… après six lois traitant de la chasse en douze ans, « le moment semble enfin venu de clore une période particulièrement productive sur le plan législatif dans le domaine de la chasse ». Il a raison !
Par rapport au texte que le Sénat a adopté en mai 2011, l’Assemblée nationale a apporté des ajouts sur divers sujets. Je souhaite mettre en avant quatre articles qui méritent que nous nous y attardions.
L’article 7 est une mesure de simplification pour les nombreux chasseurs de hutteaux, huttes, tonnes et gabions puisqu’il vise à rendre plus aisé le déplacement de ces postes fixes. Cette disposition permet de fonder la décision préfectorale d’autorisation de déplacement sur des critères les plus objectifs possibles, critères arrêtés au préalable dans le schéma départemental de gestion cynégétique.
L’article 13 tend à renforcer en Guyane la lutte contre le braconnage dans les espaces protégés, braconnage qui est perpétré notamment par les orpailleurs clandestins. Les dispositions de cet article permettront de protéger les populations amérindiennes et bushinenguées en préservant leurs ressources alimentaires, tout en permettant de sanctionner les violences dont elles sont victimes lors des actes de braconnage.
Votre commission a apporté une clarification justifiée à la rédaction qui avait été proposée par l’Assemblée nationale. Le Gouvernement en est satisfait et vous en remercie.
L’article 14 vise à prendre en compte les évolutions précédentes qui ont confié au directeur général de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, l’ONCFS, et non plus au préfet, le pouvoir de délivrer le permis de chasser. Il était nécessaire d’en prendre acte et de limiter les risques de contentieux dès lors que toute décision individuelle doit être motivée.
Votre commission en a à juste titre profité pour toiletter les condamnations justifiant du refus de cette délivrance, en ne retenant que celles qui peuvent être liées, d’une manière ou d’une autre, à l’acte de chasse. Le code de l’environnement perdra ainsi la poésie de « l’entrave à la circulation des grains » ou de « la dévastation d’arbres ou de récoltes sur pied », qui était issue d’un ancien article du code pénal, mais il y gagnera en cohérence.
Enfin, l’article 16 bis reconnaît à la seule Fédération nationale des chasseurs, la FNC, la faculté de proposer un prélèvement maximal autorisé, ou PMA, national. Il me semble que cet article découle directement de l’esprit de responsabilité dont a fait preuve la Fédération nationale des chasseurs en demandant l’instauration, en 2011, sur l’initiative de son président et malgré l’opposition de quelques fédérations départementales, d’un PMA sur la bécasse.
Devant vous, je souhaite saluer cette action résolue qui illustre parfaitement la participation responsable des fédérations de chasseurs à la préservation de la faune sauvage.
Votre commission a apporté de nombreuses précisions rédactionnelles sur lesquelles je ne reviendrai pas. Elles s’appuient notamment sur les travaux que vous aviez menés au moment de l’examen de la proposition de loi du sénateur Pierre Martin.
En revanche, je souhaite souligner que, dans le souci de concision et de précision de la loi qui caractérise le Sénat, vous avez à juste titre supprimé l’article 3 relatif aux réserves cynégétiques. L’objectif initial de redonner aux préfets la possibilité d’être à l’initiative de la création de ces réserves ayant été abandonné lors des travaux à l’Assemblée nationale, cet article n’avait plus de justification et risquait d’alourdir inutilement le code de l’environnement.
Pour finir, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite attirer plus particulièrement votre attention sur quatre articles dont l’adoption est, me semble-t-il, la plus attendue.
L’article 4 apporte une précision sur l’exonération partielle ou totale de la taxe sur le foncier non bâti, la TFNB, pour les propriétaires de zones humides en rappelant bien, au niveau de la loi, que cette disposition s’applique également sur les terrains chassés. La précision est essentielle. Par cette disposition, la contribution de la chasse et des chasseurs à la gestion des écosystèmes et à la préservation de la biodiversité est en effet reconnue. Cependant, comme M. Jean-Louis Borloo, alors ministre d’État, ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement et de l’aménagement durables, l’avait confirmé dans une réponse à une question de M. Ladislas Poniatowski, cette exonération était en fait déjà ouverte sur les terrains chassés, puisque rien ne l’excluait. Toutefois, mieux vaut que cette précision figure dans la loi.
Cet article de précision ne créant pas à proprement parler de charge supplémentaire pour les collectivités territoriales, je vous proposerai de supprimer l’article 18 qui mettait en place une compensation n’ayant pas lieu d’être.
L’article 8 tend à remédier à une difficulté de plus en plus grande, que ce soit pour les chasseurs ou les agriculteurs : celle des dégâts causés par un gibier issu de terrains sans plan de chasse.
La solution que l’Assemblée nationale a reprise de la proposition de loi Martin consiste à compléter la responsabilité, déjà inscrite dans la loi, du titulaire d’un plan de chasse qui ne réalise pas son minimum de prélèvement et d’une personne ayant marqué son opposition à la chasse, par la responsabilité du détenteur du droit de chasse quand il ne chasse pas. Votre commission a adopté un amendement de précision qui a toute sa justification.Encore le consensus, monsieur le président de la commission !
De plus, des amendements sur le dispositif d’indemnisation des dégâts de gibier ont été déposés pour examen en séance. Ils résultent d’un travail en commun réalisé par la Fédération nationale des chasseurs, l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture, ou APCA, et la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles, ou FNSEA. Je tiens à saluer cette volonté de consensus, sur un sujet qui peut facilement devenir conflictuel.
Ce travail a également amené à des propositions de modifications réglementaires que le Gouvernement s’engage à faire examiner par la Commission nationale d’indemnisation des dégâts de gibier.
Ces dispositions réglementaires seront étudiées en même temps que celles qui seront présentées par la mission d’expertise que Mme Nathalie Kosciusko-Morizet et M. Bruno Le Maire avaient commandée à leurs missions d’inspection respective.
Enfin, les articles 10 et 11, qui réforment le droit des associations communales de chasse agréées, ou ACCA, permettront de faciliter le fonctionnement institutionnel tout autant que l’accueil de nouveaux chasseurs. Ces articles sont l’exemple même de la nécessaire évolution de notre droit au regard des évolutions du milieu rural, faute de quoi nombre d’ACCA se trouveront en difficulté, ce qui conduira des territoires à être en déshérence cynégétique.
Comme l’a exprimé votre rapporteur en commission, la portée de cette proposition de loi ne doit pas être exagérée. Ce texte permet néanmoins de clore un cycle d’adaptation législative en inscrivant pleinement la chasse comme une activité environnementale qui participe effectivement, avec d’autres, à la gestion des écosystèmes.
Pour finir, laissez le ministre chargé des relations avec le Parlement, qui s’est démené depuis bientôt un an pour faire progresser l’élaboration des deux propositions de loi sur la chasse et les voir inscrites à l’ordre du jour des assemblées, vous dire sa conviction que l’Assemblée nationale est prête à adopter conforme ce qui semble devoir ressortir des travaux de votre commission, bien sûr si la proposition de loi n’est pas trop transformée aujourd’hui par notre discussion. J’insiste sur cet aspect, mesdames, messieurs les sénateurs, car je suis l’un des premiers, voire le premier à souhaiter que ce texte soit définitivement adopté avant la suspension de nos travaux parlementaires, dans quelques semaines.