Intervention de Jean-Louis Carrère

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 1er février 2012 : 1ère réunion
Situation dans la corne de l'afrique — Audition de M. Marc Etienne lavergne géopolitologue directeur de recherche au cnrs

Photo de Jean-Louis CarrèreJean-Louis Carrère, président :

Nous accueillons aujourd'hui M. Marc-Etienne Lavergne, directeur de recherche au CNRS, spécialiste du monde arabe et de la Corne de l'Afrique. C'est sur cette dernière région que nous l'entendons ce matin. La commission avait entendu l'année dernière M. Mahiga, représentant spécial du secrétaire général des Nations unis pour la Somalie. Il m'a paru important, un an après, de faire le point sur la situation dans la Corne de l'Afrique où se concentrent de nombreux enjeux géopolitiques et humanitaires.

Comme vous le savez, celle-ci est frappée par une des plus sévères crises humanitaires que nous connaissons aujourd'hui. Cette région, qui s'étend depuis la côte sud de la mer Rouge jusqu'à la côte ouest de la mer d'Oman, avec la Somalie, l'Éthiopie à l'ouest, Djibouti et l'Érythrée au Nord, le Kenya au Sud, est frappée par une sécheresse de grande ampleur, qui touche près de 12 millions de personnes selon les derniers chiffres de l'ONU. Cette crise s'explique par le sous-développement de ces pays, mais également par l'insécurité structurelle de la région, et singulièrement de la Somalie.

Ce pays vit en effet une situation assez inédite, puisqu'il est aujourd'hui totalement divisé avec, au nord, le Somaliland, au nord-est le Puntland ainsi qu'un certain nombre de territoires hétérogènes au sud de la Somalie dont une partie est contrôlée par la milice extrémiste Shabab, qui se revendique d'Al Qaïda. C'est une région qui semble finalement assez rétive à adopter les structures étatiques telles que nous les connaissons au niveau international. C'est en tout cas une situation particulièrement complexe avec la présence voire l'intervention de plusieurs Etats : le Kenya, l'Ethiopie, l'Erythrée et, plus au nord, le Soudan.

J'espère que vous pourrez nous éclairer sur cette complexité pour nous en décrire les enjeux. Notre commission s'est assez largement investie sur le thème de la piraterie, qui a fait l'objet d'un texte l'année dernière et de nombreuses missions de contrôle. Nous avons également présents à l'esprit les intérêts de la France dans cette région, et notamment le rôle stratégique de Djibouti avec lequel nous venons de re-signer un accord de défense, Djibouti, ancien territoire français, qui est aujourd'hui courtisé non seulement par les Américains, qui ont une base, par les Japonais, qui s'y sont implantés récemment, évidemment par les Chinois qui financent aujourd'hui la reconstruction du port.

Il s'agit donc d'une région à la fois délaissée d'un point de vue économique et courtisée pour son emplacement géostratégique aux portes du Golfe d'Aden et d'une des principales routes maritimes mondiales.

Je vous laisse donc la parole pour que vous puissiez nous rendre un peu plus intelligible l'ensemble de ces enjeux. Après quoi, les membres de la commission vous poseront quelques questions s'ils le souhaitent.

Je rappelle que vous êtes directeur de recherche au CNRS, docteur en géographie, chercheur de terrain. Vous avez consacré près de 40 ans au monde arabe et à la Corne de l'Afrique. Outre vos fonctions universitaires qui vous ont conduit à diriger au Caire le très réputé Centre d'études et de documentation économiques, juridiques et sociales (CEDEJ), vous avez été mandaté comme expert humanitaire (coordinateur du groupe d'experts du Conseil de sécurité) pour le compte de l'ONU au Soudan. Vous avez été administrateur de l'Association « médecins sans frontière ». C'est dire combien vous associez connaissances universitaires et pratiques de terrain.

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