Mme Jacqueline Gourault. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Lors d'un déplacement dans le Cantal, le Président de la République a annoncé la disparition de la taxe sur le foncier non bâti pour les agriculteurs.
Nous regrettons, sur la forme, une fois de plus, les conditions d'annonce de cette décision. Cette mesure, après celle sur la taxe professionnelle, porte atteinte à l'autonomie fiscale des collectivités locales en ce qu'elle diminue les ressources propres de nos communes.
Elle nous paraît, en effet, contredire l'article 72-2 de la Constitution, qui dispose : « Les recettes fiscales et les autres ressources propres des collectivités territoriales représentent, pour chaque catégorie de collectivités, une part déterminante de l'ensemble de leurs ressources. »
La taxe sur le foncier non bâti a représenté, en 2003, quelque 883 millions d'euros, dont 836 millions d'euros au profit des communes et de leurs groupements.
Plus important encore, le produit voté en 2004 par les communes représente, en moyenne, quatorze euros par habitant, mais cinquante-huit euros dans les communes de moins de 500 habitants, ce qui ferait d'elles les premières victimes d'une telle décision.
M. Raymond Courrière. M. Chirac dit n'importe quoi !
Mme Jacqueline Gourault. Enfin, cette décision ne répond pas aux attentes légitimes du monde agricole, d'autres réformes paraissant, en effet, plus nécessaires et plus urgentes pour nos agriculteurs.
M. René-Pierre Signé. Il n'y en a plus !
Mme Jacqueline Gourault. Ma question est donc double.
A un mois du rassemblement de tous les maires de France, comment comptez-vous les rassurer et leur garantir que l'autonomie fiscale ne sera pas entachée par cette décision?
Ne faut-il pas revenir sur cette décision et engager une véritable concertation avec le Parlement et tous les représentants des élus locaux pour réformer globalement et non au coup par coup la fiscalité locale ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat au budget et à la réforme budgétaire. Madame le sénateur, puisque vous évoquez la taxe professionnelle, permettez-moi tout d'abord de vous dire, que la commission de réforme de la taxe professionnelle, présidée par M. Olivier Fouquet, poursuit sa réflexion...
M. Jean-Pierre Sueur. Cela fait des années qu'elle travaille !
M. Robert Bret. Cela a l'air compliqué, quand même !
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. ... et que le Gouvernement espère être en mesure, d'ici à la fin de l'année, de proposer au Parlement un impôt de remplacement de la taxe professionnelle, dont chacun connaissait les défauts.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Cela peut durer longtemps !
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Quant à l'impôt sur le foncier non bâti, vous le connaissez bien, comme tous les élus de la ruralité : ses bases n'avaient pas été révisées depuis 1961 et, au fil des années, la part départementale, puis la part régionale avaient été supprimées. De plus, le nombre des exonérations avait été augmenté.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. On l'a compensé !
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Très honnêtement, madame le sénateur, j'estime que, quel que soit l'attachement des communes rurales à cet impôt, une remise à plat s'imposait.
M. René-Pierre Signé. Et l'autonomie financière ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Le Président de la République, avec toute la légitimité qui est la sienne, annonçait, le 19 octobre - le ministre de l'agriculture était à ses côtés - une réforme de la taxe foncière sur les propriétés non bâties qui devrait se traduire par une exonération progressive sur cinq ans de la taxe pour les agriculteurs.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Si le Parlement l'accepte !
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. Je vous rappelle - mais vous le savez bien ! - qu'il s'agissait là d'une demande très ancienne de la profession agricole.
M. Jean-Pierre Sueur. Et le Parlement, alors, que fait-il ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. D'une part, grâce à une compensation complète, cette mesure ne remettra pas en cause le financement des collectivités, notamment des communes rurales.
M. Jean-Pierre Sueur. Et l'autonomie financière ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat. D'autre part, cette réforme ne remettra pas en cause le principe d'autonomie financière.
Elle se fera dans la concertation : à la demande du Premier ministre, un groupe d'études, en liaison avec celui qu'a créé la Haute Assemblée, travaillera sur ce sujet, et, avant la fin de l'année, nous donnera un certain nombre de directives pour que, à partir du 1er janvier 2006, tranquillement mais sûrement, cette exonération se mette en place sur cinq ans, assortie de toutes les garanties pour les collectivités, notamment les communes rurales.
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