En réponse, Mme Rachida Dati, garde des Sceaux, ministre de la justice, a indiqué que :
- l'impact du présent projet de loi sur la population carcérale sera minime, sous réserve que les peines alternatives à l'emprisonnement se développent ; la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance a permis un premier pas en ce sens en étendant l'éventail des mesures de ce type applicables aux mineurs ; ces dispositions entreront en vigueur rapidement grâce à la publication prochaine des décrets d'application ;
- les établissements pénitentiaires comporteront 60.000 places d'ici à 2012 ; en outre, un projet de loi pénitentiaire, qui sera présenté au Parlement dès l'automne prochain, permettra de ne plus faire l'impasse sur l'impératif d'insertion qui doit accompagner toute mesure de sanction et qui lui donne tout son sens. Un projet est actuellement en cours pour développer la formation en alternance en milieu carcéral. Les mineurs âgés de 16 à 18 ans doivent également davantage réfléchir à leur insertion professionnelle : actuellement, un grand nombre d'entre eux n'ont aucune activité en prison ;
- la présente réforme ne remet pas en cause les possibilités d'aménagement de peine, qui relèvent de la compétence du juge de l'application des peines ;
- une diffusion plus large des statistiques en matière de récidive est souhaitable, car elle est de nature à favoriser une plus grande transparence de la politique du Gouvernement dans le domaine de la lutte contre la délinquance. Elle permettra également de mieux appréhender le fonctionnement de la justice en France ;
- les dispositions du projet de loi concernant l'ordonnance de 1945 sur les mineurs n'ont fait l'objet d'aucune réserve de la part du Conseil d'Etat ;
- en ce qui concerne l'exécution des peines, l'extension des mesures d'aménagement de peine et des mesures alternatives à l'incarcération doit être poursuivie ;
- la matière pénale et la procédure pénale ont donné lieu à une incontestable inflation législative ces dernières années. Afin de clarifier l'état du droit, le président de la République souhaite créer une commission chargée de revoir la cohérence d'ensemble du droit en vigueur dans ces domaines ;
- le choix de déposer à l'automne le projet de loi pénitentiaire se justifie par le double souci de lui conférer une portée très ambitieuse et de recueillir le plus large consensus sur les orientations susceptibles d'être retenues, notamment s'agissant des conditions de détention et d'insertion. Une telle réforme ne peut être mise en oeuvre sans qu'une large consultation de tous les acteurs concernés ne soit menée au préalable. A l'occasion de l'examen de cette réforme, une attention particulière sera portée au problème des sorties de prison « sèches » -non accompagnées d'un projet d'insertion ;
- la loi du 12 décembre 2005 relative au traitement de la récidive des infractions pénales a élargi les conditions dans lesquelles la récidive peut être constatée pour certains crimes et délits violents. En outre, cette loi laisse une large marge d'appréciation aux magistrats. Le présent projet de loi se borne à prendre acte de la jurisprudence en ce qui concerne les crimes, les peines effectivement prononcées actuellement étant rarement inférieures à celles qui figurent dans la réforme présentée au Parlement ;
- le quantum des peines minimales des délits visés dans le projet de loi reste inférieur à la moitié du quantum de la peine encourue hors récidive, ce qui garantit la conformité de l'échelle des peines propres au principe de proportionnalité ;
- l'avancée principale du projet de loi sera de permettre au Gouvernement de définir une politique pénale claire et ainsi d'encourager l'unification de la jurisprudence en matière de récidive. Toutefois, à la différence du système américain, cette réforme n'a pas pour objectif d'ériger les magistrats en « distributeurs automatiques de peines ». Une telle évolution apparaît contraire à la culture juridique française ;
- les problèmes de santé qui touchent de nombreux détenus méritent qu'une réflexion soit engagée pour trouver les moyens adaptés de développer les structures hospitalières en prison. L'inspection des services pénitentiaires devrait rendre prochainement des propositions en vue d'améliorer la médecine pénitentiaire. La question se pose de savoir si l'hôpital doit entrer en prison ou s'il incombe à l'hôpital d'accueillir la prison. Cette préoccupation concerne également les détenus mineurs. Sur les 29 centres éducatifs fermés qui seront créés avant la fin de cette année, 5 incluront une structure pédopsychiatrique et s'appuieront sur des professionnels de la santé (médecins, psychiatres). Il n'entre pas dans la vocation des éducateurs de traiter les problèmes de santé des mineurs ;
- l'application des peines minimales en dehors du cas des infractions commises en état de récidive n'est pas à l'ordre du jour ;
- les dérogations prévues par le projet de loi en faveur d'une adaptation des peines minimales d'emprisonnement préservent la liberté d'appréciation souveraine des magistrats, sous réserve d'un encadrement défini très strictement ; elles se justifient par le souci de répondre à l'exigence constitutionnelle de l'individualisation des peines. Toutefois, ces exceptions ne remettent pas en cause la philosophie de la réforme tendant à réprimer plus sévèrement, et de manière plus lisible, les infractions commises en état de récidive ; la présente réforme, loin d'être inutile, apporte au contraire une réponse plus claire et plus ferme à la récidive, conformément aux préoccupations des Français. En pratique, une restriction des possibilités d'adaptation de la peine par un resserrement des critères permettant de déroger à l'application de peines minimales en cas de récidive ne garantira pas une plus grande efficacité du nouveau dispositif, l'interprétation des critères autorisant les dérogations relevant en dernier lieu de la libre appréciation des magistrats.