Intervention de Jean-Louis Carrère

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 14 décembre 2011 : 1ère réunion
Accord de coopération en matière de sécurité intérieure entre la france et le vietnam — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Jean-Louis CarrèreJean-Louis Carrère, président :

Mes chers collègues, M. Christian Poncelet, retenu dans son département par un débat budgétaire, m'a demandé de le remplacer, ce que je fais bien volontiers.

La France a conclu avec le Vietnam, et à sa demande, le 12 novembre 2009, un accord de coopération en matière de sécurité intérieure.

Les qualités spécifiques reconnues à l'expertise française dans ce domaine conduisent à ce qu'elle soit sollicitée par les pays les plus divers pour la mise en oeuvre d'une telle coopération.

Le texte de référence dans le domaine de la coopération de sécurité intérieure, établi en 2007 et servant de base au présent accord, a été adapté, sur quelques points, à la spécificité du Vietnam. Relevons que ce pays a déjà effectué ses procédures de ratification.

La demande vietnamienne résulte de la pression croissante qu'exerce la criminalité transnationale sur ce pays, en dépit des atouts que constitue, en la matière, son système de gouvernance ferme et centralisé.

L'environnement géographique du Vietnam en fait un pays de transit de nombreux produits contrefaits en provenance de Chine, ainsi que de stupéfiants « naturels » ou synthétiques. L'émergence de trafics d'êtres humains renforce les menaces sur sa situation sécuritaire, car ils sont souvent le fait de réseaux criminels déjà constitués, qui diversifient ainsi leurs activités, comme leurs revenus.

C'est dans ce contexte que le Vietnam a souhaité renforcer l'implication de la France dans le domaine de la coopération en matière de sécurité.

Malgré la nécessité de sa rapide mise en oeuvre, il faut relever que son entrée en vigueur a été différée, au Vietnam, du fait de la lenteur mise par les autorités compétentes pour accréditer les experts techniques français, qu'ils soient douaniers ou policiers.

Le ministre français de l'intérieur considère que « notre coopération technique est de bon niveau, et centrée sur nos priorités ».

Les objectifs majeurs des autorités vietnamiennes portent sur un appui en matière de lutte anti-terroriste et de maintien de l'ordre.

La France s'attache à répondre à ces demandes, mais s'est fixé quatre buts traduisant les préoccupations spécifiques de notre pays :

- la lutte contre l'immigration irrégulière d'origine vietnamienne, domaine de coopération ouvert en 2003, en coordination avec le Royaume-Uni. En effet, la pression migratoire de ressortissants vietnamiens vers les pays de l'Union européenne est croissante, la France constituant un pays de transit (4 614 interpellations en 2009, soit un triplement en deux ans) ;

- la lutte contre les contrefaçons portant atteinte à la santé publique : ce thème, objet d'une coopération ancienne, sera amplifié grâce au projet régional FSP (Fonds de solidarité prioritaire) « Mékong » ;

- la promotion de notre organisation policière et de nos techniques d'enquête avec l'attribution de bourses d'étude au profit de cadres policiers vietnamiens à l'Ecole nationale supérieure de la Police de Saint-Cyr au Mont d'Or, et la signature d'un mémorandum de coopération en 2008 entre l'INHES (Institut national des hautes études de la sécurité) et l'Institut national de la Police populaire vietnamien ;

- le renforcement du cadre juridique de notre coopération est nécessaire en raison du formalisme des autorités vietnamiennes. Si la coopération technique et le partage d'informations seront facilités par l'entrée en vigueur du présent accord, la coopération opérationnelle, tant policière que judiciaire, requiert la négociation complémentaire d'un accord d'entraide judiciaire en matière pénale.

Le ministère vietnamien de la sécurité publique (MSP) pratique une coopération internationale assez encadrée qui ne facilite, ni la coopération opérationnelle, ni les contacts personnalisés. En revanche, la stabilité de ses structures et de ses cadres permet un suivi sérieux des projets élaborés en commun, malgré une lenteur administrative liée au contrôle hiérarchique, exercé à de nombreux niveaux.

Ministère-clé dans l'organisation politique vietnamienne, la Sécurité publique oriente prioritairement sa coopération vers les pays limitrophes comme le Laos, le Cambodge et la Chine ainsi que l'Australie, mais la France occupe une place privilégiée grâce à la fréquence des contacts et des actions de coopération que permet la présence d'un Service français de Sécurité Intérieure implanté au sein de notre ambassade à Hanoi depuis 1999.

Comme la France, le Royaume-Uni, la République tchèque, le Japon, les Etats-Unis et l'Australie possèdent un attaché de sécurité intérieure au Vietnam.

Dans ce contexte, l'entrée en vigueur du présent accord, vivement souhaitée par notre partenaire, doit permettre de renforcer une coopération technique de bon niveau, et de développer une coopération opérationnelle plus importante.

Ce développement constitue, en effet, la priorité française dans sa coopération avec le ministère vietnamien de la sécurité publique, en sachant qu'elle sera limitée par le fait que le Vietnam ne présente pas de normes de protection des données individuelles équivalentes aux nôtres.

En conclusion, je vous recommande d'adopter, comme l'a déjà fait l'Assemblée nationale, cet accord, et vous propose de prévoir son examen en séance publique sous forme simplifiée.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion