Intervention de Jean-Paul Fournier

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 22 février 2012 : 1ère réunion
Convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre la france et le nigeria — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Jean-Paul FournierJean-Paul Fournier, rapporteur :

Nous sommes appelés à nous prononcer sur une convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre la France et le Nigeria. Avant de vous présenter le contenu de ce texte, je voudrais vous présenter brièvement la situation du Nigeria et les relations franco-nigérianes.

Comptant aujourd'hui quelque 160 millions d'habitants, et sans doute 400 millions à l'horizon 2050, le Nigeria est de loin le pays le plus peuplé d'Afrique.

Le Nigeria est aussi un géant économique - la deuxième puissance du continent après l'Afrique du Sud, qui dispose d'importantes réserves d'hydrocarbures.

Le Nigeria joue également un rôle important de médiateur en matière régionale au sein de l'Union africaine, par exemple en Cote d'Ivoire et en Libye, et ce pays participe à des opérations de maintien de la paix de l'ONU.

La situation intérieure du Nigeria est toutefois marquée par des tensions communautaires entre le Sud, principalement peuplé de chrétiens, et le Nord, majoritairement peuplé de musulmans. Récemment, les communautés chrétiennes ont été visées par des attentats terroristes, notamment un attentat contre une église chrétienne ayant fait 35 morts, commis le jour de Noël près d'Abuja. Ces attentats ont été revendiqués par la secte « Boko Haram », qui a récemment fait allégeance à Al Qaïda. Cette secte a adressé un ultimatum aux chrétiens pour qu'ils quittent les provinces du Nord, où certaines régions appliquent déjà la Charia, laissant craindre une montée des tensions et des violences communautaires.

En outre, à la suite de la décision du Président de la République nouvellement élu de supprimer les subventions sur l'essence, les prix à la pompe ont augmenté de plus de 220 %, entraînant une grève générale et de violentes manifestations.

On relève également une forte insécurité dans la zone du delta du Niger, qui se traduit pas des actes de terrorisme ou de piraterie et des prises d'otages, visant notamment les installations pétrolières. Alors que ce pays pourrait produire 3 millions de barils par jour, il n'en produit que 1,8 million.

Compte tenu de son poids, et malgré le fait qu'il s'agit d'un pays anglophone, la France a noué d'étroites relations avec le Nigeria, qui se sont traduites par la signature d'un partenariat stratégique en juin 2008 et de nombreuses rencontres bilatérales. Je rappelle que la présence économique française est importante au Nigeria, puisque ce pays est depuis 2006 notre premier partenaire en Afrique subsaharienne. Plus de 100 entreprises y sont implantées, comme TOTAL, Michelin, Lafarge, Peugeot, AREVA, Schneider, etc.

Dans le cadre de ce partenariat stratégique, la France et le Nigeria ont prévu la conclusion d'un accord d'entraide judiciaire, afin de faciliter notamment le traitement des commissions rogatoires internationales. Cet accord, dont nous sommes saisis, devrait permettre d'améliorer la coopération judiciaire entre nos deux pays mais aussi de renforcer la lutte contre le terrorisme, la criminalité organisée ou le trafic de drogue.

Jusqu'à présent, les demandes d'entraide ont été relativement limitées. Ainsi, seuls neuf demandes ont été adressées par la France aux autorités nigérianes depuis 1997 et quatre seulement ont été exécutées. Sur la même période, sept demandes ont été adressées par le Nigeria et trois restent en cours d'exécution à ce jour.

Plusieurs raisons peuvent expliquer les difficultés rencontrées dans l'exécution des demandes d'entraide :

- l'absence de procédure et d'autorité centrale clairement identifiée au Nigeria pour la réception des demandes d'entraide ;

- l'absence de bases de données ou de fichiers centralisés ;

- enfin, le manque de moyens humains et matériels, la désorganisation des services locaux et le manque de réactivité des agences gouvernementales.

Le présent accord permettra à cet égard d'améliorer la coopération judiciaire pénale franco-nigériane.

La convention prévoit notamment la désignation d'une autorité centrale, elle pose l'obligation de répondre dans des délais rapides et prévoit une relance systématique en cas de retard, l'obligation de motiver les refus de coopération.

Elle contient aussi des stipulations visant à faciliter le transfèrement des personnes condamnées.

Enfin, les deux pays reconnaissent l'importance particulière de lutter contre les activités criminelles graves, comme la corruption, le blanchiment d'argent, les trafics d'armes ou encore le terrorisme et son financement.

Compte tenu du fait que cette convention permettra de renforcer la coopération judiciaire avec le Nigeria, je vous proposerai d'adopter ce projet de loi et je vous recommanderai une adoption selon la procédure simplifiée.

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