Mme Gisèle Gautier. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'Etat à l'assurance maladie.
Le 24 août dernier, a été publié au Journal officiel un décret en Conseil d'Etat relatif aux droits à l'assurance vieillesse des conjoints survivants.
D'abord passé inaperçu, car nous étions au mois d'août, ce décret a ensuite suscité, à juste titre, un véritable tollé. Il a, hélas, matérialisé les craintes que le groupe de l'Union centriste et moi-même avions exprimées lors de l'examen du projet de loi portant réforme des retraites.
Nous avions été les seuls à alerter la Haute Assemblée sur les dangers recélés par l'article 22 du projet de loi qui modifiait le régime des pensions de réversion. Il nous semblait prématuré et dangereux de transformer les pensions de réversion en allocations différentielles et de supprimer dans le même temps l'allocation veuvage.
Nous avions réclamé la suppression de cet article en faisant valoir que, dans un certain nombre de cas, les personnes bénéficiant aujourd'hui de l'allocation veuvage toucheraient moins en percevant leur pension de réversion avant l'âge de cinquante-cinq ans.
Le décret du 24 août prévoyait qu'à compter du 1er juillet 2006, les pensions de retraites complémentaires auraient été incluses dans le calcul des ressources du conjoint survivant, ce qui aurait durci les conditions d'attribution de la pension de réversion aux veufs et aux veuves.
Ce décret aurait pu dégrader les conditions d'existence d'un grand nombre de ces hommes et de ces femmes.
De plus, il faisait de la pension de réversion une pure allocation différentielle révisée tous les ans en fonction des revenus du bénéficiaire.
Parce qu'il n'est pas juste de faire peser la nécessaire réforme des retraites sur les plus démunis, une telle mesure n'était pas acceptable. Nous apprécions que le Gouvernement ait décidé de différer son entrée en vigueur pour lancer une évaluation du dispositif préalable à d'indispensables correctifs.
Le Conseil d'orientation des retraites est saisi de la question. Dans quelques semaines, il rendra publique une étude complémentaire.
En attendant, la suspension du décret du 24 août ne repose sur aucune base juridique. Dans ce flou, pouvez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, prendre l'engagement de rendre équitable le nouveau dispositif des pensions de réversion ? Avez-vous dès à présent des pistes et, si oui, lesquelles ? Près de deux millions et demi de bénéficiaires attendent, inquiets, votre réponse.
M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat à l'assurance maladie. Monsieur le président, à l'occasion de cette première séance de questions d'actualité au Gouvernement, permettez-moi de vous saluer et de saluer Mmes et MM. les sénateurs nouvellement élus. (Applaudissements.) Je me réjouis du travail que nous pourrons continuer à mener avec la Haute Assemblée.
Madame le sénateur, quel était l'enjeu de la réforme des retraites ? Il s'agissait à la fois de garantir l'avenir des retraites dans notre pays et de permettre un certain nombre d'avancées sociales.
M. Jacques Mahéas. Des avancées sociales ?
M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Les Françaises et les Français qui ont commencé à travailler très tôt, ceux qui ont eu des carrières longues et qui, aujourd'hui, sont en retraite avant soixante ans savent bel et bien de quoi nous parlons.
M. René-Pierre Signé. Il ne s'agit pas de cela !
M. Jacques Mahéas. Nous ne parlons pas de cela !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Répondez à la question !
M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Les retraités agricoles qui bénéficient de la mensualisation comme celles et ceux qui pourront augmenter leur retraite au fur et à mesure de leur carrière savent également de quoi il s'agit.
Concernant les pensions de réversion, ...
M. Jacques Mahéas. Ah ! Tout de même, on y vient.
M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. ...il s'agit, là également, d'une mesure de justice sociale. En effet, nous souhaitons supprimer non seulement la condition de remariage, qui pénalisait de nombreux veufs et veuves, mais également la condition d'âge.
Cette réforme était bel et bien considérée, tant dans son esprit que dans ses modalités d'application, comme une avancée sociale.
Que s'est-il passé avec le décret du 24 août ?
La condition de ressources existait auparavant ; elle est maintenue aujourd'hui, et au même niveau. Cependant, c'est le plafond de ressources et les interprétations qui en ont été faites qui ont posé problème et suscité les craintes des personnes concernées.
Qu'a décidé M. le Premier ministre ?
Il a décidé de suspendre immédiatement et intégralement les dispositions de ce nouveau décret
(Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste.)
Cela signifie qu'aucune des personnes percevant aujourd'hui une pension de réversion ne verra celle-ci modifiée, ni aujourd'hui, ni demain, ni après-demain.
(Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. Jacques Mahéas. Heureusement !
M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Les personnes qui touchent une pension de réversion savent aujourd'hui qu'il n'y aura aucun changement les concernant.
M. Raymond Courrière. Pourquoi avoir pris le décret, dans ces conditions ?
M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. Pour les autres, nous avons chargé le Conseil d'orientation des retraites de nous dire précisément comment nous devons procéder pour apporter aux veuves et aux veufs qui, bénéficiant du système depuis le 1er juillet 2004, pourraient nourrir aujourd'hui des craintes, la sécurité, la tranquillité d'esprit et la garantie du pouvoir d'achat.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Pour la tranquillité d'esprit, vous avez réussi !
M. Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat. C'est sur ces pistes, madame le sénateur, que nous travaillons et c'est en fonction de ces objectifs que nous attendons les conclusions du Conseil d'orientation des retraites.
La réforme des retraites est et restera une réforme de justice sociale !
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