Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le 11 novembre 1920, la République française rendait son premier hommage, au pied de l’Arc de Triomphe, au soldat inconnu mort pendant la Grande Guerre. Cette date, déclarée chômée et commémorative deux ans plus tard par le Parlement, est depuis le point d’orgue de la mémoire collective française. En effet, elle trouve un écho particulier dans le cœur de nos concitoyens qui, pour beaucoup d’entre eux, ont reçu en héritage le récit de cette guerre, quand ils n’ont pas connu un valeureux poilu. À ce propos, le dernier nous a quittés le 12 mars 2008, rendant encore plus indispensable l’entretien de la flamme du souvenir.
La pérennité d’un attachement certain à la commémoration du 11 novembre 1918 tient aussi à l’ampleur du sacrifice consenti par le monde combattant.
Ce sont plus de soixante millions de soldats, provenant de vingt-deux États différents, qui se sont engagés dans une guerre dévastatrice déclarée à l’échelle du monde.
Le prix à payer fut lourd : dix-neuf millions de morts et vingt et un millions de blessés.
Au sortir de la guerre, la douleur fut immense. Non seulement il fallut constater une perte humaine considérable, mais le témoignage bouleversant des survivants devait marquer pour toujours les esprits.
Je citerai le récit anonyme d’un poilu résumant parfaitement ce qui a été enduré :
« Nous subissons à la fois toutes les souffrances, toutes les misères, toutes les privations dont les poilus peuvent être frappés : la pluie, la boue, la glace, la neige, la faim, la soif, les poux, le bombardement…
« Depuis six jours que nous sommes dans cette tranchée, nous n’avons pas eu la bonne fortune de voir luire le soleil un instant.
« Le ravitaillement est devenu à peu près impossible : les hommes qui se rendent la nuit à la corvée de soupe reviennent avec des boules de pain trempées dans la boue. Parfois, ils ne reviennent pas du tout, fauchés par les obus ou égarés dans les ténèbres de la nuit. »
Cette évocation, qui traduit le sort commun de toute une génération du feu, illustre aussi la dimension d’unité nationale que revêt plus que toute autre la guerre de 1914-1918.
C’est pourquoi on peut comprendre le choix de cette date comme journée d’hommage aux morts pour la France, civils et militaires.