Intervention de Bariza Khiari

Réunion du 18 janvier 2012 à 14h30
Séjour des étudiants étrangers diplômés — Adoption d'une proposition de résolution

Photo de Bariza KhiariBariza Khiari, auteur de la proposition de résolution :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme vous le savez, la France a une très longue tradition d’accueil des étudiants étrangers. C’est pour elle une tradition ancienne, ce fut un pilier de sa diplomatie, c’est aujourd’hui un enjeu qui concerne aussi bien la francophonie, la vitalité universitaire que le développement de ses entreprises.

Le gouvernement de Lionel Jospin, bien conscient des intérêts multiples portés par les étudiants étrangers, avait mis en place une agence Edufrance, devenue depuis CampusFrance, pour améliorer l’attractivité de notre formation supérieure. Cette politique a été poursuivie par votre gouvernement, monsieur Raffarin.

L’actuel Président de la République semblait valider cette analyse, lui qui soulignait dans la lettre de mission adressée le 27 août 2007 au ministre des affaires étrangères : « Nous accordons la plus grande importance au développement de notre influence culturelle à l’étranger. Ce sont tout autant notre rôle dans le monde, l’avenir de nos industries culturelles et la diversité culturelle qui en dépendent ».

Dans cet hémicycle, nous sommes tous convaincus de la nécessité de maintenir une voix de la France dans un monde que la globalisation rend chaque jour plus complexe. Cela passe notamment par une politique d’influence et de rayonnement dont les étudiants étrangers sont un vecteur essentiel.

C’est dans cette perspective, et avec le souci de défendre notre rang dans la compétition universitaire internationale que nos collègues Monique Cerisier-ben Guiga et Jacques Blanc avaient, en 2005, présenté un rapport d’information insistant sur la nécessité d’une politique d’attractivité des étudiants internationaux et appelant à de multiples améliorations, pour la plupart réalisées depuis.

Les universités ont depuis mis en place un réel programme d’accueil, de formation et d’échange des étudiants étrangers.

Surtout, en 2006, un nouveau dispositif législatif, taillé sur mesure pour les étudiants étrangers, a été voté : l’article L.311-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le CESEDA. Il s’agissait de permettre aux étudiants diplômés d’obtenir une première expérience professionnelle post-formation en France, sans que la situation de l’emploi puisse leur être opposée. Le ministre de l’intérieur de l’époque, M. Sarkozy, présentait ce dispositif comme une illustration de sa politique d’immigration choisie.

Or, dans le droit fil du discours de Grenoble, voilà une circulaire qui réduit à néant des années d’efforts d’internationalisation de notre formation supérieure. Subitement, le slogan de l’immigration choisie a cédé la place à l’immigration zéro.

Voilà une circulaire dont les seules conséquences sont qualifiées de « stupides », d’« aberrantes » et d’« infamantes » par tous les acteurs concernés. Tous dénoncent les ravages causés à nos écoles, à nos universités, à la francophonie et à notre économie.

Monsieur le ministre, je constate que personne dans vos rangs – personne, je le souligne – n’a pris la défense de votre circulaire. Au contraire, un partage des rôles assez classique, avec M. Wauquiez dans le rôle du « gentil », vous a permis, pendant des mois, d’accréditer l’idée que cette circulaire relevait soit d’un malentendu, soit d’un zèle préfectoral spontané.

En réalité, cette volonté de détourner les étudiants de la destination « France » s’inscrit dans votre objectif de réduction des visas étudiants, comme vous l’avez publiquement rappelé le 1er septembre dernier, lors de la dix-neuvième conférence des ambassadeurs.

En premier lieu, je souhaite revenir sur trois arguments que vous avez soulevés pour justifier cette atteinte portée à notre attractivité. Ces arguments sont évidemment contestables de notre point de vue. Ils sont également contradictoires entre eux, affaiblissant par là même la validité de votre démonstration.

Le premier argument – celui des chiffres – est déroutant. En effet, il vise à établir que la mobilisation des étudiants est sans fondement puisque le nombre d’étudiants ayant obtenu leur changement de statut aurait augmenté. Le 17 novembre dernier, sur la chaîne de télévision LCI, vous évoquiez une augmentation de 35 % ; à présent, vous citez le chiffre de 17 % !

Toutefois, quoi de plus normal, de plus logique et de plus cohérent que le nombre des changements de statut d’étudiant à salarié progresse quand le nombre d’étudiants accueillis en master et en doctorat augmente, conformément aux objectifs que la France s’était fixés ? Cet argument est déroutant car il heurte de plein fouet votre autosatisfecit de la semaine dernière, concernant la baisse de l’immigration liée au travail.

Vous vous félicitiez d’avoir diminué l’immigration professionnelle de 26 % et vous maintenez que le nombre de changements de statut d’étudiant à salarié a augmenté. Qu’en est-il en réalité ? Qu’est devenu le discours de M. Sarkozy, qui souhaitait augmenter fortement l’immigration professionnelle, qu’il définissait, d’ailleurs à juste titre, comme un « rempart contre le racisme » ?

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion