Intervention de Maïté Gabet

Commission d'enquête Evasion des capitaux — Réunion du 27 mars 2012 : 1ère réunion
Audition de Mm. Edouard Marcus sous-directeur du contrôle fiscal de mmes maïté gabet chef du bureau des affaires internationales joëlle massoni chef du bureau politique et animation du contrôle fiscal et M. Marc Emptaz chef de la mission pilotage

Maïté Gabet, chef du bureau des affaires internationales :

En tout cas, c'est stratégique parce que le e-commerce prend de l'ampleur. La Haute Assemblée, notamment par l'intermédiaire de M. Philippe Marini, s'est intéressée à cette question. La DGFIP, qui s'est exprimée devant l'une des commissions du Sénat, aborde la problématique du e-commerce sous l'angle des impôts dus. Sous le vocable d'« impôts dus », on ne parle pas de la même chose selon qu'il s'agit des impôts commerciaux - donc de l'impôt sur les sociétés - ou de la TVA. Nous avons choisi de passer par le plus simple, en tout cas le plus encadré, en l'occurrence la problématique de la TVA.

Jusqu'en 2015, les entreprises qui pratiquent le e-commerce sur Internet sont redevables de la TVA dans les pays où elles sont implantées. Cela m'amène à évoquer une problématique très connue sur le plan international, celle des différentiels de taux au sein de l'Union européenne. Le Luxembourg, qui n'est pas très loin d'ici, a, sur son territoire, des entreprises qui y sont réellement implantées. Et elles acquittent la TVA auprès du Grand-Duché.

À partir de 2015, le régime va changer. L'entreprise restera implantée au Luxembourg mais elle sera redevable en France d'une partie de la TVA due par les consommateurs français. La question qui se pose est de savoir comment en 2015 contrôler les entreprises au Luxembourg.

La négociation communautaire qui a mis en place ces textes s'est employée à prévoir le contrôle. Ce qui a été acté dans la directive est assez simple : quand la France souhaitera vérifier le montant que le Luxembourg lui aura rétrocédé pour ses consommateurs sur n'importe quel opérateur - eBay, par exemple - elle demandera au Luxembourg - qui ne pourra pas le lui refuser - l'engagement, sur le plan local, d'un contrôle fiscal accompagné de vérificateurs français. C'est obligatoire. L'administration fiscale française mettra donc en oeuvre ce dispositif. Cela vaut pour la TVA et les activités en ligne.

Lorsque des biens achetés sur Internet vous sont livrés en France, ils sont taxables en France. D'ores et déjà, ces entreprises doivent déclarer en France et s'y faire représenter. La direction des non-résidents enregistre ces entreprises et vérifie leur correcte taxation à la TVA.

Nous sommes là pour dire les choses un peu franchement : nous pensions fortement que la problématique du e-commerce porterait sur des activités occultes non déclarées. Or ce n'est pas ce qui ressort de nos travaux ni des premières enquêtes. La problématique, c'est la correcte adéquation entre le lieu d'implantation et l'activité développée.

Cela m'offre une transition avec les impôts commerciaux : comment fait-on pour localiser le bénéfice rattaché à des activités très immatérielles ? Ces entreprises du e-commerce, c'est, en quelque sorte, l'acmé d'une problématique plus générale d'organisation internationale de groupes qui peuvent remettre là des incorporels, là de la supply chain... Tout cela est connu.

Aujourd'hui, à droit constant, ces entreprises, comme les grands groupes, sont vérifiées de façon systématique suivant les règles actuelles, celles des prix de transfert ou des contrats légaux. Elles sont remises en cause quand la réalité ne correspond pas à ce qui est déclaré. Cette problématique est sur la table.

La question d'un changement des lieux de taxation, évoquée au Sénat par l'adoption de la taxe Google, pour savoir si, pour mieux fiscaliser cinq ou six grands groupes internationaux, il faut taxer tous les annonceurs, se pose en termes d'équilibre.

Le e-commerce met en évidence la problématique du dumping fiscal entre les pays. Elle existe dans le e-commerce, mais elle existe aussi ailleurs. Il n'y a pas besoin de faire du e-commerce pour faire du business restructuring !

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