J'apprécie, Madame la présidente, que vous parliez de substitution, car si les entreprises réclamaient depuis de longues années la suppression de la taxe professionnelle, elles ont obtenu... la création de deux impôts. Nous espérions une simplification...
L'impact économique de la réforme est considérable pour un certain nombre d'entreprises. Le rapport du gouvernement conclut que 60 % d'entre elles sont gagnantes - en nombre et pas en valeur absolue, je le précise, car notre tissu industriel est composé de très nombreuses TPE et PME. Une enquête interne du Medef, tous secteurs confondus, aboutit au pourcentage de 61 %. Selon le gouvernement, il y a 20 % de perdantes, 27 % selon notre étude ; 20 % de situations stables selon le gouvernement, 12 % selon nous.
Nous n'avons pas accès aux chiffres du gouvernement, je le regrette, car cela nous permettrait d'expliquer les écarts. Nos observations sont faites à partir de nos propres études. Il serait bon que les entreprises aient accès aux données publiques ... Mesdames et Messieurs les parlementaires, si vous rencontrez des problèmes pour obtenir l'information, sachez que pour nous, c'est pire encore !
Les perdants, je pense que nous en avons la même définition que le gouvernement, sont les entreprises qui ont acquitté en 2010 un montant de CET supérieur à ce qu'elles auraient payé en taxe professionnelle la même année, si celle-ci avait été encore en vigueur. Les pourcentages d'évolution font peur, les montants en valeur absolue un peu moins : 38 % des entreprises perdantes subissent une augmentation d'impôt inférieure à 10 % et les autres 62 % se partagent équitablement entre 10, 20, 30 et 50 % d'augmentation, parfois 100 %. Il y a eu de très grandes gagnantes, de très grandes perdantes... C'est sans doute le prix de la modernisation de l'impôt et des efforts de soutien sectoriel...
La cible principale, le secteur industriel, dont il s'agissait d'alléger les coûts et d'améliorer la compétitivité, a été effectivement bénéficiaire ; certaines activités ont profité d'une réduction de charge fiscale jusqu'à 80 %, cas rare mais qui mérite d'être cité : pour elles, c'est une bouffée d'air bienvenue. A la surprise générale, certaines entreprises industrielles n'ont rien gagné, voire ont légèrement perdu. Ce sont celles qui ont peu de foncier, des équipements importants et beaucoup de main-d'oeuvre. Je précise que nos enquêtes statistiques sont récentes et issues de réponses volontaires ; aucun commissaire aux comptes ne les certifie mais elles engagent nos membres.
Parmi les entreprises gagnantes, 30 % enregistrent moins de 10 % de réduction d'impôt, 25 % entre 30 et 50 % de réduction, 15 % entre 10 et 20 %. Pour la plupart des entreprises industrielles, le ratio CET sur valeur ajoutée taxable est de l'ordre de 2,5 %.
Outre les statistiques nationales, nous avons mené une enquête à l'échelle d'un département, la Seine-Maritime : les effets de la réforme diffèrent selon la taille des entreprises. Les plus grandes bénéficiaires ont un chiffre d'affaires compris entre 500 000 euros et 2 millions : elles enregistrent une réduction d'impôt de 63 %. Entre 2 et 5 millions de chiffre d'affaires, la réduction est de 46 % ; et de 26 % entre 5 et 10 millions. La dégressivité est nette. Au-delà de 25 millions d'euros, la hausse est d'environ 7 %. Le commerce paye 4 % d'impôt supplémentaire en masse globale ; il y a dans ce secteur plus de perdants que de gagnants. Les services sont gagnants, de 8 %, mais certains métiers sont clairement perdants.
Nous qui représentons toutes les entreprises de France pouvons dire qu'il y a plus de gagnants que de perdants. Pour l'industrie et les secteurs induits, la réforme a apporté un vrai soulagement. « Qu'en ont-ils fait ? » demandez-vous : les économies ont servi en premier lieu à remplacer l'outil de production ou à renforcer les capacités, ainsi qu'à recruter et conserver des positions sur les marchés par une meilleure compétitivité.