Voilà !
J'espère que vous n'avez pas déduit de mes propos, car ce n'est pas ce que j'ai voulu dire, que le droit pénal est la solution dissuasive à 100 % pour lutter contre l'évasion fiscale, la fraude fiscale, les paradis fiscaux. Ce n'est certainement pas le cas. Le droit pénal est un outil de lutte dans certains dossiers, mais nous avons aussi nos limites, qui sont celles que j'ai tout à l'heure indiquées, ou sur lesquelles j'ai en tout cas mis l'accent. Nous rencontrons certaines difficultés qui font que les enquêtes n'avancent pas. Ces difficultés ne sont pas liées à d'éventuelles pressions mais à la possibilité d'obtenir ou non d'autres pays des informations qui peuvent nous permettre de rassembler des preuves.
La matière pénale est régie par une procédure qui est très exigeante et qui garantit un recours au contradictoire très large. Cette procédure offre donc de nombreuses voies de recours aux personnes mises en cause, qui ont vocation à se défendre, et plus encore dans les nouvelles procédures dont je vous ai parlé. En effet, dans au moins une trentaine de procédures actuellement traitées par la BNRDF, le contribuable n'a jamais été avisé. Certaines d'entre elles ont donné lieu à une saisine du juge d'instruction - il y a donc là un contradictoire très organisé -, mais d'autres sont encore au stade de l'enquête préliminaire, qui est une enquête secrète. Comment va réagir le contribuable vis-à-vis de ces conduites d'enquêtes qui sont totalement opaques et inconnues de lui pour l'instant ?
Notre droit et notre procédure organisent des voies de recours qui sont très avantageuses pour le citoyen mais qui peuvent parfois être un obstacle à l'avancée rapide d'une enquête. Il faut un équilibre entre la garantie des droits et l'efficacité d'une enquête. De temps en temps, on a l'impression que, là non plus, ce n'est pas très équilibré, mais c'est une autre histoire et je ne suis pas sûre d'être tout à fait objective...
Votre troisième question fait écho à une autre, à laquelle je n'ai pas bien répondu, dans laquelle le rapporteur me demandait de lui citer des exemples de « franchissements de frontières ».
Il est compliqué pour moi de vous répondre ; j'ai des dossiers en tête, mais, étant soumise au secret, je ne les évoquerai pas devant vous. Cela étant, dans certaines affaires qui ont défrayé la chronique, on a constaté que, finalement, ce qui pouvait apparaître comme la recherche d'une optimisation licite, donc d'une réduction d'impôt, s'appuyait en réalité sur l'utilisation de trusts ou fiducies qui correspondaient à des domiciliations fictives. On est là clairement dans le vif du sujet.