Intervention de Bernard Van Crayenest

Commission des affaires sociales — Réunion du 1er février 2012 : 1ère réunion
Sommet social — Table ronde réunissant les représentants des syndicats de salariés

Bernard Van Crayenest, président de la CFE-CGC :

A nos yeux, le sommet social était une réunion de travail comme nous en avons connu autrefois. Il y en avait un par mois lorsque la crise financière a éclaté en 2008, mais cette pratique avait disparu depuis 2010.

La loi Larcher du 31 janvier 2007 impose que toute évolution du code du travail soit précédée par la consultation des partenaires sociaux. Une bonne pratique consiste donc à fixer en début d'année un agenda social. En 2011, son élaboration n'a été l'oeuvre que des partenaires sociaux...

La montée inquiétante du chômage peut justifier des mesures défensives ou offensives.

Il faut à l'évidence retrouver les voies de la croissance économique qui nous fait cruellement défaut. Notre pays n'est pas le seul, mais nos concitoyens subissent la montée continue du chômage : au moins égal à 7 % depuis trente ans, il avoisine aujourd'hui 10 % en raison d'un mauvais positionnement de nos entreprises dans la compétition mondiale et même au sein de la zone euro. Pour relancer la croissance, la CFE-CGC met depuis longtemps l'accent sur la compétitivité des entreprises. En ce domaine, la France est caractérisée par une succession de mesures dont chacune est peut-être pertinente, mais qui ne forment pas un ensemble cohérent permettant d'affronter les défis. La réforme de la taxe professionnelle est bienvenue, mais elle n'a pas été évaluée. Nous ignorons donc si elle a permis d'améliorer la compétitivité des entreprises les plus exposées à la concurrence internationale. Par ailleurs, les exonérations de cotisations sociales sur les faibles rémunérations ont un effet pervers : la « trappe à bas salaires ».

Les grandes entreprises échappant en pratique au taux légal de l'impôt sur les sociétés alors que les PME le subissent de plein fouet, nous suggérons que l'assiette de l'impôt sur les sociétés prenne en compte le bénéfice réinvesti en recherche et développement, dans l'outil de production ou l'emploi. A ce jour, cette suggestion n'a pas eu de suite.

La CFE-CGC propose depuis longtemps une cotisation sociale sur la consommation. Par définition, cette cotisation serait affectée. Le vrai problème du financement de la protection sociale est le vieillissement de la population. Il faut certes améliorer la gestion du système de soins et combattre la fraude, mais il faut aussi dégager des moyens supplémentaires pour élargir les recettes sociales, à l'instar de la CSG autrefois, car le financement actuel exerce une pression négative sur les effectifs et les salaires. Nous constatons aujourd'hui que le transfert partiel du financement de la politique familiale sur la TVA se traduirait par une hausse de 1,6 point. Les entreprises les plus exposées à la concurrence internationale sont-elles ciblées ?

Par ailleurs, notre économie est caractérisée par une forte dichotomie entre grands groupes et PME, les salariés de celles-ci n'ayant accès ni à l'intéressement, ni à la participation, ni à l'épargne salariale.

Nous estimons insuffisantes les propositions faites pour retrouver les voies de croissance et offrir à nos entreprises les moyens de tirer leur épingle du jeu dans la concurrence internationale.

Un document sur la compétitivité a été ratifié par les organisations d'employeurs et par trois organisations syndicales. La France doit dynamiser ses actions de recherche et développement : alors que la stratégie de Lisbonne de mars 2000 indiquait que chaque pays consacrerait 3 % de sa richesse à la recherche et au développement à l'horizon 2010, nous stagnons à 2,1 %, avec des masses analogues pour les secteurs public et privé. La CFE-CGC estime que le fonds stratégique d'investissement devrait revoir sa doctrine de participation minoritaire, insuffisamment ciblée vers les entreprises exposées à la compétition internationale. Nous souhaitons également que soient accélérés les investissements liés au grand emprunt. Il nous semble pertinent de créer une banque de l'industrie sur le modèle d'Oseo, surtout si elle peut s'affranchir de Bâle III pour consacrer ses ressources à l'économie réelle et à l'investissement au lieu d'accumuler des fonds propres. Enfin, nous souhaitons qu'un encouragement fiscal oriente l'épargne des ménages vers le financement de l'économie.

J'en viens au volet défensif : le chômage partiel peut éviter de rompre le contrat de travail. Dès 2008, nous avons dénoncé l'inégalité devant le chômage partiel. La possibilité d'effectuer un contrôle a posteriori va dans le bon sens.

Faut-il réformer la formation professionnelle ? Il convient sans aucun doute d'améliorer la formation des demandeurs d'emploi ; sur l'enveloppe d'un milliard d'euros prévue à cette fin, le Gouvernement a prélevé 300 millions au détriment du fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP). Il faut cesser de reprendre d'une main ce que l'on vient de redistribuer de l'autre !

En moyenne, les entreprises comptant plus de deux cent cinquante salariés emploient 1,7 % de personnes en apprentissage. Pour atteindre 4 % ou 5 %, il faudrait disposer de tuteurs disponibles et formés.

Les accords compétitivité-emploi vont être discutés dans le cadre d'une négociation nationale interprofessionnelle. Nous ignorons si elle peut aboutir en deux mois. Il importe d'éviter les effets d'aubaine et les redondances. En outre, leur application dans une entreprise suppose, à notre avis, l'accord majoritaire des salariés. J'insiste enfin sur la clause de retour à meilleure fortune offrant aux salariés des perspectives claires de contrepartie pour les sacrifices consentis.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion