Intervention de Maryvonne Caillibotte

Commission d'enquête Evasion des capitaux — Réunion du 2 mai 2012 : 1ère réunion
Audition de Mme Maryvonne Caillibotte directrice des affaires criminelles et des grâces au ministère de la justice et des libertés

Maryvonne Caillibotte, directrice des affaires criminelles et des grâces au ministère de la justice et des libertés :

Il s'agissait de propositions du Gouvernement.

Étant à la tête d'une direction normative, nous savons écrire des textes de loi : nous pouvons écrire pour mettre en oeuvre la politique décidée par le Gouvernement, ou nous pouvons aussi faire un certain nombre de propositions. Sur le sujet qui nous concerne, j'ai d'ailleurs des propositions à faire, mais qui concernent plutôt l'élargissement du champ d'intervention de la BNRDF.

Sur les peines et le niveau de pénalité, je souligne tout d'abord que mon rôle, en tant que direction, est de vérifier qu'il y a une cohérence dans l'échelle des peines, de manière à ce qu'une infraction à laquelle on souhaite appliquer une peine plus lourde ne se trouve pas, de ce fait, en contradiction avec d'autres infractions qui ont pu ou qui peuvent être considérées par l'opinion publique, par l'opinion politique, comme plus importantes.

Mon rôle est de faire en sorte que les comparaisons restent décentes. Cela étant, les choix de peine sont des choix politiques, tant gouvernementaux que parlementaires. Cela me paraît tout à fait essentiel.

Par ailleurs, indépendamment de ce que prévoit la loi, les pénalités qui sont prononcées par les juridictions françaises - c'est un reproche qui est souvent adressé à ces dernières -sont considérées comme peu importantes, voire ridicules en matière de fraude fiscale, et, de façon plus générale, en matière économique et financière. Cela fait dire à certains commentateurs que le risque vaut parfois la peine d'être encouru parce que le trouble à l'ordre public engendré par ce type de délinquance, la fameuse délinquance en col blanc, n'est peut-être pas aussi sensible que celui créé par des infractions plus violentes, plus visibles et qui peuvent entraîner des réactions de sévérité de la part des juridictions. Indépendamment du niveau des peines prévues par les textes, il y a aussi le niveau effectif de répression.

A propos de votre question sur la politique pénale, je précise que la fraude fiscale en tant que telle ne fait pas l'objet d'instructions particulières du ministère de la justice, notamment de ma direction en matière de politique pénale.

Pour autant, la lutte contre toutes les formes de fraude en général, notamment la fraude fiscale, est bien intégrée dans les priorités de politique pénale. J'en veux pour preuve la dernière circulaire de politique pénale générale signée par le ministre lui-même à la fin du mois de février dans laquelle il appelait, pour l'année à venir, les magistrats, les procureurs généraux, les procureurs à se mobiliser ou se remobiliser sur un certain nombre de thématiques qui lui paraissaient essentielles. En bonne place figurait donc la lutte contre toutes les formes de fraudes, y compris la fraude fiscale et la fraude à l'identité.

J'ajoute que ma direction dispose d'un outil qui nous permet de faire remonter des informations, au-delà des simples statistiques, sur l'activité des juridictions : il s'agit du rapport de politique pénale.

Nous sollicitons chaque année tous les parquets de France et les parquets généraux, sur un certain nombre de thématiques. Au-delà de thématiques classiques et récurrentes, nous en choisissons d'autres sur lesquelles nous voulons plus particulièrement mettre l'accent. À partir de là, nous extrayons une part importante d'informations afin d'avoir une vision globale de ce qui se passe sur l'ensemble du territoire, des difficultés, des solutions, etc.

Cette année, nous avons choisi la matière que je qualifierai globalement, encore une fois, d'« économique et financière », car la plupart des juridictions françaises, même si ce n'est pas forcément le cas des juridictions importantes, sont régulièrement confrontées à la difficulté de disposer d'enquêteurs en matière économique et financière - et je leur ai tout à l'heure rendu hommage - en nombre suffisant pour traiter de l'ensemble des affaires.

J'ai donc demandé cette année à tous les procureurs de me transmettre un état des lieux global de l'ensemble des affaires économiques et financières comprenant la fraude fiscale, c'est-à-dire les enquêtes ou les affaires qui sont en cours, le niveau éventuel de répression, la possibilité pour eux de disposer ou non d'enquêteurs, la rapidité avec laquelle les enquêtes sont effectuées, etc.

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