Vous n'entendrez jamais un service d'enquête dire qu'il a suffisamment de moyens. Si des agents supplémentaires venaient renforcer mon service, j'en serais ravie !
Plus sérieusement, je souligne qu'un service comme le mien a de plus en plus besoin de spécialistes pour la recherche de la preuve informatique. Cela implique, dans l'organisation de services spécialisés et thématiques, de disposer de personnels très compétents dans la détection et la description des fraudes. Ces services techniques doivent pouvoir immédiatement détecter des éléments dissimulés dans un ordinateur, et, si quelque chose est détecté est à l'étranger, se mettre aussitôt en situation d'intervenir.
Ce que vous appelez « l'économie informatique » dans une des questions que vous m'avez adressées est un vrai sujet d'inquiétude. On parle du « nuage informatique » ; la question que je me pose, quand je m'apprête à procéder à une perquisition, c'est de savoir où est ce nuage, puisque, par définition, je sais qu'il n'est pas en France.
On nous dit que c'est dans le nuage informatique que réside probablement une des clés de l'essor des fraudes. Donc, on se retrouve, aujourd'hui, dans une logique qui est toujours la même, qui consiste à se demander comment, dans un système informatique de plus en plus sophistiqué, de plus en plus performant, on peut toujours se réserver ce que j'appelle « l'analyse de la fraude », à quel moment celle-ci peut intervenir et quels sont les moyens susceptibles d'être mis en place.
C'est là un vrai problème, comme on s'en rend compte lorsqu'on est confronté à des opérations d'ordre de virement, d'achat et de vente sur des produits qui, quelquefois, n'ont même pas d'existence réelle, comme les quotas carbone, à propos desquels un fraudeur disait d'ailleurs : « Au moins, je suis sûr qu'on ne me les volera pas ! ».
C'est clair et net, face à ce type d'activité délictuelle, la question à se poser, pour l'avenir, est celle de la preuve de la fraude, à la fois en termes d'analyse qui peut en être faite et en termes d'outils dont il faut se doter.
Pour répondre précisément à votre question, j'ajoute qu'il est nécessaire qu'un service comme le mien se dote de tels spécialistes, comme il s'est doté des deux analystes dont j'ai précédemment parlé. Nous nous sommes dit qu'en l'état des fraudes que nous constations, fraudes informatiques, organisées, notre service devait, par une analyse interne de ces données, s'efforcer d'être proactif : comment, nous qui sommes un service jeune et relativement restreint, pouvons-nous nous placer en situation de déterminer si d'autres fraudes sont possibles, et où et comment celles-ci vont se manifester ?