Mes chers collègues, je me réjouis que nous ayons pu démontrer à nos concitoyens que la politique budgétaire mise en œuvre depuis plus de quatre ans par le Gouvernement n’est pas une fatalité, que la rigueur ne doit pas s’abattre uniquement sur les plus démunis et, enfin, que l’élaboration d’une politique différente peut être à la source d’une véritable justice fiscale, même en période de crise.
Madame le ministre, le projet de loi de finances que vous nous avez présenté porte la marque de l’insincérité. Quelques jours seulement après la mise sous surveillance de la notation française par l’agence Moody’s – mais, depuis, il y a eu pire ! –, le Président de la République a annoncé la révision à la baisse de la prévision de croissance, ramenée de 1, 75 % à 1 %. Certes, mieux vaut tard que jamais, mais cette volte-face est tout de même symptomatique des problèmes que pose la politique actuellement menée.
En premier lieu, l’emprise des marchés financiers et des agences de notation sur la gouvernance économique française est patente. Mes chers collègues, à mon grand regret, je crois pouvoir affirmer que le capitaine du navire a malheureusement quitté Bercy !
En second lieu, ce projet de loi de finances a été élaboré avec la plus grande imprévoyance. Jamais un tel écart n’avait été constaté entre l’hypothèse de croissance retenue par le Gouvernement et celle qui est établie par les organismes internationaux. La croissance réelle étant toujours, nous le savons, inférieure aux espérances, ce projet de loi est d’ores et déjà obsolète.
De fait, vous nous donnerez vraisemblablement rendez-vous dans quelques mois pour discuter d’un nouveau projet de loi de finances rectificative. La prudence électorale d’une telle démarche, à la veille de l’élection présidentielle, ne trompe personne !
En tout cas, les semaines à venir revêtiront une importance capitale pour les pays de la zone euro, confrontés à la crise que nous connaissons. Pourtant, madame le ministre, vous ne parvenez, dans ce projet de loi de finances, ni à réduire le gouffre de la dette ni à créer le terreau favorable à une relance économique pourtant indispensable.
En matière de recettes, l’empilement de « mesurettes » sans cohérence entre elles ne peut constituer la politique fiscale d’envergure dont la France a besoin.
Mes chers collègues, je tiens enfin à souligner une fois encore la qualité du travail de notre assemblée, en particulier de sa commission des finances. Il a permis d’introduire une indispensable dose d’équité et de justice fiscale dans ce projet de loi de finances, qui en était dépourvu. En créant notamment une nouvelle tranche de 45 % applicable aux revenus supérieurs à 100 000 euros, nous renforçons la progressivité de l’impôt sur le revenu, progressivité que les radicaux de gauche ont toujours appelée de leurs vœux.
Je me félicite également de l’abrogation immédiate de plusieurs mesures emblématiques de votre politique, madame le ministre, telles que la défiscalisation des heures supplémentaires, le bouclier fiscal ou bien encore l’allégement de l’impôt de solidarité sur la fortune.
Les coupes sévères que vous prétendez opérer dans la seconde partie de ce projet de loi de finances, relative aux recettes, auront indubitablement des conséquences néfastes tant sur l’activité économique de notre pays que sur la cohésion sociale. Je pense notamment au sort réservé aux collectivités territoriales.
Alors qu’elles représentent 75 % de l’investissement public et qu’elles jouent un rôle central dans l’action sociale, les collectivités territoriales souffrent aujourd’hui, en particulier, des effets de la disparition de la taxe professionnelle. Nombre d’entre elles sont dans l’incapacité d’honorer l’ensemble de leurs investissements prévus pour l’année 2011.
Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, nous ne sortirons pas de la plus grave crise économique que nous ayons connue sans une volonté résolue d’aller vers plus d’Europe. Au risque de vous étonner, mes chers collègues, je dois dire que les déclarations de la Chancelière allemande sur la création d’une union budgétaire et fiscale européenne et celles de la Commission européenne sur l’émission d’eurobonds me semblent encourageantes. Elles démontrent qu’est venu le temps de l’Europe fédérale que, depuis bien des années, le parti radical de gauche appelle de ses vœux.
Nous sommes toujours en attente de la grande et ambitieuse réforme de notre système d’imposition. Néanmoins, comme ce projet de loi de finances en constitue indéniablement la première étape, l’ensemble des sénateurs radicaux de gauche ainsi que la grande majorité des membres du groupe RDSE l’approuveront.