Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en cette fin de session extraordinaire, je me réjouis que le présent projet de loi ait pour objet de renforcer notre rayonnement culturel dans le monde.
Avant tout, je tiens à saluer, au nom du groupe UMP, l’immense travail réalisé aussi bien lors d’auditions que de réunions de concertation par le président de la commission des affaires étrangères, Josselin de Rohan, et celui de la commission de la culture, Jacques Legendre, avant même que ce texte ait été déposé sur le bureau du Sénat.
Dans leur rapport d’information sur les enjeux de notre diplomatie culturelle, nos deux collègues ont très largement abordé la situation, esquissant des pistes de solution, dont on retrouve l’esprit dans ce projet de loi.
À ce travail préparatoire s’ajoute naturellement celui de M. le rapporteur, Joseph Kergueris, et de M. le rapporteur pour avis, Louis Duvernois, dont la tâche a été considérable.
Je ne m’attarderai pas sur la méthode, mais je tiens à faire part de notre satisfaction résultant des enrichissements successifs apportés à ce texte depuis la première lecture au Sénat.
Tout d’abord, le présent projet de loi est pragmatique en ce qu’il répond à l’esprit de réforme exprimé par le Président de la République dans le Livre blanc sur la politique étrangère et européenne de la France.
Alors que les opérateurs et les établissements aux statuts divers et variés sont multiples, ce texte présente l’avantage de replacer l’ambassadeur au centre de notre diplomatie culturelle afin d’éviter l’émiettement des actions des uns et des autres.
C’est dans ce cadre que nous soutenons la création d’une seule agence chargée de développer la culture française en étroite coopération avec les autres opérateurs, qu’ils soient publics ou privés, notamment avec les alliances françaises.
L’agence devra fédérer et démultiplier les actions afin de mettre en place une logique d’influence et non plus une simple politique de rayonnement culturel.
En animant et en gérant tout le réseau culturel, l’Institut français remplira un double objectif : répondre à un besoin et à une « demande de France ». Il s’agit, à mes yeux, d’un premier pas vers la mise en place d’un soft power à la française. Aucun pays ne peut se targuer d’exercer une diplomatie d’influence s’il ne crée les conditions de nature à susciter l’envie de connaître sa culture, à fédérer autour de ses valeurs qu’il doit faire partager, et à devenir un modèle culturel de société pour les autres pays.
C’est aussi à ce titre que je me félicite de l’actuelle rédaction des articles 5 et 6 du projet de loi, qui mettent en place une véritable organisation de nos outils d’influence, ce dont nous avons vraiment besoin.
En séparant les missions de promotion de l’enseignement supérieur français, notre système universitaire et professionnel de la mission d’expertise internationale, nous contribuons à donner une meilleure lisibilité à notre action culturelle. Celle-ci se déclinera autour de deux nouveaux EPIC : Campus France et France expertise internationale.
Cette solution me paraît plus judicieuse et surtout plus claire que le choix initial portant sur la création de l’Agence française pour l’expertise et la mobilité internationales. En effet, l’expertise internationale doit faire l’objet d’une politique à part entière. Le rapport de Nicolas Tenzer sur le sujet ne laisse aucune équivoque.
L’expertise doit être considérée comme un levier de notre action extérieure. C’est pour cette raison que la transformation du groupement d’intérêt public France Coopération Internationale en EPIC me paraît une bonne chose, aussi nécessaire que visionnaire.
Enfin, pour ce qui concerne Campus France, il me semble important de souligner l’approche progressive et expérimentale retenue dans ce projet de loi.
En effet, l’association Égide et la section internationale du CNOUS seront à terme, à l’issue des derniers arbitrages ministériels, intégrées dans Campus France, lequel sera placé sous la tutelle conjointe du ministre des affaires étrangères et du ministre chargé de l’enseignement supérieur.
Toutefois, je forme le vœu que cette cotutelle ne nuise pas à l’instauration d’une véritable politique d’attractivité universitaire. La cotutelle doit être un avantage et non un handicap, comme nous avons pu si souvent le vérifier. Nous sommes attachés à cette clarification garante d’efficacité.
Notre action culturelle s’est parfois illustrée par un manque de pilotage stratégique clairement identifiable au plan tant interministériel qu’administratif.
En outre, je ne reviendrai sur l’article 14 du projet de loi, qui prévoit la possibilité pour l’État français d’exercer une action récursoire à l’encontre des opérateurs de transport ou autres voyagistes au cas où il devrait mener une opération de secours dans des zones considérées comme dangereuses au profit de ressortissants français, sauf pour vous faire part d’une précision.
Nous avons tous veillé à ce qu’il soit clairement indiqué dans la loi que les personnes s’étant rendues dans de telles zones pour un motif professionnel légitime ne sont pas concernées par cette disposition. Cette remarque vise toutes les catégories de personnes travaillant dans des pays dangereux, qu’il s’agisse des journalistes, des humanitaires, ou encore des chercheurs.
Dans ces conditions, je m’étonne que certains s’agitent au journal télévisé de vingt heures, profitant d’une certaine démagogie ambiante pour faire croire en un sempiternel « anti-journalisme » manifesté par les responsables politiques.
Plusieurs journalistes ont été pris en otage dans des pays en guerre, et ce depuis bien des années. Jamais l’État français ne les a oubliés ! Au contraire, il a toujours activé au maximum les services diplomatiques et les armées ; il agit en ce moment même en Afghanistan pour obtenir la libération des deux journalistes Stéphane Taponier et Hervé Ghesquière. Mais est-il possible de rendre compte à la presse toutes les semaines de l’état d’avancement des travaux ?... Je ne le pense pas.
Je tenais à vous apporter aujourd’hui cette précision, mes chers collègues, car ce faux procès est plus que regrettable.
Enfin, sachez d’ores et déjà que les membres du groupe UMP du Sénat voteront cette réforme capitale pour notre action extérieure. Mais avant de conclure, je souhaite attirer votre attention sur un dernier point.
Monsieur le ministre, si nous souhaitons que notre pays rayonne et bénéficie pleinement des moyens lui permettant de jouir d’une diplomatie d’influence, nous devons considérer ce texte comme une première étape. Celui-ci doit s’inscrire comme une base juridique et administrative créant des conditions globales et organisationnelles. C’est un bon début. Mais, à l’avenir, il faudra être encore plus audacieux et, n’ayons pas peur des mots, plus offensifs si nous souhaitons que notre pays demeure un modèle culturel en tant que tel. Nous devrons faire preuve de créativité et d’inventivité pour exister.