Intervention de Bernard Petit

Commission d'enquête Evasion des capitaux — Réunion du 27 mars 2012 : 1ère réunion
Audition de M. Bernard Petit sous-directeur contrôleur général de lutte contre la criminalité organisée et la délinquance financières à la direction centrale de la police judiciaire

Bernard Petit, sous-directeur, contrôleur général de la lutte contre la criminalité organisée et la délinquance financière à la direction centrale de la police judiciaire :

La BNRDF profite des outils de la coopération de police. À côté des outils de coopération opérationnelle que sont les accords de Schengen, Interpol et Europol, il existe une panoplie d'autres outils importants : les officiers de liaison chez nos homologues, les officiers de liaison français à l'étranger, les attachés de sécurité, les plates-formes de travail, en Afrique, en Amérique du Sud, dans les Antilles, ... Lorsque la BNRDF est saisie, elle a accès à tous ces « tuyaux » de la coopération internationale.

Ensuite, et surtout lorsqu'elle est cosaisie, par exemple avec l'OCRGDF ou avec l'Office pour la lutte contre le crime organisé, l'OCLO, qui se charge notamment des vols à main armée, la BNRDF avance avec des infractions multiples, à savoir la fraude fiscale mais aussi l'escroquerie en bande organisée, le carrousel de TVA, l'extorsion de fonds, le racket, la traite des êtres humains, ce qui facilite grandement la coopération avec les États étrangers. Ces derniers ont parfois le bon goût ou la courtoisie de ne considérer que la traite des êtres humains, le racket, l'extorsion ou le carrousel de TVA, en étant un peu moins regardants sur la fraude fiscale, quant aux données qu'ils nous communiquent pour notre enquête.

Vous le savez, si vous demandez à certains pays une entraide judiciaire portant uniquement sur la fraude fiscale, et surtout s'il n'y a pas de manoeuvre dolosive caractérisée, les autorités de ce pays peuvent considérer que vous ne les abordez que pour des questions d'évasion de capitaux et, dans ce cas, on ne vous répond pas : vos homologues jugent que l'infraction n'est pas caractérisée. Je reviendrai sur ce point si vous le souhaitez.

Bref, dans le cadre des coopérations, nous utilisons nos propres canaux, que nous connaissons par coeur, avec nos correspondants. Nous avons noué, de très longue date, des liens de confiance avec nos homologues à l'étranger. Nous avançons avec d'autres infractions et la coopération n'a pas tout à fait le même régime que dans les cas habituels.

J'évoquerai maintenant quelques pistes d'amélioration - j'en ai dressé une liste sommaire.

Tout d'abord, je relève que la DGFiP doit avoir des présomptions de fraude. Or, je le répète, elle est très mal positionnée pour émettre des présomptions de fraude pour des personnes dont les activités sont totalement illicites et qui, pourtant, lèsent le fisc, en exportant, dans ce cadre, des capitaux à l'étranger, et en y constituant des patrimoines criminels extrêmement importants qui ne sont jamais imposés.

Ensuite, je l'ai évoqué auparavant, il n'y a pas de liaison ferme entre la procédure pénale que nous menons et les procédures de la DGFiP. Ainsi, la DGFiP continue parfois à conduire ses enquêtes fiscales propres alors même que la BNRDF est saisie. Très souvent, les impôts ont porté plainte au pénal, parce que l'enquête fiscale propre, menée avec les moyens de l'administration fiscale, ne permet pas d'envisager un aboutissement. Ainsi, il est impératif de passer au pénal pour développer des moyens d'investigation nouveaux, plus forts, plus coercitifs, et pour bénéficier d'une coopération internationale plus efficace. Mais pendant ce temps, l'enquête se poursuit.

Ainsi, on essaie de vider quelque peu le contenu du pénal pour le remettre dans le fiscal, ce n'est tout de même pas tout à fait l'esprit des textes et de la pratique. De surcroît les enquêtes peuvent se télescoper. Je prends un exemple même si, malheureusement, je ne peux pas citer les noms des personnes concernées.

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