Intervention de Anne Joseleau

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 11 janvier 2012 : 1ère réunion
Prescription de l'action publique des agressions sexuelles autres que le viol — Table ronde avec les représentantes d'associations engagées dans la lutte contre les violences envers les femmes

Anne Joseleau, directrice de Solidarité Femmes Dijon :

La Fédération nationale Solidarité Femmes est favorable à cette proposition de loi. Elle tient à rappeler que la violence sexuelle s'exerce majoritairement à l'intérieur du couple, quatre fois plus souvent qu'à l'extérieur d'après l'Observatoire nationale de la délinquance.

Nous avons l'habitude d'accompagner les femmes lors de leurs actions en justice et nous constatons que la tendance des tribunaux est, lorsque les faits ne sont « pas trop graves », de se contenter d'un simple rappel de la loi comme si la première agression sexuelle ne comptait pas, en quelque sorte, et de ne prononcer de condamnation, ou du moins de ne reconnaître la culpabilité qu'à la deuxième mise en cause. C'est une pratique qui est douloureuse pour les femmes qui ont dû surmonter bien des difficultés pour porter plainte, et qui se voient dénier la possibilité de voir reconnaître la culpabilité de leur agresseur.

Or, un certain nombre de ces femmes que nous accompagnons ont déjà été exposées, dans leur enfance, à des actes de maltraitance ou d'abus sexuels qu'elles avaient dénoncés sans être cependant écoutées. On risque alors de leur donner l'impression que l'on n'est pas davantage prêt à les entendre à l'âge adulte que dans leur enfance. De ce point de vue aussi la prorogation du délai de prescription paraît positive.

J'ajoute que ce n'est que très rarement que les femmes évoquent, dès le premier rendez-vous, les agressions sexuelles qu'elles ont subies. Il leur faut du temps pour arriver à les dénoncer et à porter plainte. Il faut aussi du temps aux associations pour s'assurer que la démarche en justice a des chances d'aboutir, car un échec peut s'avérer encore plus douloureux.

Bien sûr, il est nécessaire que les femmes engagent des poursuites judiciaires, mais il faut aussi que la justice reconnaisse la culpabilité de leurs agresseurs, car il n'y a rien de tel que le sentiment d'impunité des agresseurs pour renforcer leur sentiment de toute puissance, sentiment qui est le gage de la poursuite assurée de ces violences.

Il nous semble capital que l'Observatoire de la délinquance puisse fournir au niveau national et local des chiffres actualisés sur les violences faites aux femmes car notre association manque cruellement de données récentes.

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