Intervention de Marie-Christine Roger

Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques — Réunion du 3 novembre 2011 : 1ère réunion
Evolution de la consommation électrique et économie d'énergie

Marie-Christine Roger, du développement durable, des transports et du logement :

chef du bureau de la qualité et de la réglementation technique de la construction, sous-direction de la qualité et du développement durable dans la construction, direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages, au ministère de l'Écologie, du développement durable, des transports et du logement. - C'est en 1974 qu'a été mise en place la première réglementation applicable aux bâtiments lors de leur construction, réglementation dont les exigences ont été régulièrement renforcées et les périmètres d'application étendus. J'ajoute que les modalités de cette réglementation ont été toujours élaborées par l'Etat, sur la base des travaux et des propositions des différentes parties prenantes, en particulier les professionnels et les industriels du bâtiment.

Pour les bâtiments neufs, les objectifs ont été inscrits à l'article 4 de la loi du 3 août 2009 relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement. Plusieurs objectifs y sont consignés : une évolution technologique et industrielle significative dans la conception de l'isolation des bâtiments et pour chacune des filières énergétiques ; un bouquet énergétique équilibré, faiblement émetteur de gaz à effet de serre et contribuant à l'indépendance énergétique nationale. Deux objectifs sont inscrits dans la loi : ceux de la réglementation thermique 2012, mais aussi un horizon donné vers la réglementation thermique 2020.

La réglementation thermique 2012 stipule une consommation annuelle moyenne d'énergie primaire inférieure à 50 kWh/m² pour le parc de logement neuf, une modulation de l'exigence, en particulier en fonction de la localisation géographique, pour tenir compte du climat, des caractéristiques, de l'usage des bâtiments et des émissions de gaz à effet de serre. Par ailleurs, un besoin maximal en énergie des bâtiments sera l'objet d'un seuil défini pour la première fois dans une réglementation.

A l'horizon 2020, la réglementation vise les bâtiments à énergie positive, bâtiments qui, sauf exception, produiront plus d'énergie renouvelable qu'ils n'en consommeront, notamment en utilisant le bois-énergie.

J'en viens au label bâtiment basse consommation (BBC) 2005, qui nous a servi de socle. Au fur et à mesure des années, depuis 2007, on a vu le nombre de logements labellisés BBC croître : 800 en 2007, 2500 en 2010, 20 000 en 2009, 100 000 en 2010 - autant sur les six premiers mois de l'année 2011.

Ce label s'est calé sur trois zones climatiques pour la France - H1, H2 et H3 - H2 désignant la zone de climat océanique, H1 le nord et l'est du pays, H3 la Méditerranée. En zone très froide, le label BBC est fixé à 60 kWh/m², à 40 kWh/m² en zone méditerranéenne.

Comment avons-nous procédé ? De nombreux groupes de travail constitués d'experts ont été sollicités, représentants les professionnels du secteur du bâtiment - maîtres d'ouvrage, industriels, architectes, bureaux d'étude, artisans, entreprises et ONG. Au fur et à mesure de l'avancée des travaux, des consultations publiques périodiques ont été organisées, élargies à l'ensemble des différents acteurs. Puis nous avons mis en place un groupe de travail dit « applicateurs », en faisant travailler des experts de la réglementation, en particulier des bureaux d'étude thermique, pour simuler sur plusieurs milliers de cas le logiciel de calcul. Pour cela, nous avons bien entendu utilisé le rapport de l'OPECST sur la performance énergétique des bâtiments.

Nous avons pris en compte plusieurs recommandations. Premièrement, le maintien des coefficients de conversion entre énergie primaire et énergie finale, de 2,58 pour l'électricité et 1 pour les autres énergies. Deuxièmement, l'affichage des émissions de CO2 en 2012, étant entendu qu'on vise pour 2020 un seuil qui sera inscrit dans la réglementation thermique. A ce jour, je le rappelle, aucun consensus scientifique ne se dégage sur le contenu en CO2 de certaines énergies, raison pour laquelle il a été décidé de reporter le travail en 2020. Troisièmement, faire la part entre la performance du bâti et la prise en compte de l'énergie par électricité photovoltaïque. Quatrièmement, une modulation selon la localisation ou l'altitude. Cinquièmement, l'introduction d'une exigence de confort d'été. Sixièmement, la modulation des exigences en fonction de la surface des bâtiments. Septième, huitième et neuvième recommandations : le suivi des consommations énergétiques dans les logements. Nous avons enfin pris en compte la dix-huitième recommandation : le contrôle de la perméabilité à l'air des bâtiments.

S'agissant du calendrier, un premier décret relatif aux caractéristiques thermiques et à la performance a été publié le 26 octobre 2010, de manière à ce que les professionnels puissent prendre connaissance des textes très en amont et se les approprier. Dans la foulée, ont été publiés l'arrêté du 26 octobre 2010 relatif aux caractéristiques thermiques et aux exigences de performance énergétique des bâtiments nouveaux et des parties nouvelles de bâtiments, et l'arrêté du 20 juillet 2011 portant approbation de la méthode de calcul Th-B-C-E 2012.

Ces premiers textes concernent la plus grande partie du parc : les bâtiments à usage d'habitation, les bureaux, les bâtiments d'enseignement et les crèches. Un deuxième arrêté est en cours d'élaboration pour d'autres bâtiments : hôtelleries, bâtiments de restauration, universités, palais de justice, équipements sportifs, aéroports, hôpitaux et bâtiments commerciaux, où les consommations sont très élevées.

Pour la grande majorité de ce parc, la date d'entrée en vigueur des exigences législatives se fera au 1er janvier 2013. Cela dit, le coeur de la réglementation repose sur trois exigences. Premièrement, le besoin bioclimatique répond à l'objectif de concevoir un bâtiment pour l'optimiser, en particulier pour qu'il ait accès aux apports solaires, de manière à éviter des consommations de chauffage inutile. C'est ainsi qu'un bâtiment avec des surfaces vitrées orientées au sud sera bien optimisé. Je n'insisterai pas sur l'exigence Cepmax, rappelant que l'exigence de consommation maximale annuelle de 50 kWh/m² s'évalue non seulement pour la consommation de chauffage, mais aussi, particularité française, pour la production d'eau chaude sanitaire et la consommation des auxiliaires.

Nous avons d'autres exigences, en particulier le traitement de l'étanchéité à l'air. Pour accélérer le développement des énergies renouvelables, la production d'eau chaude sanitaire devra se faire via les énergies renouvelables (EnR). Pour un bon usage du bâtiment, le comptage des consommations d'énergie devra se faire par usage dans les logements. La consommation d'énergie primaire avant déduction de production d'électricité à demeure est également bornée.

La règle des 50 kWh/m² admet quelques souplesses, en particulier pour les logements collectifs, qu'il ne faut pas pénaliser par rapport à la maison individuelle. Jusqu'au 1er janvier 2015, le temps de l'appropriation de la réglementation par les maîtres d'ouvrage, l'exigence de consommation sera augmentée jusqu'à 75kWh/m².

Vous trouverez dans mes transparents quelques simulations sur une petite maison coeur de cible en primo-accédant de 90 m², destinées à montrer, à la demande de la ministre, que les différentes solutions : pompe à chaleur, chaudière à condensation, chaudière bois ou effet joule, se positionnent toutes correctement en termes de coût global. Par rapport à un bâtiment construit en 2005, les surcoûts varient entre 7,5 et 10 %. Certaines solutions, comme le bois en climat méditerranéen, ont du mal à se positionner. L'effet joule tire par contre son épingle du jeu.

Il faut revenir sur la méthode de calcul, point sur lequel perdurent les idées préconçues. Comme pour toute méthode de calcul, des paramètres sont fixés a priori. Certains sont indépendants et inconnus lors de la conception du bâtiment, comme le nombre d'occupants, la température de consigne de chauffage et de refroidissement. Ils sont saisis par l'utilisateur et inscrits directement dans la méthode de calcul.

La méthode de calcul n'est pas prédictive et n'a pas pour vocation à faire un calcul de consommation réelle, compte tenu du nombre de conventions retenues, par définition important. Pour le climat, on prend en considération les données climatiques des dernières années. L'objectif est de fournir une évaluation de la performance énergétique globale du bâtiment, au moment de sa construction, compte tenu des niveaux de prestation sur le bâti et les équipements.

Faute de temps, je ne dirai rien sur le titre V, sauf pour rappeler qu'une commission d'experts se réunit pour étudier les dossiers après instruction technique.

S'agissant de la réglementation thermique sur l'existant, dès qu'on atteint un seuil en montant de travaux et une surface de 1 000 m², on demande que le bâtiment atteigne une certaine performance après travaux. Même lorsqu'on réalise de petits travaux, on doit utiliser des équipements performants ou mettre en place des double-vitrages d'une certaine performance. Tout le champ de l'existant est couvert par une réglementation thermique.

Les avis techniques n'ont pas de rapport direct avec la réglementation thermique et le calcul de la performance. Ils sanctionnent une aptitude à l'usage de nouveaux produits, pas seulement sur le plan thermique.

En conclusion, la France, pays le plus avancé en termes de réglementation, se positionne plus qu'honorablement au plan européen.

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