Intervention de Stanislas Martin

Délégation sénatoriale à l'Outre-mer — Réunion du 28 mars 2012 : 1ère réunion
La vie chère outre-mer : une fatalité — Audition de M. Stanislas Martin chef du service de la protection des consommateurs et de la régulation des marchés à la direction générale de la concurrence de la consommation et de la répression des fraudes

Stanislas Martin, chef du service de la protection des consommateurs et de la régulation des marchés à la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) :

En outre-mer, l'organisation locale de la DGCCRF est centrée sur les cinq départements d'outre-mer (DOM). Nous sommes également présents à Saint-Pierre-et-Miquelon mais nous n'avons pas de présence permanente en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna.

L'organisation de nos services en outre-mer a été plutôt moins impactée par la réforme territoriale de l'État qu'en métropole, où les niveaux départementaux et régionaux ont été fusionnés. Les services déconcentrés de la DGCCRF sont rattachés aux Directions des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIECCTE). En Martinique existe par ailleurs une brigade interrégionale d'enquête de concurrence compétente sur les dossiers les plus importants pour les trois départements français d'Amérique. Les dossiers équivalents à La Réunion et à Mayotte sont gérés par une brigade basée en Île-de-France.

Le mode de détermination des effectifs présents en outre-mer est dérogatoire au droit commun. En effet, en métropole, nous utilisons un logiciel qui calcule les effectifs en fonction de critères territoriaux. Cette méthode conduirait à une forte diminution des effectifs en outre-mer, dont le nombre est aujourd'hui déterminé de manière plus empirique.

Nous avons à l'heure actuelle 29 personnes en Guadeloupe, 30 en Martinique, 13 en Guyane, 21 à La Réunion, 4 et bientôt 5 à Mayotte et 3 à Saint-Pierre-et-Miquelon. Les effectifs n'ont diminué que de 3 % par rapport à 2008 alors que la baisse a été de 6 % en métropole. Si on compare ces effectifs à la population des territoires, on constate un ratio de 32 agents pour 400 000 habitants en Guadeloupe, par exemple, alors que pour des départements comparables, ce ratio serait de 19 agents dans les Pyrénées-Orientales, de 18 dans les Landes ou de 23 en Vendée. C'est moins vrai pour La Réunion où le ratio est de 23 agents pour 800 000 habitants. Elle est donc moins bien dotée.

Les liens entre l'administration centrale et les antennes locales, les DIECCTE, fonctionnent à partir d'une directive nationale d'orientation. Il existe des tâches nationales et des tâches régionales, choisies dans chaque région en fonction des spécificités de l'économie locale. Les tâches nationales sont parfois adaptées aux contextes de l'outre-mer pour prendre en compte par exemple l'existence des importateurs-grossistes et leurs relations avec les fournisseurs. Il existe aussi des tâches régionales mutualisées entre les départements français d'Amérique, comme sur le prix des yaourts ou des eaux embouteillées par exemple.

La réalisation des tâches nationales correspond à 60 % à 70 % du travail en outre-mer. Par rapport aux régions métropolitaines, les tâches non programmées sont plus nombreuses, ce qui montre une grande réactivité des services par rapport aux situations locales.

Les trois activités des DIECCTE sont la concurrence, la sécurité des produits et la protection des consommateurs. La part « concurrence » est plus importante en outre-mer qu'en métropole parce que, dans ce domaine, nous agissons souvent pour les Observatoires des prix et des revenus (OPR). Les OPR sont donc des partenaires importants.

Nos liens avec la Direction générale des finances publiques (DGFiP) sont également forts, sur la base d'échanges d'informations, notamment dans le cadre des Groupements d'intervention régionale (GIR) concurrence. Il est plus difficile d'accéder aux informations des douanes, couvertes par le secret.

Nos relations avec les inspecteurs du travail sont très fréquentes puisque nous les côtoyons au sein des DIECCTE.

Enfin, nous contribuons aux enquêtes de l'Autorité de la concurrence, dont l'activité en outre-mer est très forte depuis 2009. Il y a actuellement 16 enquêtes en cours concernant les DOM en partenariat avec elle. La DGCCRF contribue également aux enquêtes sectorielles de l'Autorité sur le coût de l'assurance-construction et sur le prix des pièces détachées automobiles.

Quelles sont les spécificités des plaintes portées devant la DGCCRF en outre-mer ? Nous recevons plus qu'ailleurs des plaintes pour des affaires entre particuliers, comme lors de ventes de voitures d'occasion. Nous ne pouvons les traiter car cela ne rentre pas dans le champ du code de la concurrence. Sinon, nous retrouvons les mêmes « classiques » qu'en métropole : la grande consommation et les télécommunications. La seule différence est la faiblesse du volume des affaires relatives au commerce en ligne en outre-mer par rapport à la métropole.

À l'exception de La Réunion où on constate une hausse en 2011, le nombre de contrôles a diminué en outre-mer de 10 % à 15 % entre 2010 et 2011, en raison probablement de la très forte mise sous tension des services en 2009 et 2010 et de la montée en puissance des actions menées pour les OPR auxquelles la DGCCRF a dû contribuer.

S'agissant de la nature des activités par rapport à la métropole, les contrôles de concurrence sont plus fréquents, le temps d'enquête sur le terrain est également plus élevé et le nombre de visites par agent très sensiblement supérieur à la Martinique et La Réunion.

Quel est le bilan des accords de baisse de prix conclus en outre-mer à la suite de la crise de 2009 ? Globalement, on peut dire que ces accords ont été respectés, les taux de respect des prix convenus et de disponibilité des produits variant selon la DGCCRF entre 75 % et 90 %. Donc, de manière générale, la grande distribution a joué le jeu. Il y a eu quelques problèmes de disponibilité des produits de première nécessité mais c'était davantage en raison de leur attractivité et du comportement de stockage des consommateurs et des petits commerçants que du fait d'une stratégie des grandes surfaces.

Les accords, d'une durée variable (un an en Guadeloupe, trois ans en Martinique, quelques mois à La Réunion), ont expiré sans demande de renouvellement. Ils expireront le 31 mars prochain en Martinique et à Mayotte sans que la question du renouvellement ait fait l'objet de négociations intensives.

La DIECCTE de Guadeloupe a regretté que les accords aient été conclus pour une durée si brève. Ils auraient eu davantage d'impact s'ils avaient duré plus longtemps. En Martinique, on a constaté qu'il n'y avait pas eu d'effet de contagion vertueux sur le niveau général des prix des autres produits.

À ces accords semble succéder une démarche de définition de listes de produits constituant un chariot-type correspondant à la structure de consommation locale.

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