Intervention de Catherine Tasca

Réunion du 23 janvier 2012 à 15h00
Répression de la contestation de l'existence des génocides — Vote sur l'ensemble

Photo de Catherine TascaCatherine Tasca :

Monsieur le président, Monsieur le ministre, mes chers collègues, au terme de ce débat, on ne peut que regretter que ce texte, que je ne voterai pas, ait été déposé dans un contexte forcément très polémique, au début d’une campagne présidentielle et sous la pression constante des deux parties. Les porte-parole des descendants des victimes arméniennes veulent croire que les opposants à cette proposition de loi manquent de respect à l’égard des victimes des massacres de 1915.

Or personne, que ce soit dans cet hémicycle ou ailleurs, n’oserait aujourd’hui nier les événements qui ont conduit à la mort tant d’Arméniens voilà un siècle. L’injustice et l’élimination dont ce peuple fut victime ne sauraient être effacées, tout comme ne sauraient d’ailleurs être oubliées les souffrances infligées à tant d’autres minorités dans l’Empire ottoman et plus près de nous : Juifs, Grecs, Kurdes. On peut espérer que la Turquie moderne, qui conforte chaque jour son implication dans le concert international, assume enfin les fautes du passé et trouve tout particulièrement avec l’Arménie les voies d’une réparation et d’un voisinage serein.

Je ne doute pas que la question de la constitutionnalité de ce texte sera tôt ou tard tranchée par le juge constitutionnel. Cependant, il nous faut dénoncer dès aujourd'hui l’opportunisme et la manipulation politique opérée par le Président de la République qui, avec ce texte, espère faire coup double à quelques mois de l’élection présidentielle. D’une part, il croit s’acquérir ainsi les voix des Arméniens de France ; je veux croire que ceux-ci sont maîtres de leur vote et se détermineront en fonction de leurs convictions. D’autre part, il trouve de nouveau arguments pour faire barrage à la candidature de la Turquie à l’Union européenne, dont il a fait depuis longtemps son cheval de bataille, sur fond d’hostilité déclarée au monde musulman. Qui plus est, il tente de maquiller le but de cette proposition de loi en prétendant qu’elle ne vise pas un peuple ou un État en particulier. Or nous savons bien qu'il s'agit du génocide arménien et de la Turquie.

Mes chers collègues, ne laissons pas Nicolas Sarkozy instrumentaliser ainsi le Parlement !

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