… le code pénal offrant déjà tous les moyens que je viens de rappeler.
Enfin, nous pensons que cette proposition de loi, qui ferait peser un risque de poursuites pénales sur les historiens, n’est pas compatible avec le principe de liberté de la recherche, qui constitue lui aussi un principe fondamental reconnu par les lois de la République.
Certains ont argué, monsieur le ministre, que la présente proposition de loi ne présentait pas le même caractère d’inconstitutionnalité que les précédentes, car elle transposait une décision-cadre européenne. Je montrerai ultérieurement que cet argument ne résiste pas à l’examen, puisque le présent texte omet une part essentielle de la décision-cadre dont la finalité est de lutter contre le racisme et la xénophobie, par ailleurs d’ores et déjà réprimés, je le répète, par notre code pénal.
Au total, je veux appeler votre attention sur les risques de censure constitutionnelle qu’encourt ce texte. Ce risque n’est pas uniquement juridique. Car si le Conseil constitutionnel censurait ce texte, s’il décidait de se prononcer à cette occasion sur la constitutionnalité de la loi du 29 janvier 2001 relative à la reconnaissance du génocide arménien de 1915, une censure pourrait être interprétée comme une victoire pour les négationnistes. Ce risque est réel, et il ne peut être méconnu sous peine de faire à nos compatriotes d’origine arménienne un « cadeau empoisonné ».
Mes chers collègues, pour l’ensemble des raisons que je viens d’évoquer et pour les arguments que j’exposerai tout à l’heure, la commission des lois vous invite à voter l’exception d’irrecevabilité qu’elle a elle-même adoptée.
Permettez-moi, pour finir, de vous dire que je suis pour ma part persuadé, au-delà de ce débat dont je sais qu’il se déroulera, au Sénat, dans l’écoute des uns et des autres, et quelles que soient les conclusions de celui-ci, que la réponse aux questions qui nous occupent se trouve dans l’infini respect que nous devons – j’y insiste – à la mémoire des innombrables victimes du génocide arménien, ainsi que, indissociablement, dans les universités, dans le travail des historiens soucieux d’objectivité attachés à faire progresser la connaissance du passé, en un mot dans la science, le savoir et la connaissance.
Je rêve que, sous l’égide, par exemple, de l’UNESCO, des historiens arméniens, des historiens turcs, des historiens européens, des historiens du monde travaillent ensemble à mieux connaître le passé, …