Intervention de Éric Fourel

Commission d'enquête Evasion des capitaux — Réunion du 9 mai 2012 : 1ère réunion
Audition de M. Eric Fourel avocat au barreau des hauts-de-seine avocat associé en charge d'ernst & young société d'avocats

Éric Fourel, avocat au barreau des Hauts-de-Seine, avocat associé en charge d'Ernst & Young Société d'avocats :

Je citerai l'exemple tout simple du Royaume-Uni, qui baisse son taux d'impôt sur les sociétés à 24 % alors que le nôtre est maintenant de 36 % avec la sur-cotisation qui a été imposée dans la dernière loi de finances. Voilà bien un élément de la guerre fiscale à laquelle se livrent les pays de l'Union européenne.

Il existe évidemment d'autres exemples, mais le Royaume-Uni, avec ce système d'entité détentrice de propriété intellectuelle qui bénéficiera d'un taux réduit à 10 %, participe à cette compétitivité, à cette compétition fiscale internationale autour de la propriété intellectuelle.

La propriété intellectuelle est l'enjeu majeur de la fiscalité internationale actuelle. En expliquant pourquoi, je répondrai aussi à votre question. En effet, dans la théorie générale des prix de transfert, on attribue la plus grande valeur - cette approche pourrait d'ailleurs être philosophiquement contestée - et donc la plus grande base imposable aux activités intellectuelles, qui sont à l'origine de l'innovation et de l'idée. On considère que c'est à elles que doit aller le profit résiduel une fois qu'a été rémunéré ce que l'on appelle les fonctions de routine, c'est-à-dire les fonctions de production et de distribution.

Donc, aujourd'hui, une guerre mondiale est engagée pour attirer cette propriété intellectuelle dans tel Etat plutôt que dans tel autre, en vue de pouvoir ensuite justifier de la localisation de la base taxable la plus forte dans cet Etat.

Cette guerre à laquelle se livrent les différents régulateurs peut être positive à travers une attractivité spécifique donnée aux éléments de propriété intellectuelle - le Royaume-Uni en est un exemple tout récent. Mais elle peut aussi s'exercer à travers une répression tous azimuts : par exemple, on vous dira que l'entité de distribution qui se contente de vendre ses shampooings localement et assure un certain nombre de dépenses publicitaires à cette fin a en fait développé un savoir-faire marketing spécifique, une propriété intellectuelle particulière, un actif de grande valeur parce qu'elle a acquitté les dépenses publicitaires correspondant à la promotion des ventes et que, par conséquent, une partie de la propriété intellectuelle doit être attirée dans cette étape de distribution et que vous devez lui laisser non pas 5 % mais 10 % de profits normatifs, eu égard à cette plus grande valeur qui est attachée à des fonctions que d'autres estimeront être de routine.

En résumé, soit positivement, soit négativement, aujourd'hui, l'une des grandes tendances de la réglementation fiscale internationale est de réussir à préserver, attirer et parfois confisquer une propriété intellectuelle, afin de justifier du rattachement le plus grand possible d'une certaine base imposable.

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