Intervention de Annie Thébaud-Mony

Mission d'information sur les pesticides — Réunion du 17 avril 2012 : 1ère réunion
Audition de Mme Annie Thébaud-mony directeur de recherche honoraire à l'institut national de la santé et de la recherche médicale inserm présidente de l'association henri pézerat santé travail environnement

Annie Thébaud-Mony :

J'ai dirigé pendant dix ans le Groupement d'Intérêt Scientifique sur les Cancers d'Origine Professionnelle (GISCOP93). Depuis les années 1980, je m'intéresse aux questions de santé au travail, notamment en milieu industriel, et ai aussi dirigé une thèse sur les travailleurs agricoles saisonniers dans le sud de la France et en Espagne, qui sont exposés aux pesticides.

Tout ce qui concerne le cancer est malheureusement sous-estimé, et surtout mal abordé.

Je vous ai apporté un ouvrage auquel j'ai collaboré, abordant des questions comme celle de la « fabrique du doute », pour reprendre le titre de l'une de ses parties, qui reprend des études de cas - l'enquête en Seine-Saint-Denis mais aussi un autre exemple qui montre comment on en arrive à ne pas produire de connaissance face à un petit groupe de cas.

Enfin, j'aborderai la réglementation européenne et la justice.

L'impact du travail sur les cancers, d'abord. Il y a un siècle, la loi sur les accidents du travail faisait basculer la santé au travail dans le champ de l'assurantiel, d'après une méthode essentiellement statistique non déterminante en matière de preuve, ce qui oblige à attendre des études épidémiologiques pour établir les liens exclusifs entre: les maladies à effet différé et les des facteurs professionnels.

Le cancer, c'est une histoire, pas « une cause, un effet », même pas un risque attribuable. C'est une histoire dans laquelle toute rencontre avec un cancérogène peut jouer un rôle. Dans cette maladie polyfactorielle, les cancérogènes agissent en interférences et synergie tout au long de la vie. On sait depuis les années 1960 que la synergie tabac-amiante accroît le risque de manière exponentielle.

On fait comme si c'était l'épidémiologie qui apportait la preuve, alors que celle-ci ne peut résulter que de la biologie, de la toxicologie, voire de la génétique. En effet, dès lors qu'un polluant est identifié comme cancérogène à la suite d'expérimentations sur l'animal, on peut considérer qu'il est toxique pour l'homme. Malheureusement, on fait comme si ces données n'avaient rien à voir les unes avec les autres...

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