Intervention de Guillaume Duval

Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques — Réunion du 24 novembre 2011 : 1ère réunion
Energies alternatives : gestion de l'intermittence et maturité des technologies

Guillaume Duval, président d'ES-Géothermie :

ES-Géothermie est une filiale d'Electricité de Strasbourg, elle-même filiale d'EDF. Il existe une anomalie thermique en Alsace : le gradient naturel est généralement de 3 degrés pour 100 mètres, mais dans le bassin d'effondrement autour de la plaine du Rhin, on s'est aperçu, à l'occasion de forages pétroliers au milieu du siècle dernier, que le gradient atteignait 10 degrés à l'hectomètre, sur les premiers hectomètres. Sur le site de Soultz-sous-Forêts, à quelques kilomètres de la frontière, au nord de l'Allemagne, cinq puits ont été forés ; il s'agissait à l'origine d'un projet de démonstrateur, non de centrale industrielle. C'était un laboratoire, un site de tests à l'échelle européenne. Ensuite, à partir de 2001, de nombreux industriels, notamment EDF et Electricité de Strasbourg, se sont engagés afin de voir quel est le potentiel de cette énergie. A 200 degrés, il est possible de produire de l'électricité, via la circulation de l'eau dans les failles, qui constituent des circuits de convexion. Cette géothermie est non conventionnelle, en ce sens que l'on exploite les failles existantes, nettoyées pour rendre la circulation plus efficace. En 2008 a ainsi été ouverte la première centrale géothermique, avec un cycle de Rankine, qui produit aujourd'hui 1,5 MW. Le tarif de rachat de 20 centimes par kW existe depuis le 23 juillet 2010. La centrale est raccordée au réseau depuis le 1er janvier 2011 mais à l'heure actuelle, la chaleur résiduelle n'est pas utilisée.

Lieu de recherche, de test des différentes technologies, Soultz offre une vitrine internationale. Nombre d'articles ont été publiés dans les revues scientifiques. On expérimente par exemple l'EGS, système géothermal amélioré : dans les failles, les sédiments se collent aux parois et les obstruent, mais une stimulation hydraulique ou chimique améliore la circulation de l'eau chaude. Il n'y a plus besoin de forer à 5 000 mètres, les économies sont substantielles. Les moyens de pompage ont été améliorés : ils sont aujourd'hui les mêmes que ceux utilisés par l'industrie pétrolière. On sait aussi désormais que le potentiel par centrale, en métropole, est limité : dans les dix à vingt ans, ce sont des puissances de 3 MW électriques nets qui seraient raccordées au réseau. L'avantage est que l'on a un productible tout au long de l'année, sans besoin de stockage. Des projets sont envisagés pour fiabiliser les techniques de forage et exploiter industriellement la chaleur résiduelle.

Quel est le potentiel de la géothermie ? En métropole, l'Alsace est la zone principale et EDF s'y est engagée avec Electricité de Strasbourg afin d'exploiter la chaleur géothermique. Le potentiel de production est limité, un puits de forage et un puits d'injection (les deux sont nécessaires pour chaque centrale) produisent 30 MW thermiques, soit 3 MW électriques nets. D'ici 2025 en Alsace, on pourrait construire une vingtaine de centrales, un peu plus à horizon 2050. Les autres régions françaises envisageables sont la Limagne, dans le Massif central, ainsi que le Bassin rhodanien. Dans les DOM, on a mentionné Bouillante. La Dominique possède un sous-sol volcanique avec une eau beaucoup plus chaude à une profondeur bien moindre.

En métropole, la géothermie est surtout adaptée pour la production de chaleur, comme cela se fait en Ile-de-France depuis longtemps. Dans certaines limites, la production d'électricité est possible, de même que certains procédés industriels, tels que le séchage des algues. Mais le potentiel réside surtout dans les réseaux de chaleur, la valorisation de la chaleur résiduelle, la cogénération. Le savoir-faire développé par les groupes français est exportable, là où les conditions géothermiques s'y prêtent : Hongrie, Turquie, Kenya, Indonésie. Les autorités locales sont demandeuses.

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