Intervention de Roland Ries

Réunion du 15 février 2012 à 14h30
Transport aérien de passagers — Suite de la discussion en procédure accélérée et rejet d'une proposition de loi

Photo de Roland RiesRoland Ries :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, cette proposition de loi n’est qu’un texte de circonstance, une fois de plus. Le sujet qu’elle aborde est sensible dans l’opinion ; c’est pourquoi il mériterait un débat plus serein. Il s’agit du droit constitutionnel de faire grève et des droits des voyageurs dans le secteur aérien.

Comme il a été rappelé, le Gouvernement a saisi l’occasion de la grève organisée en décembre dernier par les agents chargés des contrôles de sûreté dans les aéroports pour remettre sur le devant de la scène l’un de ses thèmes de campagne favoris : le service minimum. D’ailleurs, il a décidé que la proposition de loi serait examinée en procédure accélérée, afin que sa discussion et son adoption puissent avoir lieu avant la fin de la session parlementaire, en pleine campagne présidentielle…

La proposition de loi s’inspire de la loi du 21 août 2007 sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs. En pratique, cette loi dite de « service minimum » a repris un dispositif qui existait à la RATP depuis 1996 : les agents de conduite sont tenus de déposer une déclaration d’intention de faire grève quarante-huit heures avant le jour de la grève. Par ailleurs, un accord-cadre doit être signé entre l’employeur et les organisations syndicales sur la procédure à suivre préalablement au dépôt d’un préavis de grève. Enfin, après le dépôt d’un préavis de grève, l’entreprise est tenue d’établir un dispositif d’information des voyageurs.

Si cette loi a eu le mérite de faciliter la « prévisibilité » du trafic et l’information du public lors des jours de grève, elle a cependant installé l’idée, au sein de la population, qu’il y aurait un service minimum dans les transports terrestres. Or cela est faux. En effet, le droit de grève étant un droit fondamental, le Gouvernement a dû faire marche arrière et renoncer à instaurer un service minimum.

La loi de 2007 améliore simplement la « prévisibilité ». Si, demain, l’ensemble du personnel de la RATP se déclare gréviste, aucune rame de métro ne pourra circuler quarante-huit heures plus tard. C’est donc abusivement que la loi de 2007 est qualifiée de loi sur le service minimum. D’ailleurs, la majorité présidentielle le sait bien, puisque, lors de l’examen de la proposition de loi à l’Assemblée nationale, elle a opéré un glissement sémantique vers la notion de service garanti.

Par ailleurs, depuis l’adoption de la loi de 2007, les niveaux de conflictualité ont toujours été supérieurs à ceux de la période précédente. Ainsi, de 2003 à 2010, le nombre moyen de jours de grève par an et par agent de la RATP, de la SNCF ou des transports urbains s’élevait à 1, 38, alors que pour la période allant de 1997 à 2002, il s’établissait à 0, 55. Preuve, s’il en fallait, qu’il faut davantage de négociations en amont des conflits.

Même si l’exaspération des Français touchés par les grèves est compréhensible, le groupe socialiste du Sénat votera contre la proposition de loi, et ce principalement pour trois raisons.

Tout d’abord, ce texte n’a fait l’objet d’aucune concertation en amont avec les organisations représentatives et syndicales. C’est un comble : le Gouvernement veut imposer le dialogue social sans dialogue social !

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