Il s'agit de cas spécifiques. Tous ceux qui bénéficient de l'aide juridictionnelle ne paient pas les 35 euros. Or, ceux qui ont droit à l'aide juridictionnelle sont en majorité ceux qui ont recours au juge en matière de contentieux familial. Il faut dire les choses telles qu'elles sont !
Il est vrai qu'on a créé un droit de 35 euros pour financer la garde à vue, dont on a estimé qu'elle coûterait 100 millions d'euros. Nous allons faire le point. J'attends les décisions du Conseil constitutionnel dans les quinze jours, deux questions prioritaires de constitutionnalité ayant été déposées sur la garde à vue. La loi sera ainsi purgée dans un sens ou dans un autre ! Dès qu'on aura cette décision, on verra s'il faut modifier la loi ou non et l'on fera le point sur la pratique en matière de demandes d'aide juridictionnelle. Peut-être les gens font-ils moins appel aux avocats qu'on ne l'avait pensé au départ. Cela dépend des lieux géographiques. On verra alors où on en est.
Pourquoi verse-t-on la somme aux CARPA et non au budget de l'Etat, qui la reverserait directement à chaque avocat ? C'est une affaire quelque peu compliquée sur laquelle je voudrais revenir. C'est d'abord un problème de gestion de l'opération. Le savoir-faire des CARPA est éprouvé. Il fallait faire intervenir les représentants des avocats à travers le CNB et les CARPA. On a donc choisi ce système. Compte tenu de toutes les incertitudes techniques, la prudence a voulu que l'on aligne le produit de la contribution sur l'aide juridictionnelle au sens strict. C'est ainsi que l'on a choisi de ne pas verser ces sommes dans la caisse générale de l'Etat mais aux CARPA.
Vous avez demandé les raisons du retard de règlement du budget du CSM. Elles sont liées à la mise en oeuvre du logiciel budgétaire et comptable Chorus. Compte tenu de la taille minimale requise par tous les centres Chorus des services de l'Etat, on a choisi de regrouper sur un même centre l'administration centrale, la Cour de cassation et le CSM. Des retards de paiement -raisonnables- ont été constatés pour la Cour de cassation et non pour le CSM. Sur proposition du Premier président de la Cour de cassation, la Chancellerie étudie la possibilité de regrouper la Cour de cassation et le CSM sur un pôle Chorus autonome, ce qui devrait limiter les retards de paiement et apporter une grande tranquillité au Garde des Sceaux ! Je suis donc très favorable à ce qu'on les réunisse et qu'ils soient véritablement autonomes.
Je voudrais répondre à présent à M. Lecerf, qui m'a interrogé sur l'administration pénitentiaire. Je l'ai dit souvent depuis que je suis en poste : les magistrats, en France, appliquent la loi. Ils ne sont pas laxistes : la loi est votée par le Parlement, les magistrats l'appliquent ! On peut le vérifier tous les jours et il n'y a là rien à dire.
J'ai assisté il y a trois ou quatre jours à une commission d'exécution des peines à Evry. Je puis vous garantir que les juges ne sont pas laxistes. Le travail est fait dans le détail ; tous les dossiers sont vus un par un, même s'il y en a beaucoup, du fait de la présence de Fleury-Mérogis dans le ressort du tribunal d'Evry.
Aujourd'hui, on a 56.800 places de prison et 64.500 personnes détenues. C'est donc une surpopulation carcérale forte. C'est le premier facteur qui empêche la bonne application de la loi pénitentiaire. Quand on ne sait plus où mettre les gens, qu'on les entasse dans les cellules, on ne peut pas appliquer la loi pénitentiaire dans son esprit.
Un peu plus de 80.000 condamnations ne sont pas exécutées. Le but est donc de trouver comment résoudre la question au mieux. On a tout d'abord décidé de conserver certaines prisons anciennes dont la démolition avait été envisagée. Il faudra donc faire des travaux dans les prisons que l'on a conservées. On les a conservées pour diverses raisons, très souvent, pour des questions d'aménagement du territoire fort respectables.
Cela aura quand même un certain nombre de conséquences, notamment sur les extractions. Ces prisons, souvent petites -une centaine de places maximum- sont loin des tribunaux ou des cours d'appel. Je pense notamment à Aurillac. Pour aller à Riom, il faut compter la journée...
Je voulais replacer le problème dans sa globalité. Il n'en demeure pas moins qu'il nous faut mettre en oeuvre la loi pénitentiaire. Nous progressons. J'invite la commission des lois du Sénat à envoyer des représentants dans les établissements. Plus les parlementaires iront dans les établissements pénitentiaires, mieux ce sera.
On a progressé en matière de parloirs, même si ce n'est pas partout satisfaisant -loin de là. Pour ce qui est des nouveaux établissements pénitentiaires, il n'est pas utile d'avoir le même établissement pour une personne condamnée à quelques mois de prison et pour une personne condamnée à plusieurs années. Il faut donc construire des prisons pour courtes peines ; ce sera une part importante du nouveau programme annoncé dans la loi de programmation.
Ainsi que vous l'avez noté, il faudra que l'on crée des emplois. Le nouveau programme immobilier impliquera la création de 3.000 postes de surveillants supplémentaires, qui figureront dans la loi de programmation, toutes catégories de personnels confondues.
Vous avez évoqué les conseillers d'insertion et de probation, dont on aurait le plus grand besoin avec la mise en oeuvre du bracelet électronique mais surtout pour assurer à la fois la préparation de la sortie d'un établissement pénitentiaire et le suivi des personnes libérées.
La gestion du bracelet électronique mobilise aujourd'hui 685 agents contre 110 fin 2008. 270 surveillants, 315 conseillers d'insertion et de probation et 100 personnels administratifs travaillent sur le bracelet électronique. Cet effectif devrait nous permettre d'atteindre un objectif de 12.000 bracelets électroniques en 2012. La loi de programmation prévoira également la création de conseillers pénitentiaires d'insertion et de probation.
S'agissant du transfert de la charge des escortes judiciaires et des services de police et de gendarmerie vers l'administration pénitentiaire, il est vrai que 800 ETP ne nous permettront pas de fonctionner. Nous avons donc lancé une expérimentation dans le ressort de trois cours d'appel et de deux régions administratives, la Lorraine et l'Auvergne, cette dernière connaissant une géographie très particulière. Nous allons mener une expérimentation la plus proche possible de la réalité. Les postes nouvellement créés ne sortiront de l'école d'Agen que fin mars. Jusqu'à début avril, on fera avec les moyens que l'on a : on utilisera les ERIS pour faire face.
On a en quelque sorte « déproratisé » les 800 ETP. La première intention était de les répartir entre les diverses directions interrégionales de la pénitentiaire, en fonction du nombre d'extractions. On a renoncé à cette idée. On recourt au nombre d'emplois nécessaires pour faire fonctionner le système tout en gardant les dispositions du code de procédure pénale qui n'ont pas été abrogées et qui permettent aux chefs de cours et de tribunaux de recourir aux forces de gendarmerie et de police lorsqu'il n'y a pas d'autre moyen pour exécuter le transfèrement.
Les choses se passent de manière très tendue et l'administration pénitentiaire n'arrive pas à réaliser toutes les extractions à ce jour. On a donc un accord avec le ministère de l'intérieur pour continuer à utiliser les forces de police et de gendarmerie dans le cadre d'une programmation des extractions qui se met en place peu à peu.
A partir du mois de mars, on aura une idée exacte de ce qu'il nous faut dans ces deux régions ainsi qu'en Haute-Normandie, qui va bientôt entrer dans l'expérimentation. On fera alors le point.
Quant au centre de rétention de Fresnes, comme vous le savez, il ne fonctionne pas encore. Aucun condamné n'y a été affecté par les magistrats. Faut-il supprimer les places ou non ? Aujourd'hui, on a prévu d'accueillir quelques détenus handicapés dans tous les nouveaux établissements. Pour l'instant, dix places ne sont pas utilisées dans ce centre de rétention.
Je voudrais répondre à M. Alfonsi, qui a indiqué que l'essentiel des crédits supplémentaires devrait financer la création de centres éducatifs fermés et qui a demandé à combien on pouvait évaluer le nombre de fermetures d'établissements de placement éducatif depuis 2008. L'idée de base est simple : il s'agit de donner aux magistrats toute une palette de réponses. Je dois dire que l'on parle d'un petit nombre d'établissements comme d'un petit nombre de places.
Les établissements de placement éducatif regroupent désormais des foyers d'action éducative, des centres de placement immédiat et des centres éducatifs renforcés. On en comptait 111 en 2008 ; ils sont aujourd'hui au nombre de 86, recouvrant au total 140 unités éducatives. Le nombre de places disponibles n'a pas pour autant diminué. Des structures trop petites et inadaptées ont été fermées. La capacité minimale des établissements a été portée à 12 places -ce qui n'est pas un chiffre très élevé. Les centres éducatifs fermés gérés par la PJJ sont quant à eux au nombre de dix.