Intervention de Serge Larcher

Réunion du 12 juillet 2012 à 9h30
Débat sur la politique commune de la pêche

Photo de Serge LarcherSerge Larcher, rapporteur :

Je souhaite enfin souligner que, au-delà de la PCP, la politique commerciale de l’Union européenne constitue une menace pour l’économie des outre-mer.

Ainsi, en matière de pêche, les accords de partenariat économique, ou APE, passés par l’Union européenne avec certains pays voisins des RUP entravent le développement du secteur. Dans le cadre de ses politiques commerciale et de développement, l’Union européenne conclut en effet des accords de libre-échange avec certains pays d’Afrique, de la Caraïbe et du Pacifique, appelés pays ACP, qui ne sont pas soumis aux normes européennes et dont les coûts de production sont très inférieurs.

Cette situation illustre une fois de plus l’incohérence des politiques communautaires. Quelle est en effet la cohérence entre la politique commerciale et la stratégie définie par l’Union européenne à l’égard des RUP, qui vise à « valoriser les atouts de l’ultrapériphérie » ? Où est la cohérence entre la politique commerciale et les politiques sectorielles de l’Union européenne telles que la PCP ou la politique de cohésion ?

J’en arrive aux recommandations de la résolution européenne du Sénat, issue des travaux de la délégation sénatoriale à l’outre-mer.

Messieurs les ministres, la Haute Assemblée a formulé deux séries de recommandations visant à faire valoir les intérêts de la pêche ultramarine.

S’agissant de la PCP proprement dite, la résolution appelle la mise en place, à l’occasion de la réforme de la PCP, de règles spécifiques aux régions ultrapériphériques, sur le fondement de l’article 349 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. Cet article, qui est très insuffisamment utilisé, permet en effet l’édiction de règles spécifiques aux RUP afin de tenir compte de leurs handicaps.

Parmi ces dispositifs spécifiques, la Haute Assemblée recommande notamment le rétablissement de la possibilité d’octroyer des aides à la construction de navires dans les RUP. Elle appelle également à la création d’un comité consultatif régional, ou CCR, spécifique aux RUP.

Dans un second temps, la résolution comporte des recommandations portant sur la politique commerciale de l’Union européenne. Elle appelle ainsi cette dernière à mieux articuler sa politique commerciale avec ses autres politiques sectorielles. Cette mise en cohérence doit passer notamment par une évaluation systématique et préventive des effets sur les RUP des accords commerciaux négociés par l’Union européenne. Sur cette question, le texte reprend d’ailleurs fidèlement la position exprimée par la Haute Assemblée en 2011, dans le cadre d’une proposition de résolution européenne tendant à obtenir la compensation des effets sur l’agriculture des départements d’outre-mer des accords commerciaux conclus par l’Union européenne.

Je me réjouis du large consensus dont a fait l’objet ce texte au sein des différentes instances de la Haute Assemblée. L’ensemble des personnes que j’ai auditionnées ou simplement sollicitées en tant que rapporteur ont souligné l’opportunité de cette démarche. Ce texte constitue à n’en pas douter, messieurs les ministres, un appui utile pour les démarches entreprises par le Gouvernement à l’échelle européenne en vue d’assurer la prise en compte des spécificités de la pêche ultramarine.

Je souhaite formuler deux dernières observations.

S’agissant des outre-mer, messieurs les ministres, il convient à mon sens de tout faire pour défendre l’article 349 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, qui représente un véritable Graal pour les régions ultrapériphériques. Cet article est insuffisamment utilisé, signe de la méconnaissance des problématiques ultramarines par la Commission européenne, mais également de la difficulté de faire entendre la voix des outre-mer dans une Union européenne à vingt-sept.

Ensuite, la question de la cohérence des politiques communautaires, et notamment la nécessité que la politique commerciale ne soit pas totalement déconnectée des autres politiques communautaires, concerne certes les outre-mer, économies particulièrement fragiles, mais également, chers collègues de l’Hexagone, l’ensemble des régions françaises. Je relève à ce titre que les deux résolutions de la Haute Assemblée sur la pêche se rejoignent. La résolution « générale », dont les contours ont été rappelés par notre collègue Bruno Retailleau, appelle ainsi à ce qu’« une conditionnalité environnementale et sociale s’applique aux produits de la pêche ou de l’aquaculture provenant de pays tiers ».

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