Chère madame Escoffier, vous nous avez réunis cet après-midi pour aborder une question essentielle, celle de la protection de la vie privée des citoyens. Cette matière est à la base de notre corpus constitutionnel et du régime politique qui nous permet de vivre ensemble. Je vous remercie donc d’avoir posé cette question. Comme nombre d’intervenants l’ont souligné, il est assez normal que nous nous rejoignons les uns et les autres sur ce principe de base, sans lequel la vie en société deviendrait impossible.
Il y a plus de trente ans, en adoptant la loi fondatrice du 6 janvier 1978 dite « informatique et libertés », la France fut précurseur en la matière. Ce texte, qui est la pierre angulaire de la protection des citoyens dans le cadre des traitements de données à caractère personnel, a doté la France d’une autorité de contrôle, la Commission nationale de l’informatique et des libertés, qui réglemente la manière dont sont collectées, exploitées et conservées les données personnelles par les entreprises, les administrations et les individus eux-mêmes.
Cette loi, dont il convient de conserver les grands équilibres, est aujourd’hui encore un instrument permettant d’apporter des réponses adaptées et pérennes aux problématiques actuelles. Pour autant, le développement rapide des nouvelles technologies pose de nouveaux défis de taille s’agissant de la protection des données à caractère personnel et, par conséquent, de la vie privée des individus.
Vous l’avez tous souligné, mesdames, messieurs les sénateurs, internet, qui est un vecteur sans précédent de la liberté d’expression et de communication, ne doit pas se transformer en espace sans règle ni droit. Certes, il offre un accès illimité à l’information, à la connaissance et à la culture, que l’on retrouve sur la toile sous des formes toujours plus variées. Le Conseil constitutionnel lui-même a eu l’occasion, dans sa décision du 10 juin 2009, de relever « l’importance prise par ces services pour la participation à la vie démocratique et l’expression des idées et des opinions ». Sur les sites, les blogs et les réseaux sociaux, les échanges de données à caractère personnel se multiplient, sans pour autant que les personnes concernées en conservent la maîtrise.
Vous l’avez souligné, madame le sénateur, face au contexte de rapide mutation technologique dans lequel nous nous trouvons, l’effectivité du droit au respect de la vie privée suppose d’adapter les instruments juridiques propres à garantir la protection des données à caractère personnel. Tel est d’ailleurs l’un des objectifs poursuivis par la proposition de loi, présentée par M. Yves Détraigne et vous-même et inspirée de votre rapport d’information de mai 2009, visant à mieux garantir le droit à la vie privée à l’heure du numérique. La Haute Assemblée a adopté ce texte le 23 mars 2010.
Le Gouvernement, pleinement conscient des enjeux grandissants de la révolution numérique, s’est attaché à renforcer la protection des données personnelles avant que votre texte puisse être étudié par l’Assemblée nationale.