Intervention de Christian Bataille

Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques — Réunion du 17 novembre 2011 : 1ère réunion
Sécurité nucléaire et avenir de la filière nucléaire

Christian Bataille, député :

Je n'ai pas vocation à répondre à M. Cochet. Je veux simplement relever un aspect sur lequel nous avons travaillé, et sur lequel je veux exprimer mon désaccord avec lui. Je veux parler de son analyse de la politique énergétique allemande. Je vous renvoie au rapport qui fait suite au déplacement que nous avions réalisé avec Marcel Deneux, voilà quelques semaines. Ce rapport montre que la situation allemande n'est en rien comparable à la nôtre. Pourquoi ? Parce que la France est sortie du charbon, alors que l'Allemagne n'est pas prête à sortir du charbon et du CO2. Plus de 40 % de sa production électrique est à base de charbon, pourcentage qui ne va pas diminuer. Plus de la moitié de cette production, de l'ordre de 22 %, est faite à partir de lignite. J'admets que les Allemands ont beaucoup progressé dans la technologie. Cela dit, le lignite reste du charbon, même s'il est désulfuré. Derrière le discours sur les renouvelables en Allemagne, je vois une supercherie autour de la sortie du nucléaire, supercherie qui consiste à maintenir cette grande ressource allemande qu'est le lignite - 350 ans de réserves au rythme d'exploitation actuelle. Les Allemands ont-ils envie de laisser tomber cette richesse ? Je ne le crois pas.

J'ajoute qu'en matière de réacteur nucléaire, Siemens a beaucoup cafouillé et a abandonné cette filière, AREVA ayant été bien meilleure que lui. Siemens se replie désormais sur la technologie de centrales à cycle combiné gaz. Nous avons du reste visité des centrales gaz très performantes. De telles centrales représentent un atout pour l'industrie allemande dans le monde. Telle est la spécialité allemande. Nous avons, nous, les centrales nucléaires, les Allemands ayant échoué en la matière.

Bref, je ne crois pas que la situation allemande soit comparable à la situation française. La France n'a plus aucune ressource énergétique naturelle. Certes, le nucléaire est peut être développé à l'excès dans ce pays. Encore faut-il ajouter que nous ne disposions pas des ressources dont l'Allemagne dispose dans son sous-sol.

Ces discussions sont tout à fait normales dans le cadre du travail parlementaire. Cela dit, notre mission n'est pas un débat parlementaire, mais la préparation d'un rapport. Il est donc logique que nous auditionnions aujourd'hui les grandes industries françaises partenaires, qui représentent une force industrielle dans ce pays. C'est donc tout à fait légitimement qu'elles ont exprimé leur point de vue, et ce, d'une manière très construite, élaborée, avec des données très précieuses, tant de la part du CEA, d'EDF que d'AREVA. Ce sont des industries qui ont un retour d'expérience, la question d'aujourd'hui étant celle de l'avenir de l'énergie nucléaire.

M. Miraucourt a parlé des investissements de remise à niveau du parc. Il y a une dizaine d'années, nous avons, dans le cadre de l'Office, rédigé, avec Claude Birraux, un rapport sur le sujet. A cette époque, la durée théorique affichée par les constructeurs était de trente ans, le rapport faisant état du palier de 40 ans. Toutes les centrales devraient atteindre sans encombre ce palier. Sur ce point, il faut admettre le rôle joué par l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN). Certes, les élus ont un point de vue à donner sur l'avenir énergétique de notre pays. Mais à mon sens, l'ASN est le tribunal décisif, qui dira si, au-delà du palier de 40 ans, certaines centrales peuvent aller jusqu'à 50 ans. Les Américains, qui ont démarré leur programme nucléaire beaucoup plus tôt que nous, nous devancent, et l'on peut observer avec intérêt la manière donc certaines de leurs centrales atteignent 50 ans d'âge.

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