Je n'ai pas parlé des agences de notation. Différant peu du régime applicable en France, le régime de responsabilité proposé par la Commission européenne me convient. La responsabilité civile fait partie d'un régime normal lorsque l'on conduit une activité professionnelle. Bien des progrès ont été accomplis dans la régulation des conflits d'intérêt et de l'indépendance des agences. En revanche, la concurrence ne progresse pas et ce ne sont pas les exigences croissantes imposées aux agences qui vont atténuer la situation d'oligopole et favoriser l'arrivée de nouveaux entrants. Nous n'avons pas renoncé mais nous n'avons pas encore trouvé la formule !
Depuis longtemps nous appelons à une désintoxication par rapport aux notations : une appréciation plus fine des risques par des modèles internes serait préférable. Le recours aux agences est une solution de facilité. Les régulateurs nationaux avaient d'ailleurs tendance à s'appuyer sur les notations externes, donc à entretenir une dépendance à l'égard des agences. La Commission européenne s'est engagée à éradiquer ces références dans la réglementation. Pendant longtemps, les banques centrales se sont également appuyées sur les notations alors qu'elles ont les moyens d'apprécier le risque par elles-mêmes. Aujourd'hui la Banque centrale européenne n'a plus de système qui repose uniquement ou automatiquement sur les notations.
Les dérivés les plus utilisés sont les produits de change et de taux, les actions arrivant en troisième position. L'utilité d'une couverture contre un risque de taux ou de change se conçoit aisément. Il est trop simple de penser que ces activités sont inutiles. Tout ce qui permet de standardiser et de compenser ces dérivés va dans le bon sens.
Le défaut d'une chambre de compensation pourrait-il être absorbé par la banque centrale concernée ? On n'attend pas qu'elle recapitalise une chambre de compensation, ce n'est pas son rôle. Dans un bon système de régulation, ce sont les membres qui sont responsables d'un éventuel défaut. Ils doivent mettre en place un système de coussin de sécurité, certains sont logés dans le capital, d'autres sont appelables à tout moment en cas de risque. Sans doute peut-on relever le niveau des coussins de sécurité, mais une partie du risque sera inévitablement répercutée sur les membres. La chambre de compensation cependant, en cas de défaut d'une des parties, commence par saisir le collatéral déposé par l'intervenant défaillant et le vend pour éponger la perte : l'accès à la liquidité de la banque centrale lui évite de brader les actifs dans un contexte de marchés perturbés.
Les emprunts régionaux et les financements des collectivités territoriales sont un peu loin de notre sujet du jour, mais nous suivons bien sûr attentivement ces questions. Les grandes collectivités ont recours tant au marché qu'au crédit pour se financer, c'est une bonne chose. Des emprunts communs à deux régions ne poseraient pas de difficulté s'ils sont simplement des opérations conjointes ; il en va autrement si les collectivités s'engagent solidairement...
Le professeur Aglietta a parlé fort justement de l'innovation financière, laquelle doit faire l'objet d'une régulation coordonnée et d'une coopération internationale. Un dispositif appliqué unilatéralement chassera ailleurs l'innovation, qui se déplace vers l'environnement le moins contraignant. Une régulation efficace exige une vision générale et cohérente entre pays.
Le secteur financier en France ne saurait être décrit comme inefficace : le crédit bancaire dans notre pays progresse plus rapidement que dans le reste de la zone euro, à raison de 5,8 % en croissance annuelle au mois de novembre 2011. Pour les crédits court terme aux entreprises, les taux moyens sont de 2,8 % tandis qu'ils s'élèvent à 4,01 % pour les crédits de moyen et long terme. Ce sont de bonnes conditions de financement de l'économie, en comparaison des autres pays. On l'oublie parfois.