Intervention de François Jacq

Commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire — Réunion du 29 février 2012 : 1ère réunion
Audition de M. François Jacq candidat au renouvellement de ses fonctions de président-directeur général de météo france

François Jacq, président directeur général de Météo France :

Les activités de Météo France peuvent être présentées sous trois volets : l'appui à la puissance publique dans le domaine de la sécurité des personnes et des biens ; la prévision météorologique pour les activités aéronautiques dans le cadre de la relation très forte établie avec la direction générale de l'aviation civile (DGAC); enfin, les activités commerciales représentant à peu près 10 % de notre budget.

Qu'il s'agisse de prévisions météorologiques ou d'études climatologiques, l'établissement assume des missions de base : les observations à l'échelle nationale, la recherche avec la modélisation prévisionnelle du temps et la modélisation prospective sur le climat, l'étude des climats passés, le tout faisant appel à des structures d'appui.

Le pôle principal se trouve à Toulouse, avec 1 000 personnes. Environ 400 personnes travaillent outre-mer, où nous sommes présents jusqu'en Terre Adélie. La métropole a été divisée en sept interrégions, avec des échelons départementaux. Notre bâtiment historique quai Branly ayant été cédé à la Fédération de Russie, le siège de l'établissement se situe aujourd'hui à Saint-Mandé, près de l'Institut national de l'information géographique et forestière.

Les années 2009 à 2011 sont celles de mon mandat ; elles coïncident avec un contrat d'objectifs avec l'État. Je commencerai donc par mentionner les principales réalisations de cette période.

Pour améliorer la sécurité des personnes et des biens, nous perfectionnons sans cesse le dispositif de vigilance météo mis en place après les tempêtes de 1999. Nous avons analysé plus finement les événements susceptibles de perturber la vie quotidienne des Français, avec des progrès quant aux fausses alertes et pour des prévisions plus fines. En octobre 2011, nous avons mis en place une vigilance « vague-submersion », dont le calendrier avait été accéléré après la tempête Xynthia. En outre, un « avertissement pluies intenses à l'échelle des communes » (Apic) a été institué fin 2011 comme suite aux crues torrentielles subies par le Var en juin 2010. Enfin, la coopération intense établie depuis deux ans avec l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) a débouché sur une collaboration très fructueuse portant sur la dispersion de polluants du type Fukushima.

Dans le domaine de l'aéronautique, nous avons amélioré la prévision utilisable par les aéronefs pendant leur trajet, avec une centralisation de la veille météorologique à Toulouse dans le cadre du « ciel unique européen », qui doit aboutir à une vision « sans couture ». Avec un consortium de services météorologiques, nous avons remporté l'appel d'offres SESAR (Single European Sky Air Traffic Management Research) au niveau européen. Enfin, nous avons apporté notre appui à la DGAC dans la gestion des cendres volcaniques : comme pour la dispersion de polluants, nous sommes en appui direct de la puissance publique.

Cela suppose des progrès dans la précision. De fait, les modèles utilisés par Météo France sont parmi les meilleurs au niveau européen, voire mondial. Nous avons l'un des deux grands centres français sur le climat avec l'Institut Pierre Simon Laplace. À ce titre, l'établissement public a collaboré avec le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec), et produit des scénarios régionalisés de changement climatique destinés à éclairer des politiques d'adaptation. Afin de détecter un éventuel changement climatique, Météo France sauvegarde aussi des données passées sur le climat.

Entre 2009 et 2011, l'établissement a préparé la restructuration de son réseau territorial. Le projet était dans les cartons depuis les années 1990. Les progrès de la prévision ont permis d'envisager en 2006 et 2007 la rationalisation des implantations en métropole, qui devront passer de 108 à 55 - ce qui n'empêchera pas notre réseau de rester le plus dense en Europe. Les premières fermetures commencent à intervenir.

J'en viens à la diffusion de l'information : un portail permet d'accéder aux données publiques produites par l'établissement. J'accorde une grande attention à l'initiative « météo à l'école », que nous aimerions généraliser à toutes les académies.

Après une légère décroissance en 2008 et 2009, l'activité commerciale a légèrement progressé pour atteindre 40 millions d'euros, ce qui n'est pas aisé dans un univers très concurrentiel marqué par une tendance nette à exiger la gratuité sur ce type de données.

En matière de gestion, nos comptes sont certifiés, ce qui n'est pas banal puisqu'il faut concilier la comptabilité publique et le plan comptable général... Dans son rapport publié cet été, la Cour des comptes s'est félicitée du travail accompli, bien qu'il reste beaucoup à faire.

J'en viens aux grandes orientations pour l'avenir. L'année 2011 a été consacrée à la prospective pour 2012-2016, dans un environnement international toujours plus contraint et avec des homologues étrangers suivant des stratégies vigoureuses. Pour rester au premier plan, il faut disposer d'infrastructures au goût du jour et de moyens d'action. Cela suppose une gestion encore plus rigoureuse des moyens et une culture de projets plus forte pour dépasser le stade artisanal - ce travail est encore devant nous.

Quelles sont les priorités ? Bien qu'elle ne représente que 10 % du budget de Météo France, la recherche conditionne sa capacité professionnelle. Elle doit être sanctuarisée et développée. La deuxième priorité concerne la modernisation des infrastructures, qui vieillissent par rapport à celles dont disposent les Allemands et les Anglais. Notre façon de travailler doit évoluer, car l'édifice actuel est trop complexe - cela est sans rapport avec l'organisation territoriale. Enfin, il faut mieux satisfaire les clients, notamment pour ce qui est de la vigilance, du partenariat avec la DGAC, de l'écoute des usagers.

Malgré un effectif important, nous ne disposons pas toujours des compétences nécessaires.

Mon but est de maintenir Météo France au premier rang des services météorologiques et climatiques européens. À mon sens, on peut distinguer trois thèmes cruciaux pour l'avenir. Tout d'abord, le futur supercalculateur : nos moyens de calcul sont dans un rapport de 1 à 10 avec ceux des Allemands et des Anglais. La mise à niveau est une priorité. Ensuite, la modernisation des radars est un enjeu crucial pour la prévision et la gestion des crises. Enfin, il importe d'achever la rénovation de quelque 550 à 560 stations d'observation en métropole.

En matière de recherche et de prévision, nous disposons de deux grands modèles numériques : Arpège, à maille 20 kilomètres et Arome, à maille 2,5 kilomètres. Nous voulons réduire ces mailles respectivement à 7,5 et 1,3 kilomètres, pour capturer plus de phénomènes physiques. En effet, des situations comme les pluies torrentielles sur le Var, très localisées, sont aujourd'hui très mal repérées, contrairement à des averses, qui s'étendent sur une large portion du territoire. Pour apporter un meilleur appui à la puissance publique et à l'aéronautique, il faut une appréhension plus complète.

Le climat constitue le troisième sujet majeur, avec le développement de services climatiques permettant de mieux informer les usagers sur l'avenir dans leur secteur, sur leur profession.

Autre sujet, notre capacité à bénéficier du volet internet. L'Organisation météorologique mondiale nous demande désormais de jouer le rôle de noeud dans un système de dispersion de l'information par des technologies web. D'où aussi la mise en place de portails de données pour les utilisateurs ou d'outils de superposition de plusieurs couches d'informations géographiques, hydrographiques ou encore météorologiques.

Météo France, je le sais pour en être à la tête depuis trois ans, appartient à ces maisons qui évoluent lentement, les actions s'y mènent dans la durée, raison pour laquelle j'ai considéré qu'il était de ma responsabilité de proposer de suivre les chantiers que j'avais lancés.

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