Intervention de Rachid Benyakhlef

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 9 mars 2011 : 1ère réunion
Marché des quotas d'émission de gaz à effet de serre — Table ronde

Rachid Benyakhlef, directeur général de Lafarge Ciments :

Je voudrais commencer par vous présenter rapidement mon groupe. En France, Lafarge Ciments représente dix-neuf sites industriels, dont dix cimenteries relevant du système ETS. Dès le début des années 2000, Lafarge Ciments s'est engagé, au niveau mondial et volontairement, dans une démarche de réduction de ses émissions à la tonne de ciment. Nous avons atteint l'objectif que nous nous étions fixé, en réduisant de 20 % nos émissions de gaz à effet de serre sur la période 1990-2009.

En ce qui concerne la finalité de ce marché et la compétitivité des entreprises, je voudrais maintenant vous fournir quelques éléments de contexte, qui vous aideront à mieux comprendre la situation de notre société. Depuis fin 2007, nous avons enregistré une chute de nos volumes de l'ordre de 25 %. De plus, notre environnement concurrentiel est en pleine évolution, en raison de l'augmentation des importations terrestres européennes, avec des surcapacités aux frontières, et de l'installation de projets de station de broyage sur les ports. Ces nouvelles installations ont pour vocation d'importer des matériaux produits hors de l'Union européenne, qui ne sont pas, par conséquent, soumis aux contraintes du SCEQE. En outre, les parts du marché mondial du ciment sont de 10 % pour l'Europe, 10 % pour l'Amérique du Nord et 80 % pour les pays émergents, dont 50 % pour la seule Chine. Ces derniers exercent une forte pression sur notre activité. Enfin, le marché français était de 25 millions de tonnes en 2007. Il est aujourd'hui de 18 millions de tonnes, alors même que les capacités potentielles totales de production (usines françaises et stations de broyage des importateurs) s'élèvent à 30 millions de tonnes.

Le SCEQE, au cours de ses deux premières phases (2005-2007 puis 2008-2012) a atteint l'un de ses principaux objectifs : donner une valeur au carbone. Lafarge a intégré cette valeur du carbone tant dans ses choix d'investissement que dans le management de ses activités. Ces choix et investissements portent sur les vingt prochaines années : nous continuons donc à nous préparer pour les phases 2013-2020 et post-2020.

Une cimenterie requiert des investissements lourds, de l'ordre de 300 millions d'euros, avec un horizon d'amortissement d'une trentaine d'années environ. Il apparaît souhaitable, pour ce faire, de disposer d'une visibilité et d'une stabilité appréciables dans la réglementation relative à nos activités, afin d'investir plus sereinement dans des outils de production plus modernes et plus efficaces énergétiquement.

Il est donc fondamental de créer les conditions d'un environnement favorable aux investissements de performance, seuls à même de nous permettre de rester dans la course mondiale. Le SCEQE va précisément dans ce sens, avec cependant deux échéances proches qui créent de nouvelles incertitudes. D'une part, la liste des secteurs soumis au risque de fuite carbone sera revue en 2014. Quel sera le statut de l'industrie cimentière en Europe à partir de 2015 ? L'impact de cette révision sur le niveau d'allocations gratuites pourrait être relativement important. Elle pourrait même totalement changer la donne économique pour notre secteur.

D'autre part, pourrons-nous mettre en place le mécanisme d'inclusion carbone (MIC), qui soumet les importations aux mêmes obligations environnementales que les productions domestiques ? Nous le souhaitons, et sommes heureux que la Commission européenne considère cette option dans sa communication du 26 mai 2010.

Pour conclure, je voudrais rappeler que Lafarge est fortement engagé dans la problématique du développement durable, qui a apporté une dimension nouvelle à nos performances. Nous sommes favorables à l'approche du marché carbone et du SCEQE, qui visent à réduire les volumes d'émissions de CO2. Néanmoins, nous estimons que cette approche aura davantage de succès si elle favorise plus significativement l'investissement et la croissance.

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