La loi du 29 janvier 2001 ne qualifie pas les événements de 1915 : elle les « reconnaît » comme constitutifs d’un génocide. Rapportée au texte de la proposition de loi, cette reconnaissance ne produit qu’un seul effet : celui de rendre applicable la nouvelle incrimination, sans priver le juge de sa compétence de qualifier juridiquement les massacres de 1915.
Que la reconnaissance de faits comme constitutifs d’un génocide produise cet effet limité est confirmé par le libellé même de la proposition de loi : seules sont visées la contestation ou la minimisation outrancière de « l’existence d’un ou plusieurs crimes de génocide défini à l’article 211-1 du code pénal ».
Il appartiendra bien au juge de qualifier les faits soumis à son examen. Aussi n’y a-t-il aucune atteinte au principe de la séparation des pouvoirs.
II n’y en a pas davantage au principe constitutionnel de la légalité des délits puisque l’incrimination de contestation ou de minimisation outrancière repose sur la définition pénale du génocide, laquelle est précise et parfaitement fidèle aux définitions internationales de ce crime.
La commission des lois fait encore grief à la proposition de loi de porter atteinte à la liberté d’expression et à la liberté de la recherche. Cependant, telle qu’elle est rédigée, la proposition de loi laisse au juge la faculté d’apprécier ce qui est « outrancier » ou raisonnable. Ainsi, les travaux scientifiques sont mis à l’abri de toute poursuite.
De manière plus technique, M. le rapporteur souligne le risque de voir la loi du 29 janvier 2001 relative à la reconnaissance du génocide arménien de 1915 déclarée inconstitutionnelle. Cet argument ne nous semble pas fondé.
Pour ce qui est du grief tiré de la prétendue violation de la séparation des pouvoirs, j’y ai déjà répondu.
Quant à l’objection fondée sur l’absence de valeur normative de la loi du 29 janvier 2001, elle doit justement être levée par l’adoption de la présente proposition de loi. En effet, la loi relative à la reconnaissance du génocide arménien de 1915 rendra applicable la nouvelle incrimination. Il est paradoxal de s’opposer à une proposition de loi qui fait disparaître un motif d’inconstitutionnalité d’une loi en vigueur !
Enfin, on nous objecte que la proposition de loi procéderait à une transposition imparfaite de la décision-cadre 2008/913/JAI du Conseil du 28 novembre 2008 sur la lutte contre certaines formes et manifestations de racisme et de xénophobie au moyen du droit pénal.