Intervention de Philippe Marini

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 30 mai 2012 : 1ère réunion
Audition de M. Didier Migaud premier président de la cour des comptes

Photo de Philippe MariniPhilippe Marini, président :

Merci de cet exposé synthétique. Je m'en tiendrai à quelques questions de méthode pour lancer le débat.

La certification est une affaire de confiance absolument essentielle. Pour les investisseurs, les opinions et analyses de la Cour sont solides et irremplaçables. Ne risque-t-on pas, les mesures les plus faciles ayant été prises, de voir la Cour reproduire, année après année, les mêmes réserves substantielles ? Si tel était le cas, quel sens donner à la certification ?

La difficulté à recenser les garanties de l'État étonne notre commission, chacune de ces garanties ayant une base législative. Est-ce à dire que l'on s'est passé, pour certaines d'entre elles, de l'aval du Parlement ? Dispose-t-on d'une estimation du gain que représente la rémunération de ces garanties ?

Le rapport sur l'exécution budgétaire se réfère à la loi de programmation sans évoquer l'article 15, introduit à l'initiative du Sénat, créant un dispositif qui s'apparente à une « loi de règlement du programme de stabilité ». La Cour entend-elle examiner cette question dans son rapport du mois de juin ? Cet aspect est très important : l'exécution est conforme à la loi de programmation ; en va-t-il de même pour le programme de stabilité ? Quelle méthode utiliserez-vous pour aborder ce point ?

En matière d'outils de pilotage, puisque vous insistez à juste titre sur la maîtrise des dépenses, ne faudrait-il pas, pour apprécier l'ampleur des efforts à réaliser, mieux connaître la tendance spontanée de leur évolution ? Comment est-elle calculée pour chaque catégorie de dépense ? Le Gouvernement n'a jamais communiqué explicitement sur cette donnée.

La stratégie générale de maîtrise de la dépense doit s'appuyer, vous l'avez indiqué à maintes reprises, sur la mesure de l'efficacité. On ne peut que vous suivre : à quoi bon tous ces indicateurs si l'on ne s'en sert pas ? Cela dit, cette approche, dirait un esprit mal tourné, est peut-être le meilleur moyen de ne pas faire d'économies, chaque administration et chaque catégorie de bénéficiaire cherchant à montrer que sa dépense est la plus efficace. Qui peut apprécier, de manière neutre, l'adéquation des indicateurs à leurs fonctions, si ce ne n'est, d'un côté le Parlement et, de l'autre la Cour ? Si l'on devait utiliser ces indicateurs comme élément d'arbitrage budgétaire, que faudrait-il faire : récompenser les bons élèves ou ceux dont les moyens n'étaient pas à la hauteur de la tâche ? Faire de la performance une technique de l'allocation des fonds n'est évidemment pas simple. Quels conseils la Cour peut-elle nous donner à ce sujet ?

En matière de dépenses, vous n'avez évoqué ni la réserve de précaution ni les investissements d'avenir. Sans doute comptez-vous le faire en juin ?

La Cour, dans son rapport, relève une augmentation des reste-à-payer. Ils s'établissent à 86 milliards d'euros fin 2011, soit l'équivalent de 30 % des dépenses nettes du budget général. Pouvez-vous détailler quels ministères recourent le plus à ces facilités et sur quel type de dépenses ces reports portent-ils ? Ce serait dommage de les voir se recréer après les efforts difficiles consentis pour les réduire.

Vous n'en voudrez pas aux sénateurs d'être attentifs aux relations financières entre l'État et les collectivités territoriales... Le compte d'avance aux collectivités territoriales enregistre un écart de plus de 5 milliards d'euros entre l'excédent prévu en 2010 et l'excédent réalisé. La comptabilisation des remboursements et dégrèvements de la réforme de la taxe professionnelle ne prend pas en compte l'écrêtement de la CVAE si bien que 560 millions d'euros auraient totalement disparu. Pouvez-vous nous éclairer ?

Notre analyse est convergente sur les dépenses fiscales. Cela dit, renforcer l'application de la norme « zéro valeur », comme vous le préconisez dans votre rapport, est-ce vraiment réaliste dans une période comme la nôtre ?

J'en reste là. Les uns feront certainement valoir que le Gouvernement qui vient de rendre son tablier a tenu ses objectifs. Les autres mettront en avant les menaces et les risques qui pèsent sur la gestion qui commence. La Cour, instance neutre, indépendante et collégiale qui joue un rôle essentiel en cette période de transition, éclairera notre lanterne.

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