La République aussi est éternelle…
C’est dans ce cadre que le Premier ministre, par lettre du 18 octobre 2011, a confié au sénateur Alain Chatillon une mission concernant la recherche de financements, y compris par des moyens innovants tels que le recours au mécénat auprès de particuliers ou d’entreprises, en concertation avec les trois régions concernées.
VNF continuera à gérer l’ensemble des canaux qui lui seront confiés, mais sans que l’établissement public devienne propriétaire des milliers de kilomètres de rivières et de canaux que cela représente. L’Assemblée nationale a sagement respecté cet équilibre. Bien évidemment, le Gouvernement veille, monsieur Nègre, à ce que VNF puisse disposer de tous les moyens nécessaires pour gérer ce domaine, qui fera l’objet d’une convention de gestion, en cours d’élaboration avec France Domaine.
Nous mesurons parfaitement le caractère sensible de tout ce qui a trait au domaine public et aux conditions de sa valorisation. Il ne s’agit nullement d’une privatisation du domaine public fluvial, qui doit, j’y insiste, rester ouvert à la navigation.
J’ai compris, monsieur Esnol, que certains amendements traduisaient une inquiétude à cet égard. Permettez-moi de préciser dans quel esprit s’inscrit la valorisation du domaine.
Il s’agit tout d’abord, là où les collectivités l’ont décidé et en conformité avec les documents d’urbanisme, de réunir, comme ce fut le cas à Lyon pour le projet de port Rambaud, les collectivités, VNF et, si nécessaire, des promoteurs immobiliers publics ou privés.
Le texte qui vous est soumis prévoit à cet égard que, pour ce type de projets de valorisation, les sociétés d’aménagement qui seront chargées de leur mise en œuvre – en conformité, je le répète, avec les documents d’urbanisme arrêtés par les collectivités – seront à capitaux majoritairement publics.
Je tiens également à souligner que cette orientation permettra bien évidemment, partout où c’est souhaitable et lorsque les collectivités l’ont prévu dans leurs documents d’urbanisme, de créer des logements. De ce point de vue, le projet de loi qui vous est soumis et les dispositions déjà applicables du code de l’urbanisme permettent de répondre à vos préoccupations, monsieur Esnol. Nous aurons sans doute l’occasion d’en rediscuter tout à l’heure.
Cependant, je tiens à souligner aussi que, pour certaines autres missions de valorisation, il faut nous laisser plus de souplesse s’agissant du capital des filiales. Par exemple, pour la production hydroélectrique, il nous semble nécessaire de laisser la possibilité à VNF de créer, au cas par cas, des filiales avec des partenaires industriels spécialistes de ce secteur, qui ne s’engageront sans doute pas s’ils ne peuvent pas être majoritaires.
Je considère que la valorisation du domaine public doit avant tout prendre en compte l’intérêt général, que ce soit pour fournir des ressources utiles au développement de la voie d’eau ou pour assurer le développement économique de nos territoires, tout en tenant le plus grand compte de la politique d’offre de logements.
Vous l’avez souligné, madame Schurch, l’ensemble du projet de loi s’appuie sur l’accord trouvé avec les représentants des personnels, car cette réforme ne pourra se faire qu’avec eux et que grâce à eux. Je souligne à cet égard que le Gouvernement a veillé au respect des grands équilibres, à celui de la parole donnée qu’évoquait Louis Nègre.
En particulier, je note que VNF sera un établissement public administratif et que le texte issu des travaux de la commission n’a pas remis en cause ce point fondamental.
Vous avez, madame Schurch, évoqué la question des recrutements de personnel pour la voie d’eau. Certes, nous sommes confrontés à une difficulté conjoncturelle pour ce qui concerne les ouvriers des parcs et ateliers. Une mission a été confiée au Conseil général de l’environnement et du développement durable afin d’apporter les réponses adaptées à cette difficulté. Dans l’immédiat, et compte tenu des besoins des services pour la maintenance des ouvrages, des contractuels de droit public sont actuellement en cours de recrutement.
Enfin, cette réforme ne serait pas complète si elle ne prenait pas suffisamment en compte les préoccupations des bateliers, madame Schurch.
L’État souhaite relancer le transport fluvial, notamment en allégeant les contraintes et les coûts pesant sur les entreprises en vue d’améliorer leur compétitivité, ainsi que la performance des unités de transport. Il s’agit, en particulier, du plan d’aide à la modernisation 2008-2012 : 16, 5 millions d’euros doivent permettre de conforter la performance économique et environnementale du transport fluvial.
Votre assemblée a voté une exonération de taxe intérieure sur les produits pétroliers s’agissant du carburant consommé pour le transport de marchandises et de passagers par voie fluviale, dans le cadre de la loi de finances pour 2011. Cette mesure, qui s’applique depuis le 1er janvier 2011, a ramené le coût de l’avitaillement en France à un niveau comparable à celui qui est observé dans les États voisins.
De plus, je rappelle que l’Assemblée nationale a prévu la création d’une interprofession fluviale, qui constituera l’enceinte privilégiée de discussion pour tous les acteurs de ce secteur.
Enfin, je n’oublie pas, monsieur Ries, la spécificité des ports fluviaux de la région rhénane. L’Assemblée nationale a su trouver, me semble-t-il, une solution de consensus permettant d’aller dans le sens que vous souhaitez et, à terme, de faire des ports rhénans le deuxième pôle européen en matière de transport fluvial. Vous m’avez appris qu’une première réunion s’était déjà tenue en présence du préfet de région. Cela prouve également que les choses vont dans le bon sens, même si le présent texte ne répond pas à vos vœux à la virgule près.
En conclusion, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi qui vous est soumis ouvre de nouvelles perspectives pour le transport fluvial. En réformant le service public de la voie d’eau et la gouvernance de son principal opérateur, Voies navigables de France, il trace le sillon de la compétitivité, de la modernité et, in fine, de la réussite économique et environnementale, au bénéfice des agents, des usagers et des riverains. Nous serons tous d’accord pour dire que le transport fluvial n’a pas encore tenu toutes ses promesses : ce secteur attend un signal fort de votre part.
Vous l’aurez compris, il s’agit, avec cette réforme, de clarifier la répartition des rôles entre l’État et l’établissement. En cela, ce projet de loi donne une portée concrète à une volonté politique forte, affirmée depuis plusieurs années, visant à rénover un service public ancré dans la vie quotidienne de nos compatriotes et auquel ils sont fortement attachés. Mettre en accord les paroles et les actes en inscrivant pleinement le transport fluvial dans le XXIe siècle : voilà exactement ce que nous faisons.
Pour que cette réforme soit une réussite et puisse être votée dans les temps, je vous invite à adopter conforme le présent projet de loi. Pour avoir été parlementaire pendant dix-sept ans, je sais très bien qu’aucun texte n’est parfait, mais il faut savoir prendre en compte les échéances du calendrier politique.
Ce projet de loi est certes perfectible, mais il présente l’avantage de susciter un large consensus. Je me suis battu pour que la plupart des mesures que vous aviez adoptées soient reprises par l'Assemblée nationale, laquelle partage vos objectifs, même si sa majorité est différente de celle du Sénat.
La recherche de la perfection est quelquefois l’ennemie du bien ; je vous invite donc à adopter ce texte, qui sera immédiatement applicable. Quels que soient les choix que les Français feront dans quelques mois, la priorité ne sera sans doute pas, alors, d’examiner un texte relatif à VNF… Nous avons aujourd'hui l’occasion de faire avancer concrètement les choses : il serait vraiment dommage de ne pas la saisir !