mais je ne peux que déplorer la lenteur de l'échelon communautaire, alors même que les premières alertes remontent déjà à un certain temps.
En effet, la déstabilisation du marché du carbone est préoccupante et il est absolument nécessaire de rétablir la confiance afin de préserver ce marché. Car, sur le fond, j'estime, moi aussi, que ce système de « cap and trade », dans lequel la puissance publique fixe un plafond d'émissions à atteindre de manière impérative matérialisé par des unités échangeables entre les acteurs du marché, est très intelligent et pourrait d'ailleurs, à l'avenir, être adapté à d'autres domaines de l'action politique. Certains ont eu l'illusion de penser que nous pourrions « laisser faire la nature » sur un marché aussi innovant mais, le temps passant, la nécessité de l'organiser s'impose désormais à tous.
A cette fin, il me paraît indispensable :
- d'adopter une définition unique des quotas au niveau européen. J'estime qu'une définition sui generis serait préférable, les quotas étant une catégorie nouvelle, des « autorisations administratives négociables » ;
- d'encadrer l'accès au marché, comme l'a souligné Pierre Ducret ;
- de renforcer l'infrastructure dépositaire des quotas (car c'est de là qu'est venue la crise) ainsi que la responsabilité des teneurs de registres ;
- de mieux organiser le marché lui-même, en lui appliquant certaines règles pertinentes régissant déjà les marchés financiers (comme, par exemple, les manipulations de cours) et en créant des règles ad hoc en réponse à la problématique très particulière de l'accès à l'information ;
- de mettre en place une surveillance idoine du marché. La France a fait sa part dans le cadre de la loi du 22 octobre 2010 précitée, en organisant une collaboration entre l'Autorité des marchés financiers (AMF) et la Commission de régulation de l'énergie (CRE). Ce processus devrait, à l'évidence, être rapidement transposé au niveau européen, à l'approche de la mise en place des enchères sur les quotas, à compter de 2013 ;
En conclusion, nous devons tout faire pour sortir de la crise actuelle, certes marginale en termes de quantité de quotas volés, mais destructrice pour la confiance. Les techniques existent pour améliorer les choses à l'avenir, par exemple des mécanismes d'assurance, mais il faudra, au préalable, solder le passé.