a indiqué que la commission examine, pour la première fois, un projet de loi de programmation des finances publiques. Cette nouvelle catégorie de lois a été instituée par la révision constitutionnelle du 23 juillet dernier qui a inséré un nouvel alinéa à l'article 34 de la Constitution afin de préciser que les orientations pluriannuelles des finances publiques sont définies par des lois de programmation, celles-ci s'inscrivant dans l'objectif d'équilibre des comptes des administrations publiques. Le Parlement a donc désormais la possibilité d'approuver la stratégie du Gouvernement en matière de finances publiques, ce qui relevait jusqu'à présent de la seule sphère exécutive.
Cette programmation permet une approche globale des comptes publics en intégrant les finances de l'Etat, celles de la sécurité sociale et celles des collectivités territoriales dans un même ensemble et en les inscrivant dans une perspective pluriannuelle. Cette nouvelle approche est donc plus complète que celle de l'évolution des prélèvements obligatoires utilisée jusque-là et que celle applicable en matière sociale depuis le vote de la loi organique du 2 août 2005. En effet, le législateur doit se prononcer sur une projection pluriannuelle quand il approuve l'annexe B du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Or, de telles projections n'existent pas pour le budget de l'Etat.
L'annexe B a fait l'objet de nombreuses critiques par la commission même si, d'année en année, son contenu s'est amélioré. Au total, malgré ses limites, notamment en termes de fiabilité des projections, elle a le mérite incontestable de proposer une trajectoire et de faire apparaître des tendances qui montrent avec beaucoup de clarté les difficultés du chemin de retour à l'équilibre.
Le projet de loi de programmation des finances publiques est donc un outil plus cohérent, destiné à éclairer de façon lisible et transparente le débat public sur la totalité de nos finances, c'est-à-dire sur un ensemble qui représente la moitié de la richesse nationale. Il n'est toutefois qu'une programmation, ce qui préserve entièrement les prérogatives du législateur financier et du législateur financier social ainsi que les domaines respectifs des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale.
Ce premier projet de loi intervient dans un contexte économique tout à fait exceptionnel en raison de la crise financière et de ses conséquences pour l'économie réelle. Ces éléments d'incertitude remettent certes en cause, pour partie, la pertinence de la programmation proposée mais pas complètement comme le montre l'analyse du texte.
a alors présenté les principaux éléments du projet de loi. Celui-ci définit une trajectoire en dépenses et en recettes vers un retour à l'équilibre à l'horizon 2012. Conformément au nouvel objectif constitutionnel d'équilibre des comptes des administrations publiques, il propose une stratégie de redressement qui, d'une part, s'appuie sur la définition de règles de comportement, d'autre part, repose sur deux axes : une maîtrise ambitieuse des dépenses et la sécurisation des recettes.
Le projet de loi comporte quatre chapitres relatifs, respectivement, aux objectifs généraux des finances publiques et à l'évolution des soldes par catégorie d'administrations pour la période 2009-2012, à la maîtrise des dépenses de l'Etat et de la sécurité sociale, à la maîtrise des recettes de l'Etat et de la sécurité sociale, enfin, au renforcement de l'information du Parlement et au suivi de la mise en oeuvre de la programmation. Le projet de loi est en outre accompagné d'un rapport, qu'il est proposé d'approuver à l'article 3. Ce rapport précise le contexte macroéconomique ainsi que les objectifs poursuivis et les conditions de leur réalisation pour les finances de l'Etat, celles de la sécurité sociale et celles des collectivités locales.
En ce qui concerne les finances sociales, les principales hypothèses macroéconomiques retenues, identiques à celles qui figurent dans l'annexe B du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, sont : une croissance ralentie à court terme avec une prévision de 1 % en 2009 puis une reprise avec un taux moyen de croissance de 2,5 % par an à partir de 2010 ; une augmentation de la masse salariale, qui détermine les trois quarts des recettes de la sécurité sociale, estimée à 3,5 % en 2009 et à 4,6 % par an les trois années suivantes ; une inflation hors tabac de 2 % en 2009 puis de 1,75 % les années suivantes.
Dans ce cadre, l'objectif de retour à l'équilibre du régime général en 2012 repose sur trois conditions. La première consiste à disposer d'une base financière assainie grâce à la mise en oeuvre de trois préalables : le transfert de la dette sociale à la caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades), le règlement de la situation déficitaire du fonds de financement de la protection sociale (Ffipsa) et la clarification des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale. Ces trois questions sont traitées dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, mais imparfaitement car la question du déficit de la branche vieillesse du Ffipsa n'y est pas traitée, de même que celle de la dette reconstituée de l'Etat envers la sécurité sociale, soit 3,5 milliards d'euros.
La deuxième condition à respecter pour parvenir au retour à l'équilibre est la maîtrise de la dépense. Cet objectif n'est chiffré que pour la branche maladie, avec un taux d'évolution annuelle de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam), fixé par l'article 7 du projet de loi à 3,3 % pour l'ensemble de la période. Ce montant correspond à une croissance des dépenses de maladie inférieure à celle du Pib, ce qui est ambitieux mais pas inatteignable comme le montrent les résultats de 2007 et 2008. En effet, l'année 2008 devrait finir en affichant une progression de l'Ondam de l'ordre de 3,3 %. Cette projection exige de trouver chaque année 2 milliards d'euros d'économies afin de contenir la progression annuelle des dépenses de santé à 5 milliards. Pour parvenir au respect de cette norme, le rapport annexé au projet de loi fait état de la nécessité de mobiliser toutes les marges d'efficience en poursuivant les efforts sur la maîtrise des dépenses de soins de ville, en réformant l'hôpital et en renforçant la gestion des risques. En ce qui concerne les dépenses de la branche vieillesse, tout dépendra des progrès que l'on pourra constater en matière d'emploi des seniors et des décisions qui seront prises lors du point d'étape de 2010. De vraies incertitudes demeurent néanmoins dans ce domaine car il reste très difficile de bien anticiper les comportements des assurés. Les branches famille et AT-MP afficheront de légers excédents.
La troisième condition du retour à l'équilibre tient à la sécurisation des recettes qui passe par deux éléments : le retour de la croissance et la préservation des recettes actuelles. Le retour de la croissance, de même que l'ampleur de la récession des prochains mois, sont évidemment très difficiles à prévoir : ni les instituts économiques, ni le Gouvernement ne disposent encore des éléments permettant d'éclairer le Parlement sur ce point. Néanmoins il faut savoir qu'un point de masse salariale en moins représente entre 1,8 et 2 milliards d'euros de ressources en moins pour la sécurité sociale. Cela étant, on peut aussi travailler à préserver les recettes existantes en veillant à ne pas multiplier les exemptions d'assiettes ou les exonérations de charges et de contributions sociales. La commission des affaires sociales s'intéresse à cette question des niches sociales depuis plusieurs années. Elle a ainsi successivement proposé la taxation des stock-options, l'instauration d'une « flat-tax » sur les niches sociales et l'institution de règles pour la création d'exonérations de charges nouvelles par les textes de loi ordinaires. Singulièrement, ces initiatives ont à chaque fois été repoussées dans un premier temps, avant d'être reprises l'année suivante soit par le Gouvernement, soit par l'Assemblée nationale, et d'être finalement adoptées.
a alors indiqué qu'il fera de nouvelles propositions dans le domaine des recettes de la sécurité sociale à l'occasion de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009. Il est en effet indispensable de s'intéresser aux recettes si l'on veut assurer l'équilibre des finances sociales et affronter le défi du vieillissement de la population. Aussi, on ne peut que se réjouir des règles de bonne gouvernance et d'encadrement des dépenses fiscales et des niches sociales prévues aux articles 9 à 11 du projet de loi de programmation. L'article 9 fixe le principe de l'interdiction de l'adoption de mesures nouvelles ayant pour objet une diminution des ressources affectées au budget de l'Etat ou à la sécurité sociale. L'article 10 pose une règle de gage : toute création ou extension d'une niche fiscale ou sociale devra être compensée par la suppression ou la diminution d'une autre de ces niches pour un montant équivalent. L'article 11 prévoit que chaque année, avant le 15 octobre, le Gouvernement présente au Parlement un objectif de coût annuel des niches sociales ainsi qu'un bilan des dispositifs créés, modifiés ou supprimés au cours de l'année qui précède. Par ailleurs, toute nouvelle mesure devra faire l'objet d'une évaluation dans les trois années suivant son entrée en vigueur. Enfin, l'ensemble des dispositifs actuels devra faire l'objet d'une évaluation en termes d'efficacité et de coût, avant le 30 juin 2011. Ces trois articles répondent parfaitement aux attentes de la commission des affaires sociales et justifient, à eux seuls, son avis favorable à l'adoption du projet de loi.
En effet, pour le reste, le texte n'est pas encore parfait. En particulier, il faut souligner la différence entre le degré de précision et de détail qui entoure les prévisions sur le budget de l'Etat, soit plus de quarante pages du rapport, et celui apporté aux finances de la sécurité sociale, traitées en une quinzaine de pages seulement. Sans doute la brièveté du délai entre l'adoption de la révision constitutionnelle le 23 juillet et le dépôt du texte le 26 septembre peut-elle expliquer ces « péchés de jeunesse » ?
En conclusion, M. Alain Vasselle, rapporteur pour avis, a suggéré de donner un avis favorable à l'adoption du projet de loi de programmation, sous réserve de demander au Gouvernement qu'il s'engage à mieux étayer les projections relatives aux finances sociales dans la prochaine loi de programmation, à réfléchir à l'utilité de fixer un objectif de progression des dépenses de vieillesse et à redéposer un projet de loi de programmation si les hypothèses macroéconomiques sur lesquelles le texte actuel est construit devaient être sensiblement corrigées.