Intervention de Geneviève Fioraso

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 11 juillet 2012 : 1ère réunion
Audition de Mme Geneviève Fioraso ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Geneviève Fioraso, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche :

Je ne suis pas dogmatique : compte tenu de la situation de l'emploi et de la régression de la recherche dans les classements, si nous voulons retrouver la confiance d'un milieu dont la principale qualité est l'intégrité intellectuelle, nous devons faire preuve d'honnêteté. En revanche, nous constatons des effets d'aubaine, comme je l'ai dit au Medef, qui n'était pas très content. Ainsi un grand groupe pétrolier français que je ne nommerai pas a créé 200 sociétés par actions simplifiées pour en bénéficier. C'est inacceptable, d'autant qu'il a travaillé avec des laboratoires de la filière solaire photovoltaïque qui ont immédiatement transféré des activités en Asie et acheté une société américaine, alors que nous avons en France une société qui a trente ans d'expérience en la matière, et qu'a rachetée in extremis une filiale d'EDF - j'ai appris récemment qu'elle cherchait une joint venture avec une entreprise étrangère. Nous sommes très vigilants.

Le Président de la République n'a pas dit qu'il le diminuerait mais qu'il le plafonnerait. Conformément à ses engagements, nous redirigerons le dispositif vers les entreprises en croissance et innovantes, celles qui relèvent du comité Richelieu, et les entreprises de taille intermédiaire. Nous y ajouterions l'innovation et la transformation en produit, non pas les lignes pilotes, qui peuvent prétendre à des financements européens au titre des technologies génériques capacitantes, mais avec un accompagnement marketing.

Le CIR n'est pas conçu pour la recherche fondamentale, qui doit être financée par d'autres voies : organismes de recherche, grands programmes structurants et européens. Il faudra évaluer son impact sur l'emploi, dans les nouvelles filières : efficacité énergétique, matériaux nouveaux, chimie verte, mutation écologique et environnementale des processus industriels qui consomment trop de ressources et d'énergie. L'innovation incrémentale, c'est bien, l'innovation de rupture c'est mieux.

Oui, madame Primas, l'espace non militaire relève de ma responsabilité. Je n'ai pas encore reçu le rapport de M. Yann d'Escatha. Il y a un débat sur le passage d'Ariane 5 à Ariane 6. Ce saut technologique comporte des risques sur lesquels les industriels concernés ont attiré mon attention, particulièrement si l'on ne passait pas par Ariane 5-ME que vous avez citée. La pire des situations serait celle où les industriels tiendraient une position très affirmée, ce qui semble être le cas, et où l'organisme de recherche aurait une position contraire, tout aussi affirmée.

Je tiens à rendre hommage à mon illustre prédécesseur, Hubert Curien, qui fut le premier à mettre en place une filière de recherche fondamentale intégrant les entreprises, non comme sous-traitants, mais comme co-traitants. Dans la situation que je viens d'évoquer, il serait difficile, pour le ministère de la recherche, de trancher. En novembre, une position commune doit être adoptée. Je souhaite cette convergence. Je suis sensible à ce que disent les industriels comme à l'emploi.

Madame Cartron, je connais l'engagement de l'Aquitaine et de son président Alain Rousset en faveur de l'enseignement supérieur et de la recherche en général et de la culture scientifique et technique en particulier. Cap Sciences mène ses missions de terrain avec efficacité. Il est vrai qu'il faut consentir un effort particulier à l'égard des jeunes filles. Il est désespérant qu'elles soient de moins en moins nombreuses dans les écoles d'ingénieurs, de même que les femmes dans les conseils d'administration. Certaines filières, comme la chimie, l'électrochimie ou la microélectronique sont toujours considérés comme masculines, alors que les conditions d'exercice des métiers ont bien changé : partout, l'on est derrière un ordinateur, pour faire tourner des modèles. Il faut que cela change ! Top Chef a changé l'image des métiers de bouche. Nous devrions arriver, avec des émissions comme Top chimiste - pourquoi pas ? - à changer celle des métiers scientifiques. Nous ne sommes pas condamnés aux frères Bogdanoff, sur la chaîne de plus grande écoute ! Voyez les documentaires scientifiques de la BBC : attractifs, bien faits, ils recueillent une large audience...

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion