Intervention de Philippe Marini

Réunion du 6 décembre 2011 à 15h00
Loi de finances pour 2012 — Vote sur l'ensemble

Photo de Philippe MariniPhilippe Marini, président de la commission des finances :

Nul ne le conteste !

Mes chers collègues, le Gouvernement avait veillé à procéder à une répartition équitable de l’effort, en imputant la majeure partie des nouvelles recettes sur les grandes entreprises et les détenteurs de patrimoine, tout en demandant une contribution aux ménages, dans des proportions acceptables.

Le budget proposé par la majorité sénatoriale fait porter la totalité de l’effort virtuel supplémentaire sur les entreprises, y compris les PME, et sur les épargnants.

Je rappellerai les principales mesures adoptées par ordre décroissant de rendement.

La mesure la plus remarquable est l’écrêtement de la déductibilité des intérêts d’emprunt par rapport au résultat fiscal d’une entreprise. Cette innovation complète en matière de fiscalité représenterait, selon les estimations du Gouvernement, un rendement potentiel supplémentaire pour l’impôt sur les sociétés de 17 milliards d’euros, alors que son produit total doit être de l’ordre de 47 milliards d’euros cette année. On peut considérer qu’il s’agit là, sans doute, de l’adoption d’un amendement mal identifié.

La suppression de l’exonération des heures supplémentaires relève, quant à elle, d’une position politiquement plus argumentée : elle représenterait une recette de 4, 5 milliards d’euros, dont les deux tiers proviendraient des cotisations sociales versées par les entreprises, le tiers restant portant atteinte au pouvoir d’achat des salariés.

Par ailleurs ont été votés le rétablissement, quelques mois après sa suppression, de la première tranche de l’ISF et la suppression des allégements de droits de succession et donation, avec un seuil abaissé à 50 000 euros, deux mesures qui touchent les classes moyennes urbaines.

Enfin, je citerai le plafonnement de différents avantages fiscaux, la suppression du plafond de droits de mutation à titre gratuit applicables aux cessions de valeurs mobilières et l’alourdissement de la fiscalité des dividendes.

Au total, le rendement de l’impôt sur les sociétés est considérablement « amélioré », de plus de 20 milliards d’euros, tandis que le poids des impôts sur l’épargne et le patrimoine est aggravé de 3, 5 milliards d’euros et celui de l’impôt sur le revenu de 2, 4 milliards d’euros.

Nous verrons lors de l’examen du collectif budgétaire si les votes de la majorité sénatoriale s’ajoutent, en totalité ou partiellement, aux efforts déjà demandés par le Gouvernement dans le cadre des deux plans Fillon.

Retenons cependant que les recettes fiscales nettes créées par le Sénat représentent 1, 3 % du PIB. Et même si, dans le collectif budgétaire, la majorité rejetait certaines recettes supplémentaires proposées par le Gouvernement, l’excédent de prélèvements résultant de ses votes pourrait dépasser un point de PIB, ce qui est une augmentation considérable de la fiscalité.

Est-ce vraiment le signal de confiance dont notre économie a besoin ? L’intérêt national ne justifierait-il pas d’autres comportements, en particulier celui d’accepter le débat sur l’insertion dans la Constitution d’un mécanisme de « frein à la dette », autrement dit une règle d’or ?

Peut-être est-ce sur ce terrain, mesdames et messieurs de la majorité sénatoriale, que vous pourriez répondre à l’appel à la cohésion nationale et à l’intérêt général que nous vous lançons ? Un tel comportement responsable serait à l’honneur de notre pays et n’aliénerait en rien la liberté du futur gouvernement quel qu’il soit.

Bref, j’espère que, dans les difficultés économiques, financières et monétaires actuelles, nous pourrons faire en sorte que notre pays montre à l’ensemble de ses partenaires sa solidité, sa cohésion et son union, au service d’un retour progressif à l’équilibre de nos finances publiques. Tel est le vœu que je forme pour 2012 !

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