Intervention de Claudy Lebreton

Mission commune d'information sur la taxe professionnelle — Réunion du 31 janvier 2012 : 1ère réunion
Audition de représentants de collectivités locales

Claudy Lebreton, président du Conseil général des Côtes d'Armor, président de l'Assemblée des Départements de France (ADF) :

Est-il utile de rappeler combien la taxe professionnelle était, pour les collectivités territoriales et les départements, un impôt important et dynamique ?

On comptait chaque année des créations d'entreprises, des créations d'emplois ; le solde était souvent positif, la croissance de recettes essentielle et importante pour nos collectivités, quelle qu'elles soient.

Une des premières questions que vous posez porte sur le degré d'autonomie fiscale des départements. Les départements représentent un budget d'environ 70 milliards d'euros. La fiscalité, avant les réformes, était de 22,5 milliards d'euros, dont 9 milliards d'euros de taxe professionnelle. Je mets de côté les droits de mutation, qui avoisinent #172;7,5 milliards d'euros.

Les recettes fiscales des « quatre vieilles » représentaient 35 % des recettes de la fiscalité des départements ; aujourd'hui, la moyenne est tombée à 17 % : nous avons donc perdu la moitié de notre pouvoir de taux avec la réforme de la taxe professionnelle et de la fiscalité et n'avons plus que le foncier bâti pour seule recette fiscale locale, moitié moins !

Les dépenses départementales sont des dépenses rigides qui pèsent incontestablement : Allocation Personnalisée d'Autonomie (APA), Prestation de Compensation du Handicap (PCH) et Revenu de Solidarité Active (RSA) représentent 13 milliards d'euros chaque année. Je ne m'étendrai pas sur la compensation de l'Etat qui a fortement régressé en quelques années, ni sur la couverture de l'APA, au départ de 48 % et tombée à moins de 25 % en moyenne.

Qui plus est, les droits de mutation à titre onéreux (DMTO), qui sont une recette fiscale indirecte, se sont effondrés en 2008 2009 ; ils ont diminué de 2,5 milliards d'euros en l'espace de deux ans. Même si on a connu une remontée en 2010, l'évolution a été de 60 %. On est face à une recette procyclique qui devient de plus en plus compliquée, dans une situation économique et sociale extrêmement tendue et un marché de l'immobilier doublement impacté, d'une part, du fait des recettes de DMTO et, d'autre part, du foncier bâti.

En second lieu, les incidences du FNGIR et de la DCRTP sont aujourd'hui prises en compte en matière de potentiel fiscal et financier dans tous les calculs de répartition du RSA et de l'APA, au titre de la Caisse Nationale de Solidarité pour l'Autonomie (CNSA).

Compte tenu des nouveaux calculs, un département considéré comme modeste, comme le Gers, qui occupait la 94ème place dans le classement du potentiel financier, est passé à la 44ème place. Le Gers va donc devenir un département riche ! Les Hautes Pyrénées, qui étaient à la 58ème place, sont passés à la 17ème place ; le Tarn, qui était à la 98ème place, est aujourd'hui à la 62ème place.

Nous avons attiré l'attention du Président de la commission des finances du Sénat et de son rapporteur général sur cet état de fait, qui place les départements dans une situation qui n'est pas de la plus grande justice fiscale ni territoriale.

Troisième conséquence : la CVAE va pouvoir, à partir de 2013, participer de la péréquation financière entre départements. Or, dès que la CVAE, liée à l'activité économique et à la croissance des assiettes diminue, la DCRTP augmente. On sait que cette recette des collectivités départementales sera « capée ». Il s'agit donc d'une double peine : les DMTO et la CVAE étant de moins en moins dynamiques face à des dépenses sociales rigides, on se retrouve dans un environnement financier insupportable. Je ne m'étendrai pas sur le sujet, chacun ayant reconnu y compris le CFL que les départements, du fait de ces spécificités, sont dans des situations financières extrêmement difficiles, voire dramatiques pour certains !

Ce sont les départements les plus urbains, notamment en Ile de France, qui vont accaparer une grande partie des recettes de la CVAE. C'est là une répartition des recettes totalement inéquitable.

L'ADF a toujours été plus convaincue par une péréquation verticale qu'horizontale même si, pour certains départements, la péréquation a été positive. On a introduit au sein des départements beaucoup d'inégalités.

Cette exonération de taxe professionnelle a-t-elle permis aux grands groupes de mieux se situer dans la compétitivité internationale ? Mon département a mené des analyses : cette mesure a été bénéfique pour un certain nombre d'entreprises, notamment dans le secteur de l'artisanat mais c'est plus la concurrence des salaires et des charges de certains pays que la taxe professionnelle qui menace les groupes français.

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