Intervention de Jean-Marc Schlenker

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 4 avril 2012 : 1ère réunion
Audition de M. Jean-Marc Schlenker président du comité de suivi de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités

Jean-Marc Schlenker, président du comité de suivi :

L'autonomie n'est pas une fin en soi, mais le moyen pour l'université de mieux remplir les deux missions qui sont les siennes, recherche et formation. Nos universités sont handicapées par une spécificité française : elles sont coupées des organismes de recherche (CNRS, CEA, INRIA...), ce qui a pour effet de réduire pour elles l'apport des investissements en recherche publique en même temps que leurs moyens humains et financiers. Il s'agit donc d'encourager la contribution des chercheurs, en veillant au respect des dispositions prévues par le décret de 2009 sur les primes d'excellence scientifique, d'assurer un recrutement de qualité en rendant plus attractif le statut d'enseignant-chercheur, d'offrir des formations mieux adaptées aux besoins réels des étudiants.

Je veux insister sur l'évaluation et la transparence. La nouvelle réglementation issue de la loi LRU doit en effet conduire les universités à se doter de capacités d'évaluation scientifique internes. C'est pourquoi nous recommandons de nouveau de mettre en oeuvre la quatrième mission de l'AERES (Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur), sur la validation des procédures d'évaluation des personnels, en interne comme par le CNU (Conseil national des universités). A partir de 2013, les primes d'excellence scientifiques ne seront plus attribuées sur évaluation nationale, mais par les universités elles-mêmes ; il leur faut donc se garder des risques de conflits d'intérêts.

La transparence doit également être la règle dans l'évaluation des unités de recherche et la répartition des moyens. L'application du décret financier prévu par la LRU se révèle indispensable pour établir des comparaisons internationales.

L'État n'exerce plus un rôle de pilotage direct, mais de régulation et d'incitation, grâce à une allocation efficace des moyens. Or, le modèle SYMPA (SYstème de répartition des Moyens à la Performance et à l'Activité) est mal appliqué. Des moyens considérables vont aux grands établissements, au détriment des structures plus modestes, ce n'est pas acceptable. Les critères devraient être davantage qualitatifs. Les préciputs sur les contrats de recherche ANR (Agence nationale de la recherche) sont un autre instrument : même s'ils passent cette année de 11 à 14 %, ils restent loin des taux pratiqués en Allemagne (20 %), ou aux États-Unis (50 % pour la National Science Foundation). Des indicateurs de performance plus sensibles à la performance scientifique devraient être élaborés.

Les universités, enfin, devront diversifier leurs sources de financement - fondation, financements européens ou privés. Les collectivités locales pourraient développer leur rôle.

Le comité de suivi recommande d'assouplir les préalables à l'ouverture de formation de niveau L en préférant à la validation préalable une validation a posteriori. Plus généralement, il serait bon de faire évoluer le contrat quinquennal avec l'État qui, au-delà de son aspect financier, peut être un outil des politiques d'enseignement supérieur et de recherche.

Au total, on peut considérer que si la gouvernance des universités a connu bien des avancées en cinq ans, des questions demeurent. Et bien du chemin reste à parcourir pour atteindre aux standards internationaux. Nos universités sont encore fragilisées par le processus électoral qui prévaut en leur sein ; les effets de la prime majoritaire n'étant pas tempérés par le vote des personnalités extérieures.

L'autonomie a progressé, mais elle reste relative. Le dernier rapport de l'European Universities Association place la France dans le dernier tiers du classement. La dynamique reste fragile : il faudra prendre garde à ne pas la briser par une reprise en mains de l'État ou des restrictions budgétaires brutales.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion