M. Gérard Delfau. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre, représenté au banc du Gouvernement par M. Forissier, secrétaire d'Etat à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales.
Le 23 octobre, à Guéret, dans la Creuse, 260 élus locaux, dont 28 maires, ont démissionné de leur mandat pour protester contre la fermeture d'une dizaine de perceptions, fermeture décidée à leur insu et avec une brutalité extrême. (Exclamations sur les travées de l'UMP.) Oui, mes chers collègues, je dis bien « une brutalité extrême ».
Le 8 novembre, devant la même menace, les mairies des cantons de Roujan et Servian, dans l'Hérault, fermeront au public, en signe de protestation.
Un peu partout, dans les départements, des conflits naissent entre La Poste et les municipalités, car l'entreprise publique veut transférer au secteur privé ou aux communes le poids de son réseau.
D'ailleurs, M. le Premier ministre, lui-même, s'en est ému, dès septembre, et 6 000 communes ont délibéré pour protester contre de telles fermetures.
Il faut y ajouter, quoi qu'il en ait été dit tout à l'heure, le transfert non compensé des compétences aux collectivités. Il y a désormais le risque d'un divorce entre l'Etat et les collectivités, et déjà chemine l'idée d'une grève administrative généralisée pour obliger le Gouvernement à respecter la légitimité des élus.
D'où ma première question : êtes-vous enfin prêt, monsieur le secrétaire d'Etat, à engager un vrai dialogue avec les dix associations nationales d'élus locaux qui ont signé, sur mon initiative et en présence de M. le président du Sénat, que je remercie, le manifeste pour des services publics équitables et performants ?
M. Paul Raoult. Il est bien le président !
M. René-Pierre Signé. Il va prendre sa carte au PS !
M. Gérard Delfau. La Poste connaîtra, par étapes, de 2006 à 2009, la fin du monopole du courrier. Pour maintenir sa présence territoriale, elle a besoin que l'entrée des opérateurs privés soit encadrée de règles strictes et il faut qu'elle puisse créer un établissement financier de plein exercice.
Une voix à droite. Litanie !
M. Gérard Delfau. Tel est l'objet notamment du projet de loi de régulation postale qui a été discuté au Sénat en janvier. Pouvez-vous nous assurer que le Premier ministre va inscrire ce texte à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale avant la fin de cette année, puisqu'il en a le pouvoir et le devoir ?
M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat à l'agriculture, à l'alimentation, à la pêche et aux affaires rurales. Monsieur le sénateur, je réponds par l'affirmative à la dernière question que vous avez posée : le texte sera inscrit à l'ordre du jour.
M. Gérard Delfau. Quand ? Avant la fin de l'année ?
M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat. D'une façon plus générale, s'agissant de la question des services publics, vous avez évoqué les perceptions. Cela m'a permis de me souvenir d'un département que je connais bien : l'Indre. Depuis vingt ans, six perceptions rurales y ont été fermées : cinq d'entre elles sous un gouvernement de gauche, une seule sous un gouvernement de droite.
(Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Yves Coquelle. Ce qui arrive ne va pas être triste !
Mme Nicole Borvo. Ce n'est pas la peine d'en fermer une de plus !
M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat. Cela montre bien que nous sommes confrontés à une évolution, à une nécessaire adaptation, à laquelle tous les gouvernements doivent faire face et qu'ils doivent gérer avec un souci de concertation mais également avec pragmatisme.
C'est en tout cas la volonté de ce Gouvernement. En 2003, il a signé un accord national avec les quinze grands opérateurs nationaux de service public, notamment en territoires ruraux. Cela a permis de mettre en place quatre expériences pilotes dans quatre départements différents pour mieux évaluer l'offre et trouver des solutions adaptées.
Sur la base d'un amendement sénatorial, la concertation a été inscrite et renforcée dans le projet de loi relatif au développement des territoires ruraux. L'Assemblée nationale, en deuxième lecture, vient d'ailleurs de conforter cet élément en donnant au président du conseil général un rôle éminent pour susciter la concertation qui doit être conduite par le préfet.
Vous le voyez, nous devons agir dans la transparence et toujours rechercher plus de concertation mais avec pragmatisme.
S'agissant de La Poste, son président s'est engagé solennellement à maintenir les 17 000 points de contact dans les départements et territoires ruraux.
M. René-Pierre Signé. Chez l'épicier ou au bistrot !
M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat. Cela se fait - mais vous le savez bien puisque cela se faisait auparavant - avec pragmatisme.
J'attire votre attention sur le fait suivant : confier le service postal à un commerçant de proximité - et Dieu sait s'ils ont un rôle important dans nos territoires ruraux ! -, c'est aussi étendre les horaires d'ouverture et conforter ce commerce.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Et s'il ferme boutique ?
M. le président. Veuillez conclure, monsieur le secrétaire d'Etat.
M. Nicolas Forissier, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement entend continuer avec détermination dans la voie de la concertation.
Je vous rappelle également que, dans le cadre de la loi postale, un fonds de péréquation va permettre de conforter cette politique.
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